France : budget de la Marine pour 1974

Le budget de la Marine pour l’exercice 1974 prévoit 6 431,51 millions de francs de crédits de paiement (CP) pour l’ensemble des titres III (Fonctionnement) et V (Dépenses en capital) contre 6 096,26 MF en 1973 et 5 543,60 MF en 1972.

Le titre V est doté de 4 405,65 MF d’autorisations de programme (AP) soit 230,45 MF de plus qu’en 1973.

Le tableau ci-dessous permet d’apprécier la situation de ce budget par rapport à celui de la Défense nationale :

En 1974, les ressources de la Marine – c’est-à-dire les CP – se monteront donc à 16,8 % du budget de la défense contre 17,5 % environ en 1973, 17,8 % en 1972 et 18,1 % en 1971. Ce pourcentage est à comparer avec celui que d’autres pays consacrent à leur marine : États-Unis 32 % ; Grande-Bretagne 30 % ; URSS 25 % ⁽¹⁾ ; Pays-Bas 22 % ; Espagne 20,4 % ; Italie 15 % environ ; République fédérale d’Allemagne (RFA) 10 %.

La présentation du titre III a été profondément modifiée dans le budget 1974 par regroupement des crédits en un nombre plus réduit de chapitres, ceux-ci passant de 21 à 12. Par grandes masses, la répartition des crédits de paiement du titre III se présente comme suit comparée à celle de l’exercice précédent.

Les crédits du personnel permettront d’entretenir 68 330 militaires plus 1 450 élèves des écoles préparatoires. Ces 68 330 militaires comprendront des personnels de carrière : 41 857 et des appelés : 16 473.

Sur ce total, la répartition par catégories sera la suivante :

– officiers : 4 323 ⁽²⁾ dont 48 officiers généraux et 17 officiers du personnel féminin :
– officiers mariniers de carrière : 24 957 (corps des équipages, agents militaires, gendarmes maritimes, officiers mariniers, marins-pompiers) ;
– quartiers-maîtres et marins : 37 707 dont 16 130 engagés ADL (après durée légale du service militaire), 5 956 engagés de moins de 12 mois et 15 621 du contingent.

Sous réserve de mesures marginales telles que le passage à la Section commune des élèves du Service de Santé de Bordeaux, les effectifs budgétaires par rapport à ceux de l’an dernier sont sensiblement les mêmes. L’augmentation des CP relatifs au personnel est due essentiellement à l’augmentation des soldes et rémunérations des personnels de l’État, au relèvement des charges militaires, à des mesures telles que l’augmentation de la majoration d’embarquement, à la réforme du régime des primes d’engagement, etc. Le budget traduit la poursuite de la transformation de la pyramide des grades d’officiers mariniers. Cette transformation de la pyramide des grades d’officiers mariniers dans la Marine permettant de la rapprocher de celle des autres armées avec finalement quatre grades d’officiers mariniers : maîtres principaux, premiers maîtres, maîtres (ex-SM 1), seconds maîtres (ex-SM 2).

Si nous examinons les dépenses en capital (Titre V), nous voyons qu’elles se monteront en 1974 à :

– 3 399 MF de CP contre 3 389,90 MF en 1973, soit une augmentation apparente de seulement 9,1 MF par rapport au budget 1974, mais en fait de 65 MF (+ 2 % par rapport à la réalité après l’annulation des crédits qui a suivi l’allégement de la TVA). Elle est due à la réduction décidée de la trésorerie du compte de commerce de la DTCN (Direction technique des constructions navales) dont la situation était excédentaire ⁽³⁾ ;
– 4 405,65 MF d’AP contre 4 175,20 MF en 1973, soit 347 MF de plus que n’en prévoyait la 3^e loi de programme pour 1974.

Les CP et AP seront répartis comme suit :

Les 512,10 MF d’AP prévus pour les études R&D se répartiront comme suit :

– Opérations réalisées par la DTCN (Direction technique des constructions navales) : 331,00 => Études générales concernant les constructions navales, les armes navales, la défense radiologique, la détection, les télécommunications, l’informatique, les prototypes, etc.

– Opérations réalisées par la DTCA (Direction technique des constructions aéronautiques) : 163,80 => Aéronefs, armement, équipements.

– Opérations réalisées par la DTEN (Direction technique des engins) : 17,30 => Armes nouvelles, missiles, système d’arme MM38, etc.

Les 767,30 MF d’AP prévus pour l’aéronautique navale portent pour l’ensemble sur le début de fabrication de l’appareil d’assaut Super-Étendard avec moteur Atar 8K50 qui, à raison d’une centaine d’appareils, doit remplacer les avions d’assaut Étendard actuellement en service. Les deux premiers prototypes de ce nouvel appareil doivent selon les prévisions être essayés sur porte-avions fin 1975. Autre élément important de ce chapitre : celui des rechanges aéro dont les AP se montent à 183,70 MF.

Dans le domaine des constructions neuves, la Force océanique stratégique (Fost) recevra 928,00 MF. Les essais du 3^e SNLE Le Foudroyant (lancé le 4 décembre 1971) se poursuivent favorablement et l’on peut penser que ce bâtiment sera opérationnel en juillet 1974. La construction de L’Indomptable dont le lancement doit intervenir en avril 1974, suit son cours normal, tandis que les premiers éléments du 5^e SNLE, Le Tonnant, ont été déjà commandés ou vont l’être courant 1974. L’entretien opérationnel des deux SNLE de service : Le Redoutable et Le Terrible, absorbera 287 MF.

Les AP pour les autres constructions neuves soit 1 198,10 MF permettront de poursuivre ou de lancer les opérations suivantes :

– Frégate anti-sous-marine (ASM) Tourville (en essais) Duguay Trouin (lancée le 1^er avril 1973) et De Grasse : 172,10 MF
– Avisos n^os 1 à 11 : 174,80 MF
– Avisos n^os 12 à 14 : 123,50 MF
– Sous-marins type Agosta (Agosta, Beveziers, Ouessant, La Praya) : 120,40 MF
– Corvettes C70 (Georges Leygues, Dupleix, Montcalm) : 443,70 MF
– Patrouilleurs rapides type Glaive : 16,10 MF
– Pétrolier ravitailleur La Durance : 10,60 MF
– Bâtiments anti-mines : 65,20 MF
– Bâtiment atelier Jules Verne : 2 230 MF

Une AP de 24,40 MF est d’autre part prévue pour les rechanges de grande prévoyance et comme il avait été annoncé 15 MF seront consacrés à l’étude du premier Sous-marin nucléaire d’attaque (SNA) de notre Marine, sous-marin qui sera mis sur cale au début de 1976. Ce bâtiment aura un déplacement de l’ordre de 3 000 tonnes.

Les AP pour les grosses refontes et modernisations se monteront à 140,70 MF et intéresseront :

– la poursuite de la modernisation des sous-marins type Daphné (armement et équipement de détection),
– la mise à jour électronique des bâtiments : 94,20 MF.

À noter qu’il est prévu d’installer le système MM38 Exocet à bord du croiseur-école Jeanne d’Arc (sur la plage AV) et la corvette C65 Aconit ainsi que sur d’autres bâtiments en service afin de leur donner une redoutable capacité antisurface.

Le chapitre relatif aux munitions prévoit enfin 464,40 MF d’autorisations de programme contre 422,10 en 1973.

Commandement de l’aviation de patrouille maritime (Alpatmar)

Dans notre précédente chronique nous avons, à l’occasion de la réorganisation du commandement en 2^e région maritime, fait allusion à l’Alpatmar. Ce nouveau commandement créé le 1^er octobre 1973 regroupe sous l’autorité d’un officier général dont le QG est à Dugny près du Bourget, les cinq flottilles de patrouille maritime de l’aéronautique navale qui cependant restent réparties en deux groupements Aéro II sur l’Atlantique et Aéro III en Méditerranée. Les missions de l’aviation de patrouille maritime sont de deux sortes. Sur le plan purement militaire, elle participe pour une large part à la recherche, au pistage et à la destruction des sous-marins ainsi que les navires de surface ennemis. Elle assure également un rôle d’éclairage pour la force navale et de guidage pour les avions d’attaque. L’aviation de patrouille maritime exécute également des tâches de service public : missions SAR (recherche et sauvetage) pour les avions, les navires de commerce, de pêche, de plaisance en détresse.

L’aviation de patrouille maritime est forte d’une soixantaine d’appareils répartis entre les bases de Nîmes-Garons (flottilles 21F et 22F) et de Lann-Bihoué près de Lorient (flottilles 23F, 24F et 25F). Le matériel comprend des Breguet 1150 Atlantic et des P-2V7 Neptune américains. Leurs principales caractéristiques sont rappelées ci-dessous :

Allemagne fédérale : lancement de la première vedette lance-missile type 143

On sait que le programme de renouvellement de la Bundesmarine prévoit notamment la construction de 20 vedettes lance-missiles type 148 construites en France aux Constructions mécaniques de Normandie (CMN) de Cherbourg et chez Lürssen à Vegesak ⁽⁴⁾ en Allemagne avec, pour maître d’œuvre, notre DTCN et de 10 vedettes lance-missiles type 143 commandées aux chantiers Lürssen.

Plusieurs vedettes du type 148 sont déjà en service et le programme suit son cours normalement. Le prototype des types 143 a été mis à l’eau le 22 octobre 1973. Les caractéristiques de ces petits bâtiments sont rappelées ci-dessous :

Les torpilles des S143 du type Seal sont des engins filoguidés dont la portée maximale est de 20 000 m.

(1) Y compris la part de la marine dans le budget de la recherche et développement et dans celui dit des « arrières » (logistique). Le budget de défense de l’URSS qui représenterait 10 % du PNB du pays selon les estimations les plus sérieuses, serait en gros réparti comme suit : Recherche 30 %, Terre 20 %, Marine 10 %, PVO (défense antiaérienne) 10 %, Air 10 %, Fusées stratégiques 10 %, Arrières 10 %.
(2) Non compris les ingénieurs de l’armement (ex-ingénieurs hydrographes inclus), les Ingénieurs des études et techniques de l’armement (IETA), les médecins et pharmaciens qui relèvent de la Section commune.
(3) Cela obligera à augmenter beaucoup plus les CP dans le budget 1975 puisque la trésorerie de la DTCN aura été en 1974 absorbée.
(4) Près de Brème.

Jean Labayle

L’abondance des matières nous a contraints à reporter au mois de janvier prochain notre chronique d’outre-mer. Nous prions nos lecteurs de bien vouloir nous en excuser.