Maritime - En France : armement pour essais de la corvette Aconit - En Grande-Bretagne : avenir de la Royal Navy - Au Japon : la Marine dans le 4e programme de défense - En République fédérale d'Allemagne (RFA) : commande de vedettes lance-missiles
En France : armement pour essais de la corvette Aconit
La corvette Aconit a été armée pour essais le 21 novembre 1970 dans l’arsenal de Lorient où elle avait été mise sur cale le 2 mars 1968 et mise à l’eau le 7 mars 1970. Elle entreprendra ses premiers essais à la mer dans le courant de janvier 1971 et doit en principe rallier la flotte au premier semestre de 1972. L’Aconit qui est un escorteur à vocation anti-sous-marine (ASM), constitue le stade ultime d’évolution de la famille des escorteurs d’escadre conçus après la guerre en vue de missions anti-aériennes et ASM et depuis lors différenciés à la suite d’importantes refontes en escorteurs lance-missiles surface-air (T-47 Tartar) et en escorteurs ASM équipés des armes et moyens de détection les plus modernes (T-47 refondus ASM).
L’Aconit préfigure la série des trois corvettes type Tourville (C67) de 5 500 tonnes actuellement en construction au titre de la 2e loi de programme.
Ses caractéristiques sont les suivantes :
– déplacement à pleine charge : 3 600 t,
– dimensions : 127 m x 13,40 m x 5,05 m (p.c.),
– installation de stabilisation.
Son appareil propulsif très compact est entièrement télécommandé à partir d’un poste central. Il se compose de deux chaudières et d’un groupe de turbines développant une puissance de 27 200 CV sur l’hélice. La vitesse maximale sera de l’ordre de 27 nœuds (40 km/h) et la distance franchissable permise par la quantité de combustible embarque de 5 000 nautiques (9 260 km) à 18 nœuds.
L’armement de l’Aconit comprend :
– deux tourelles simples de 100 CA automatiques ;
– une rampe d’engins Malafon porteurs de torpilles ASM L4 autochercheuses (approvisionnement : 13 missiles) ;
– un mortier quadritube de 305 à chargement automatique d’une portée d’environ 3 000 m en version ASM et de 6 000 m en version tir contre la terre ;
– deux catapultes pour torpilles L5.
L’Aconit possède également les dispositifs les plus modernes de détection, d’exploitation et de transmission des informations tactiques, en particulier un radar de veille très élaboré, un sonar basse fréquence DUBV-23 omnidirectionnel en bulbe d’étrave, un sonar remorqué DUBV-43 et une centrale de traitement de l’information comprenant deux calculateurs arithmétiques.
Son équipage qui dispose d’un confort encore jamais atteint dans notre Marine sur un bâtiment de ce tonnage, comprend 22 officiers, 250 officiers mariniers, quartiers-maîtres et matelots.
Le nom de l’Aconit a été choisi en souvenir de la corvette des Forces françaises libres qui s’est illustrée pendant la dure bataille de l’Atlantique en coulant le 11 mai 1943 deux sous-marins allemands.
En Grande-Bretagne : avenir de la Royal Navy
La Chronique de la défense dans le monde de ce mois mentionne l’ensemble des mesures affectant les trois armées telles qu’elles apparaissent à la lecture du Supplementary Statement on Defence Policy paru le 28 octobre 1970. Celles concernant la Royal Navy méritent un examen plus détaillé.
Le porte-avions de 50 000 t HMS Ark Royal sera maintenu en service jusqu’à la fin de la décennie alors que le précédent gouvernement comptait, comme on sait, le désarmer en 1972. Équipé d’intercepteurs tout temps McDonnell Douglas F-4 Phantom II à moteurs Rolls Royce et d’avions d’attaque Blackburn Buccaneer à capacité atomique, ce bâtiment qui vient de sortir d’une grande refonte qui a coûté plus de 30 millions de livres, est et restera la plus puissante unité des marines européennes occidentales et la contribution navale britannique la plus importante à l’Otan. Affecté normalement aux forces navales stationnées à l’Ouest de Suez (« Western Fleet ») et plus particulièrement à SACLANT, il pourra le cas échéant être envoyé dans d’autres régions du monde. Son sistership, l’Eagle équipé lui aussi en Buccaneer, mais que ses caractéristiques empêchent de mettre en œuvre le Phantom, sera désarmé en 1972. Bien que cela ne soit pas précisé dans le Statement, il semble que ce porte-avions doive après cette date constituer sous une forme ou une autre la « réserve » de l’Ark Royal si celui-ci devenait indisponible. Les flottilles embarquées sur ces deux bâtiments continueront, semble-t-il, à relever de la Fleet Air Arm (1) bien que les termes du Statement soient sur cette question quelque peu confus. Le recrutement des pilotes d’appareils à aile fixe interrompu sur l’ordre du précédent gouvernement en prévision du retrait définitif des porte-avions, ne sera pourtant pas repris. Pour combler le déficit de marins pilotes d’avions qui pourrait en résulter vers la fin de la décennie, il sera fait appel à du personnel de la RAF et celle-ci sera sollicitée au maximum pour la maintenance des avions de la Navy. Par contre, le recrutement des pilotes d’hélicoptères sera poursuivi pour l’armement des escorteurs et des navires porte-hélicoptères.
Le troisième porte-avions britannique, l’Hermes de 28 000 t qui est en réserve, sera transformé en porte-hélicoptères d’assaut. Il remplacera en 1975 le Bulwark, le plus ancien des deux « commando carriers » actuellement en service. Par contre, le Lion, le dernier croiseur classique de la Royal Navy ne sera pas converti en croiseur porte-hélicoptères ASM à l’instar de ses congénères Blake et Tiger.
Les forces de surface seront dotées de notre missile MM38 Exocet sous réserve de la conclusion satisfaisante des négociations en cours avec la France. L’adoption de ce système d’armes qui renforcera considérablement le potentiel défensif et offensif de la flotte, comme le maintien en service de l’Ark Royal, vont entraîner un ajournement du projet de croiseur porte-aéronefs à décollage court ou vertical qui devait dans l’optique du retrait des porte-avions constituer la réponse de la Royal Navy à la menace représentée par les croiseurs lance-missiles soviétiques. Cet ajournement sera mis à profit pour approfondir l’étude de ces futurs croiseurs et mettre au point un aéronef du type VTOL/STOL (avion à décollage et atterrissage vertical) répondant à ce que l’on peut attendre d’un appareil embarqué réellement valable sur le plan de la vitesse et de l’autonomie.
Enfin, la Royal Navy maintiendra en permanence une force de cinq destroyers ou escorteurs modernes à l’Est de Suez avec éventuellement un sous-marin pour leur entraînement à la lutte ASM. Cette force sera loin d’être aussi négligeable qu’on a bien voulu le dire, notamment dans notre grande presse, car elle sera accompagnée comme toute force navale britannique, quelle qu’en soit l’importance, par un soutien logistique mobile qui lui conférera une bonne mobilité stratégique. Cette petite force navale qui sera aussi souvent que possible renforcée par des éléments provenant de la métropole, pourra bénéficier du soutien du squadron de Hawker Siddeley Nimrod de la RAF qui sera stationné en Extrême-Orient. Cet appareil qui remplace progressivement les vieux quadrimoteurs Avro Shackleton dans les formations du 18e groupe (2) du Strike Command est un aéronef de patrouille maritime dérivé de l’avion civil De Havilland Comet 4C. Propulsé par 4 turbopropulseurs, sa vitesse de croisière est de l’ordre de 740 km/h et son autonomie sur 2 moteurs de 12 à 14 heures. Ce Nimrod qui possède un équipement électronique perfectionné comprenant notamment un calculateur digital traitant l’information reçue des systèmes de détection et de navigation du bord, est actuellement l’un des patrouilleurs maritimes les plus évolués.
En résumé, l’on peut dire qu’en ce qui concerne sa marine, le Gouvernement britannique fera tout pour qu’elle conserve la première place en Europe tout en lui donnant une capacité d’action à l’échelle du globe.
Au Japon : la marine dans le 4e programme de Défense
Les grandes lignes du 4e plan de défense japonais qui viennent d’être rendues publiques par l’Agence de Défense prévoient en gros une dépense de 5 700 M de yens (3) pour le renforcement du potentiel militaire nippon entre 1972 et 1976.
Cette somme représente plus que largement le double de celle qui sera dépensée au cours du programme quinquennal de 1967-1971. Le budget des forces armées ne continuera cependant qu’à représenter environ 1 % du Produit national brut (PNB). Ce programme, qui n’est pas encore tout à fait arrêté, sera après sa mise au point définitive discuté dans le courant de 1971 et sans aucun doute adopté à l’automne de la même année. Il fait suite au Livre blanc sur la défense dans lequel le Gouvernement de Tokyo a récemment attiré l’attention de son opinion publique sur la nécessité d’accroître durant les prochaines années le potentiel militaire du pays en raison de l’inquiétude que suscitent le développement des armes nucléaires en Chine, la rivalité sino-soviétique, les divisions idéologiques et l’instabilité politique régnant dans certains pays d’Extrême-Orient. Cette situation représente un facteur latent d’aggravation de la tension internationale dans cette région dont le Japon doit tenir compte. Pour ce qui concerne le 4e plan, l’effort portera surtout sur la marine et l’aviation en vue de donner au pays une force suffisante pour répondre dans un conflit classique à une attaque directe brusquée. Les forces terrestres de leur côté seront renforcées et modernisées et leur mobilité accrue tant pour faire face avec les deux autres armées à une agression extérieure que pour répondre à une attaque indirecte, menée de l’intérieur. Si ces forces ne suffisaient pas, il serait éventuellement fait appel à l’aide des États-Unis conformément au traité de sécurité nippo-américain.
Pour la marine, le plan prévoit qu’elle dépensera 1 300 milliards de yens, soit 22,8 % du budget quinquennal et environ 2,8 fois plus que durant le 3e plan qui couvre la période 1967-1971. Ses effectifs qui à la fin de cette dernière année se monteront à un peu plus de 42 000 hommes seront progressivement accrus pour atteindre près de 50 000 h en 1976. Durant la même période, le tonnage de la flotte passera de 175 000 à 245 000 t. Le programme prévoit la construction de :
– deux petits croiseurs de 8 000 t porteurs chacun de 6 hélicoptères lourds anti-sous-marins du type Sikorsky SH-3 Sea King de l’US Navy ;
– un destroyer lance-missiles surface-air (Tartar) de 4 000 t ;
– quatorze « hovercrafts » de 200 t armés de missiles mer-mer ;
– neufs sous-marins de 1 800 t ;
– plusieurs escorteurs anti-sous-marins de 1 400 à 3 000 t.
L’aéronavale recevra de son côté :
– soixante bimoteurs Kawasaki P-2J ainsi que quinze hydravions type PS-1. Le P-2J est une version modernisée du Lockheed P-2 Neptune de l’US Navy équipée d’une partie des équipements électroniques installée sur l’Orion, le plus récent patrouilleur de la marine américaine. Le P-S1, de conception et réalisation japonaises, est un quadri-turbopropulseur de 40 t pouvant opérer par trois mètres de creux et doté d’un sonar à immersion variable ;
– soixante hélicoptères ASM dont quarante-cinq du type Sea King et quinze plus petits destinés à remplacer sur les escorteurs qui en sont dotés, les hélicoptères téléguidés arrivés en fin de carrière ;
– trois hydravions dérivés du PS-1 pour la recherche et le sauvetage en mer ;
– quatre avions mouilleurs de mines ;
– seize à dix-huit hélicoptères spécialisés dans le dragage des mines ;
– et un certain nombre d’aéronefs d’école et de servitude.
Lorsque ce 4e plan sera réalisé, c’est-à-dire vers 1976-1977, la flotte japonaise sera forte d’environ deux cents navires de combat et auxiliaires et d’à peu près autant d’aéronefs. Elle viendra alors immédiatement après la nôtre dans la hiérarchie des marines de guerre.
En République fédérale d’Allemagne (RFA) : commande de vedettes lance-missiles
L’accord gouvernemental portant sur la construction de vingt vedettes type S.148 équipées chacune de quatre missiles Exocet destinées à la Bundesmarine, a été signé le 23 octobre 1970 à Bonn par les ministres de la Défense français et allemand. Ces vedettes seront construites sous la responsabilité de la maîtrise d’œuvre de la Direction technique des constructions navales (DTCN). L’industrie allemande sera associée autant que possible à la réalisation de ce programme. On sait déjà que les dix premières seront construites à Cherbourg dans les chantiers des Constructions mécaniques de Normandie (CMN, ex-chantiers Amiot).
Ces petits bâtiments de 250 t seront propulsés par quatre diesels de 3 600 CV et non par deux de 7 200 CV comme nous l’avions indiqué par erreur dans notre précédente chronique. Cette commande représente la moitié du contrat de l’ordre de 1 200 M de francs signé le 23 octobre. ♦
(1) L’aviation embarquée de Fleet Air Arm est la seule dont dispose en propre la Royal Navy. L’aviation lourde ASM basée à terre relève de la RAF.
(2) Lequel a remplacé l’ex-« Coastal Command ».
(3) Soit approximativement 83 Md de francs.