Maritime - Marine française : les corvettes C70 - La marine chilienne - Otan : l'exercice Dawn Patrol 1972
Marine française : les corvettes C.70
Le ministre d’État chargé de la Défense Nationale, Michel Debré, a récemment décidé que la première des trois corvettes du type C.70 inscrite à la 3e loi d’équipement militaire porterait le nom de Georges Leygues en souvenir du très grand ministre qui fut le rénovateur de notre Marine entre les deux guerres. Ce choix, apprécié des marins, est significatif de la volonté du gouvernement de redonner à la Marine la place éminente qui lui revient dans la défense du pays, place qui a été concrétisée par l’adoption du statut naval que nous avons évoqué dans notre précédente chronique. Le Georges Leygues sera la première en effet d’une lignée de corvettes qui, d’après le statut, devrait au moins comprendre 24 unités à l’horizon 1985. Ces corvettes dont les caractéristiques suivront évidemment l’évolution technique qui ne manquera pas d’intervenir d’ici là, seront en principe réparties en deux grandes catégories, l’une à vocation prioritaire anti-sous-marine et l’autre à vocation essentiellement antiaérienne. Elles auraient cependant en commun le même armement antisurface et pour des raisons de rentabilité et de coût la même coque et le même appareil propulsif.
Le Georges Leygues et ses deux sisterships appartiennent à la première de ces deux catégories. Leurs caractéristiques seront les suivantes :
Coque :
– Déplacement : 3 950 tonnes en pleine charge ;
– Longueur : 133,5 m (hors tout), 124 m (entre pp : entre perpendiculaires avant et arrière) ;
– Largeur : 13,8 m.
Appareil propulsif :
– 2 turbines à gaz et 2 diesels agissant sur deux hélices à pales orientables et réversibles.
Vitesse :
– 30 nœuds sur les TG ;
– 19,5 nœuds sur les Diesels.
Puissance électrique :
– 36 000 kW (440 CV - 60 Hz).
Le choix d’une solution mixte pour la propulsion de ces bâtiments, diesels pour les vitesses de croisière et TG pour les vitesses supérieures, résulte d’un compromis dans lequel l’État-major de la Marine a fait entrer en ligne de compte :
– les avantages et inconvénients techniques des deux types de propulsion ;
– l’enveloppe financière du programme ;
– l’absence, pour le moment, sur le marché national de turbines à gaz de type aéronautique navalisées d’une technique suffisamment évoluée.
Équipage : 250 hommes dont 21 officiers.
Armement :
– artillerie : 2 tourelles de 100 CA automatiques avec conduite de tir Vega.
– Missiles : 4 MM38 Exocet.
– ASM : 2 hélicoptères WG.13 Lynx porteurs d’armes et d’équipement de relocalisation et de classification d’un contact avec un stock de torpilles offensives du type L6. Ces hélicoptères auront aussi une capacité antisurface ;
– 10 torpilles défensives L5.
Équipement de détection et de guerre électronique :
– un radar de veille-air éloignée ;
– un radar de désignation d’objectif, tous deux du type le plus récent ;
– un sonar d’étrave DUBV.23 et un sonar remorqué DUBV.43, tous deux à basse fréquence, permettant d’assurer dans les conditions normales de propagation des ondes sonores, une portée moyenne de détection de l’ordre de 10 000 m ;
– une gamme d’appareils divers de contre-mesures.
Tous ces divers senseurs seront associés au Système d’exploitation navale des informations tactiques (Senit).
La marine chilienne
Dans de précédentes chroniques nous avons fait le point de la situation des marines argentine et brésilienne [NDLR 2021 : novembre 1971]. Nous complétons cet aperçu par une courte synthèse sur la marine chilienne.
Le territoire du Chili qui s’appuie sur la Cordillère des Andes s’étend sur une longueur de 4 000 km jusqu’au cap Horn et sur une largeur de 150 à 200 km seulement. La côte, presque rectiligne dans sa partie septentrionale, est au contraire coupée de golfes et de « rias » (baies profondes rappelant les fjords) et semée d’innombrables îles dans sa partie méridionale. Cette configuration particulière du Chili fait que l’immense majorité de son commerce extérieur s’effectue par voie de mer ; il en est de même pour le trafic intérieur qui se fait au cabotage de port en port.
Cette configuration n’est certainement pas étrangère à la réputation qu’ont les Chiliens d’être d’excellents marins. La protection des côtes et du trafic maritime est en tout cas, pour le Chili plus encore que pour n’importe quel autre pays de l’Amérique latine, d’une importance primordiale. Cela justifie la place prééminente de la marine au sein des forces armées chiliennes.
Celles-ci sont dirigées et administrées par le ministre de la Défense auquel le Président qui est, aux termes de la Constitution, le chef supérieur des armées, délègue ses pouvoirs
Le ministre de la Défense a sous son autorité les commandants en chef des trois armées ; il est assisté dans sa tâche par :
– l’État-major de la défense nationale qui est un organisme interarmées charge de la planification stratégique, de la coordination des études et des plans opérationnels des trois armées ;
– les sous-secrétaires d’État à la Guerre, à la Marine et à l’Aviation qui sont ses conseillers techniques, sans aucune autorité organique ni administrative ;
– le Conseil supérieur de la défense nationale.
Le ministre a pour fonctions :
– de diriger et d’administrer les forces armées ;
– d’élaborer les plans généraux de défense ;
– de surveiller la circulation aérienne au-dessus du territoire national.
La marine a pour missions :
– la protection des lignes de communications essentiellement dans les eaux territoriales qui s’étendent jusqu’à 200 nautiques des côtes ;
– la surveillance de la navigation le long des côtes ;
– la défense du littoral contre toute attaque venant de la mer ;
– la participation au développement économique et social du pays au même titre que les autres armées.
De plus, elle est responsable de l’hydrographie, de l’océanographie, des phares et balises et du ravitaillement des bases chiliennes de l’Antarctique.
La marine est dirigée par le commandant en chef assisté de l’État-major général de la marine qui est situé à Santiago. Il exerce son commandement par l’intermédiaire :
– du commandant de l’Escadre ;
– des commandants de zones navales ;
– du chef de l’aviation navale ;
– du commandant général de l’infanterie de marine.
L’organisation régionale découpe le littoral en trois zones navales, dirigées chacune par un contre-amiral :
– Première zone navale : Siège à Valparaiso. Elle s’étend de la frontière péruvienne au parallèle 34° 10’ Sud ;
– Deuxième zone navale : Siège à Talcahuano. Elle va du parallèle 34° 10’ Sud au parallèle 47° 00’ Sud ;
– Troisième zone : Siège à Punta Arenas. Elle s’étend du parallèle 47° 00’ Sud au pôle Sud.
En plus de ses fonctions militaires, le CEC de la marine contrôle la marine marchande par l’intermédiaire de la Direction du littoral et de la marine marchande dirigée par un officier général de la marine.
Talcahuano est la base principale de la Flotte. Située au fond de la baie de Concepcion, sûre et bien abritée, elle possède le seul véritable arsenal de la marine disposant de moyens de radoub et de réparation.
Il y a à Valparaiso une base secondaire avec seulement quelques petits ateliers de réparation. Outre le commandement de la Première zone navale, la base abrite les principales écoles de la marine : navale, artillerie, mécaniciens, etc.
Punta Arenas est surtout un point d’appui. Il existe également des facilités à Puerto Montt et à Puerto Williams ; ce dernier est situé à l’extrême Sud du pays dans le canal de Beagle, presque en face de la base argentine d’Ushaia.
La flotte chilienne se compose essentiellement de :
– un croiseur l’Almirante Latorre qui n’est autre que l’ex-suédois Gota Lejon récemment acquis ;
– 2 croiseurs de 10 000 t anciens du type américain Brooklyn ;
– 4 destroyers dont deux assez récents ;
– 4 escorteurs ;
– 2 sous-marins ex-américains ;
– 7 patrouilleurs ;
– 7 bâtiments amphibies plus une vingtaine de petits engins de débarquement ;
– 4 vedettes de construction espagnole ;
– le tout soutenu par une flotte logistique et auxiliaire relativement importante.
L’ensemble représente quelque 83 000 t dont 56 000 de combat.
L’aéronautique navale a été créée en 1923. Fusionnée en 1930 avec l’armée de l’air, elle recouvre son indépendance en 1953, mais son développement a été freiné par l’armée de l’air qui assume les missions de lutte anti-sous-marine et de surveillance maritime. Aussi l’aviation navale chilienne limite-t-elle pour l’instant ses activités à celles de formation et d’entraînement du personnel ainsi qu’au transport et aux liaisons.
N’étant pas équipé pour construire des bâtiments importants, le Chili doit avoir recours à l’étranger pour renouveler son matériel. Un plan élaboré en 1970 prévoit la construction d’ici 1976 de :
– un conducteur de flottille lance-missiles ;
– 4 frégates ;
– 3 sous-marins ;
– un pétrolier ravitailleur d’escadre.
Deux des frégates et deux de ces sous-marins sont en construction en Grande-Bretagne. Ce même plan prévoit la refonte des deux destroyers les plus récents, l’Almirante Williams et l’Almirante Riveros. Tous les navires de surface, neufs ou refondus, seront équipés de missiles surface-surface (Exocet sur les frégates en construction).
Le personnel de la marine chilienne se monte à environ 22 000 hommes y compris l’infanterie de marine, les appelés (un millier d’hommes), le personnel des arsenaux et les apprentis. Tout ce personnel est de grande valeur notamment le corps des officiers. L’avancement de ces derniers a lieu à l’ancienneté mais sous certaines conditions : service à la mer, temps de commandement, etc. À noter également qu’on ne peut prétendre au grade de capitaine de corvette qu’après avoir soutenu une thèse. L’École de Guerre navale forme les officiers supérieurs.
L’infanterie de marine, forte de 2 000 h environ, est réputée pour son bel aspect et sa discipline ; elle est entraînée aux opérations de commando et aux opérations amphibies mais arme également quelques formations de batteries de côte et de DCA. Elle est articulée en 4 régiments : Lynch, Aldea, Miller et Cochrane.
Otan : l’exercice Dawn Patrol 1972
L’exercice Dawn Patrol qui a lieu chaque année en Méditerranée est l’un des plus importants auquel prennent part les marines de l’Otan. La Marine française y participe chaque année paire.
Cette année, l’exercice s’est déroulé du 2 au 14 mai en divers points de la Méditerranée occidentale, centrale et orientale. Il a comporté des exercices de défense aérienne et ASM et s’est achevé par un débarquement amphibie sur les côtes du Péloponnèse sous menace aérienne et sous-marine.
Les unités suivantes de notre flotte y ont pris part :
– le porte-hélicoptères Arromanches ;
– les escorteurs d’escadre Cassard et d’Estrées ;
– les escorteurs rapides Le Béarnais, L’Alsacien et Le Vendéen ;
– le pétrolier La Saône ;
– les sous-marins Doris et Junon.
La participation étrangère était la suivante :
États-Unis : Les porte-avions Roosevelt et J.F. Kennedy, 2 croiseurs lance-missiles, 11 destroyers ou escorteurs, 3 bâtiments amphibies, 4 navires de soutien logistique.
Grande-Bretagne : Le croiseur porte-hélicoptères Blake, la frégate lance-missiles Norfolk, 2 sous-marins dont le Sous-marin nucléaire d’attaque (SNA) Conqueror, 2 bâtiments d’assaut, 3 navires logistiques.
Italie : 1 croiseur et 1 destroyer lance-missiles, 5 escorteurs, 3 sous-marins, 1 navire auxiliaire.
Grèce : 2 destroyers, 4 dragueurs, 1 mouilleur de mines, 1 sous-marin, 4 navires amphibies et 3 vedettes rapides.
La Stanavforlant forte d’un destroyer lance-missiles et de 5 frégates a également pris part à Dawn Patrol 1972. ♦