Défense en France - Le président de la République reçoit l'Union nationale des officiers de réserves (Unor) et le Conseil supérieur de la fonction militaire (CSFM) - Deuxième session du CSFM - Le service national féminin
Le président de la République reçoit l’Union nationale des officiers de réserve (Unor) et le Conseil supérieur de la fonction militaire (CSFM)
À l’occasion de deux réceptions à l’Élysée, le président de la République a fait entendre la voix du chef des Armées à l’ensemble des officiers de réserve d’une part, à l’ensemble des officiers et sous-officiers d’active d’autre part.
Le vendredi 26 mars 1971, s’adressant à la délégation de l’Unor, Georges Pompidou, lui-même officier de réserve comme il s’est plu à le rappeler, a précisé le rôle qui doit être celui de l’officier de réserve. Si, dans le passé, la notion de mobilisation définissait sans ambiguïté à l’officier de réserve sa mission en temps de guerre, de nos jours l’évolution des formes prévisibles de conflit conduit à envisager une diversification du rôle des réservistes. Au cours de la période séparant la crise du conflit, il ne serait possible de mobiliser qu’un nombre réduit d’officiers appelés à participer à la première bataille. Mais tous les autres, que ce soit au sein de la Défense opérationnelle du territoire (DOT), ou, s’il faut envisager les dernières hypothèses, au sein de la résistance qu’ils seraient chargés d’organiser, auraient un rôle non moins essentiel pour le résultat final.
Enfin, en dehors de l’état de crise, et aux côtés de leurs camarades d’active, les officiers de réserve ont le rôle permanent et essentiel de maintenir, voire de ranimer, le patriotisme, véritable instinct de conservation indispensable à toute nation qui refuse de devenir la proie des autres sous une forme ou sous une autre. Dans ce domaine, a conclu le président Pompidou, je sais pouvoir compter sur votre concours.
À travers les membres du CSFM, réunis à Paris pour la 2e session du conseil et qu’il recevait le 20 avril 1971, le président de la République s’est adressé à tous les cadres des Armées.
Le chef de l’État a d’abord rappelé l’évolution, au cours du siècle écoulé, des circonstances qui ont profondément modifié la place des Armées dans la vie nationale : après la garde au Rhin, l’épopée coloniale et la victoire de la Grande Guerre, l’ébranlement de 1940, la libération, l’inéluctable décolonisation et l’apparition des superpuissances qui nous a conduit à choisir une défense autonome, sans pour autant nier la nécessité de certaines alliances.
Le Président a ensuite particulièrement insisté sur l’effort financier indispensable, et d’ailleurs proportionnellement modéré, que la collectivité nationale doit consentir pour doter les Armées de moyens suffisants pour assurer, par la qualité de leur armement et leur capacité de destruction, la dissuasion.
« L’exécution du troisième plan militaire, a-t-il ajouté, sera assurée quelles que soient les difficultés budgétaires. »
Évoquant enfin les vertus morales plus que jamais nécessaires de nos jours à l’exercice du métier des armes, le chef de l’État a invité tous les cadres militaires à affirmer sans réserve la dignité de la fonction militaire, faite de désintéressement et de sacrifice au service de la nation, qui doit leur valoir le respect et la reconnaissance de tous.
Pour conclure, le chef des Armées les a assurés de sa sollicitude, de son affection et de son estime.
Deuxième session du CSFM
Réuni à Paris les 20 et 21 avril 1971, le Conseil supérieur de la fonction militaire a tenu sa 2e session sous la présidence du ministre d’État chargé de la Défense nationale, Michel Debré. Le programme de travail comportait, avant l’examen des questions inscrites à l’ordre du jour, l’étude de deux importants sujets : le reclassement des militaires de carrière et l’avant-projet de loi portant statut général de la fonction militaire.
C’est le général Galzy, chef de la division Organisation de l’État-major des armées (EMA) qui a fait le point sur le reclassement des militaires de carrière. Ce problème, entièrement différent de celui des réductions d’effectifs, est permanent et inscrit dans les faits puisque 1 000 officiers, 10 000 sous-officiers et quelque 5 000 hommes du rang quittent volontairement le service chaque année. Une analyse des avantages et inconvénients de cette situation pour la nation, pour les Armées et pour les individus conduit à l’inéluctabilité d’une seconde carrière pour un certain nombre de militaires, si l’on veut ne pas dévaluer les grades et respecter leur pyramide et laisser par ailleurs toute liberté de décision aux individus. Les Armées ont donc le devoir d’apporter leur aide aux militaires volontaires pour cette reconversion.
Pour les officiers, en plus du développement des stages d’initiation aux affaires, vient d’être créée une « Association pour la reconversion des officiers » chargée notamment de suivre l’évolution de la situation de l’emploi et de conseiller les volontaires. Des stages de reconversion ont été également créés à l’intention des sous-officiers. En outre, ceux d’entre eux que leur spécialité n’oriente pas vers une profession civile analogue pourront bénéficier d’une formation professionnelle dispensée en fin de contrat. Enfin, les efforts seront poursuivis pour obtenir l’homologation des diplômes, brevets et certificats militaires, tandis que des contacts ont été pris pour établir des relations suivies avec les représentants du marché de l’emploi à tous les niveaux.
À l’issue de cet exposé, quelques précisions ont été données en réponse à diverses questions des membres du Conseil : le personnel féminin dit des « catégories » (c’est-à-dire assimilé aux sous-officiers) peut bénéficier des stages prévus pour les sous-officiers ; il n’est pas envisagé d’augmenter le nombre des emplois réservés au sein du ministère de la Défense nationale, non plus que de mettre les personnels féminins officiers en jouissance immédiate de leur pension de retraite s’ils partent avant 25 ans de service.
Le Secrétaire général pour l’administration (SGA), M. Marceau Long, devait ensuite exposer l’économie générale de l’avant-projet de loi portant statut de la fonction militaire. L’élaboration de ce texte, prévu par l’article 34 de la Constitution, comporte à la fois un travail de codification et un effort d’adaptation. Il s’agit d’abord de rassembler en un texte unique les différentes dispositions éparses dans des lois ou décrets remontant parfois jusqu’à 1832 et également de revoir ces dispositions selon qu’elles relèvent du domaine de la loi ou de celui du décret, pour les refondre en un tout cohérent. Ce travail de codification donne l’occasion de rajeunir un certain nombre de ces textes par élimination de dispositions archaïques et adaptation à notre temps de celles devenues désuètes. L’ensemble de la loi doit constituer un texte analogue au statut de la fonction publique définissant les garanties fondamentales qui sont la compensation des exigences propres à la condition militaire. La rédaction du projet sera dictée par le principe que les droits sont la règle générale et les restrictions l’exception. Dans l’état actuel des travaux, de nombreuses études, dont certaines doivent faire l’objet de consultations interministérielles, n’ont pas encore abouti, aussi le projet de loi sera-t-il à nouveau présenté au Conseil lors de sa troisième session.
Différents points particuliers ont été ensuite débattus : principe des bonifications d’annuités, libéralisation des autorisations de mariage et des libertés de réunion et d’association. Le principe d’un statut analogue à celui des sous-officiers de carrière pour le personnel féminin a été retenu.
Au cours de la dernière séance le ministre d’État a répondu aux diverses questions inscrites à l’ordre du jour et concernant des mesures particulières à diverses catégories de personnel et il a pris note de certaines autres, posées par les membres. Il a ensuite annoncé l’inscription au budget 1972 de différentes mesures catégorielles visant à améliorer les rémunérations. Avant de clore la session, M. Michel Debré a félicité les membres du Conseil pour le très bon déroulement des travaux et leur parfaite compréhension de leur rôle. La 3e session du Conseil aura lieu à l’automne 1971.
Le Service national féminin
La loi du 9 juillet 1970, relative au Service national, prévoit à son article 24 l’organisation, à titre expérimental, d’un Service national féminin dans des conditions fixées par décret. Les résultats de cet essai doivent être examinés par le Parlement dans le courant de l’année 1976 en vue d’élaborer une loi fixant l’organisation définitive de ce service volontaire.
L’expérience prévoit le recrutement, à partir du 1er janvier 1972, d’environ 600 jeunes filles dont 200 pour l’Armée de terre, autant pour le Service de Santé et une centaine pour chacune des Armées de mer et de l’air. Il leur sera proposé des emplois médicaux, scientifiques, administratifs, techniques ou sociaux ainsi que des fonctions d’interprète, d’hôtesse ou de conductrice. Les volontaires, de 18 à 27 ans, doivent être françaises, en possession de leurs droits civiques, de bonne moralité et libres sur le plan social, c’est-à-dire n’avoir ni mari ni enfant à charge. Après vérification de leur aptitude, les candidates doivent être incorporées dans le grade de « volontaire féminine » et suivre un stage de formation à l’issue duquel elles reçoivent une affectation tandis que celles titulaires des diplômes exigés sont nommées aux grades de « médecin-auxiliaire », « pharmacien-auxiliaire », « chirurgien-dentiste auxiliaire » ou « auxiliaire scientifique ». Après quatre mois de service, en fonction de leur qualification et de leur manière de servir, celles qui ne sont pas « auxiliaires » peuvent être nommées au grade de « volontaire féminine spécialiste ». Pendant leurs douze mois de service, les volontaires féminines sont rémunérées dans des conditions tenant compte de leur emploi et sont soumises à la discipline en vigueur pour le personnel militaire féminin. À l’issue de leur service, elles bénéficient du droit de vote, quel que soit leur âge, et des avantages attachés à l’exécution du service national pour l’accès aux emplois publics. Enfin, il peut être mis fin au service volontaire soit sur demande de l’intéressée pour motif grave (mariage, maternité, événement familial) soit d’office pour faute grave ou inaptitude.
Cette expérience devrait permettre une meilleure efficacité de certaines unités en libérant de tâches administratives ou techniques des jeunes recrues rendues ainsi disponibles pour mieux se consacrer à leur métier de combattant. ♦