Aéronautique - L'inauguration de l'aéroport Charles-de-Gaulle - Études sur les effets des supersoniques dans la stratosphère - L'allongement du Lockheed C-141
L’inauguration de l’aéroport Charles-de-Gaulle
Vendredi 8 mars 1974, en présence d’un grand nombre de hautes personnalités civiles et militaires, le Premier ministre, M. Pierre Messmer, a inauguré le nouvel aéroport international « Charles-de-Gaulle » installé à Roissy-en-France, à 25 km au nord-est de Paris. À cette occasion, un certain nombre d’appareils de transport, dont ceux des trois programmes civils majeurs : Concorde, Airbus et Mercure, ont été exposés sur les parkings des « satellites » de l’aérogare centrale. Le 13 mars, soit cinq jours plus tard, l’aéroport entrait en fonction et le premier appareil de transport s’y posait en exploitation régulière.
Cette grande réalisation française a été exécutée en respectant les délais fixés à l’origine du projet et dans un temps relativement court puisque le premier coup de pioche était donné au milieu de l’année 1966.
Cet aéroport est certainement le dernier à pouvoir être construit aussi près d’une grande capitale ; aussi, les possibilités de développement ultérieures ont-elles été soigneusement étudiées et prévues dès le stade du projet afin de préserver son avenir.
L’aérogare n° 1 qui vient d’être mise en service a été conçue pour pouvoir accueillir 10 millions de passagers par an. Elle devrait être suivie de l’aérogare n° 2, composée d’un chapelet de 8 bâtiments qui devraient accueillir à leur tour 10 autres millions de passagers en 1978 et 30 à 40 M de passagers par an vers les années 1983-1985. À cette date, quatre pistes seront en service. L’aéroport de Paris s’est réservé un territoire à l’est de l’aérogare n° 1 pour pouvoir construire une troisième aérogare capable de traiter 30 M de passagers par an dans les années 1985-1990, qui porterait ainsi la capacité totale de l’aéroport Charles-de-Gaulle à 70-80 M de passagers par an, soit 7 à 8 fois sa capacité maximum actuelle.
Pour comprendre l’impact créé par la présence de ce nouvel aéroport, il est bon de rappeler qu’il fournira 16 000 emplois à la fin de cette année et que le chiffre estimé pour l’année 1985 est de l’ordre de 70 000.
Un atout essentiel, en plus de la proximité de Paris, vient du fait qu’il est situé dans une zone géographique d’habitation de densité beaucoup plus faible que ne l’est actuellement Orly et qu’il ne devrait pas subir de limitations d’utilisation analogues à celles d’Orly qui, rappelons-le, ne peut recevoir ou laisser partir d’avions à réaction entre 23 heures et 6 heures du matin pour des raisons de bruit. À Roissy, la zone de bruit intense doit toucher 1 700 personnes au lieu de 70 000 à Orly et la zone de bruit fort, 15 000 personnes au lieu de 105 000.
L’utilisation de cet aéroport n’est pas spécialisée puisqu’il reliera les grandes métropoles régionales et l’étranger au même titre qu’Orly, avec malgré tout une certaine vocation intercontinentale.
Le Bourget, son petit voisin, le vieil aéroport de Paris, qui vit entre autres décoller en 1927 Nungesser et Coli en direction de l’Amérique et atterrir Lindbergh aux commandes du célèbre Spirit of Saint-Louis, Le Bourget devrait donc fermer ses portes en 1978 lorsque l’aérogare n° 2 ouvrira les siennes. Avec sa fermeture, ce sera une page de l’histoire de l’aviation qui sera tournée.
Un des problèmes majeurs restant à résoudre pour le moment est lié aux difficultés présentement rencontrées dans l’agglomération parisienne, pour la desserte des agglomérations et les communications en général.
L’accès actuel se fait en voiture par l’autoroute du Nord. Celle-ci est souvent saturée. L’antenne de Bagnolet devrait être ouverte vers la fin 1974 et ce n’est qu’au-delà de 1980 que le réseau autoroutier verra son achèvement dans le secteur Est de Paris.
Une gare de chemin de fer financée par le District de la région parisienne devrait être ouverte en 1976 à Roissy. Elle reliera directement l’aéroport à la gare du Nord. Le trajet sera d’une vingtaine de minutes.
Quoi qu’il en soit, la liaison entre Orly et « Charles-de-Gaulle » ne sera pas résolue de sitôt. Elle exige actuellement deux heures pour un transit, ce qui est exagérément long surtout si ce temps est comparé à la durée des voyages aériens qui diminue avec l’augmentation de la vitesse des avions.
La compagnie nationale Air France doit déplacer ses activités d’Orly vers Roissy en deux phases. Jusqu’en novembre, son activité sera limitée au départ de « Charles-de-Gaulle » ; après le 1er novembre. 80 % de long-courriers et 60 % de moyen-courriers partiront de ce nouvel aéroport. Air Inter le fréquentera au même titre qu’un autre aéroport et l’UTA et Air Afrique ne procéderont plus que par lui au départ et à l’arrivée.
L’investissement consenti s’élève à 1 630 M de francs pour la première tranche. Il a été payé par l’aéroport de Paris avec une aide limitée de l’État. Le coût est équivalent à celui d’aéroports similaires étrangers : aéroport de Dallas, Fort Worth. Les dépenses se répartissent également entre l’infrastructure (pistes, ponts…), les équipements spécialisés (passerelles, tri automatique des bagages, centrales, aides à la navigation…) et l’aérogare elle-même. Cet aéroport, avec la volonté de dépouillement qui s’en dégage, est un compromis entre l’économie maximale et la qualité du service rendu.
Mentionnons enfin que plusieurs sociétés françaises ont largement contribué à son équipement. Parmi les plus caractéristiques, citons les réalisations de Bertin et Cie (procédé Turboclair pour la dissipation du brouillard), d’Elecma, Division électronique de la Snecma (système assurant automatiquement la concentration, le traitement, la diffusion, la visualisation et l’archivage des données météorologiques), de LMT (central électronique le plus important d’Europe dans sa catégorie), de Thomson-CSF et de ses filiales (deux systèmes d’atterrissage automatique catégorie 3, radar d’approche avec visualisation des informations, réseau de télévision en circuit fermé, sonorisation de l’aérogare, systèmes d’affichage), de Zenith Aviation (ravitaillement en carburant des aéronefs).
Études sur les effets des supersoniques dans la stratosphère
Les simulations numériques de la circulation générale atmosphérique, très complexes, ne permettent pas encore de se prononcer sur les perturbations que pourraient provoquer les transports supersoniques volant à haute altitude, car elles restent faussées par la difficulté d’incorporer les différents facteurs physiques qui déterminent le climat.
Cependant, bien que très incomplètes, les études effectuées à ce jour ont déjà réduit le champ des spéculations hâtives, sans véritable fondement scientifique, sur les dangers que pourrait présenter pour le climat une flotte d’avions supersoniques.
L’étude des modèles mathématiques de la stratosphère s’inscrit dans le cadre du programme d’études et d’essais sur l’environnement des avions stratosphériques défini par l’Aérospatiale, en association avec British Aircraft Corporation (BAC), et qui a conduit par exemple à la campagne des vols de mesures de juin et juillet 1973 par Concorde 001.
Les vols ont apporté des indications précieuses, mais des modèles de simulation sont nécessaires pour déterminer les effets que serait susceptible d’avoir dans l’avenir une importante flotte d’avions supersoniques.
Les travaux se heurtent aux mêmes problèmes qui se posent aux météorologistes pour prévoir le temps. L’absence ou la mauvaise interprétation de certaines informations peuvent faire varier considérablement les prévisions. Les mécanismes des phénomènes qui se produisent dans l’atmosphère et les nombreux facteurs qui les influencent sont d’une telle complexité que les laboratoires les mieux équipés ne sont pas encore parvenus à approcher suffisamment la réalité pour donner des estimations valables.
Les observations de l’atmosphère ou les vols d’environnement effectués par Concorde aident à mieux connaître la structure de la stratosphère, mais ces observations ne peuvent pas montrer ce qui se passera dans 10 ou 20 ans quand la stratosphère sera sillonnée par des centaines d’avions subsoniques et supersoniques. Seuls des calculs et des expériences de simulation numérique, à l’aide des « programmes » qui synthétisent d’une façon réaliste tous les processus physiques de l’atmosphère, pourraient éventuellement répondre à cette question. La conception de ces « programmes », appelés communément modèles mathématiques, nécessite, outre des ordinateurs à très grande vitesse de calcul, une connaissance profonde des phénomènes atmosphériques et des mécanismes qui gouvernent la génération et l’évolution du système atmosphère-océan.
Sous l’impulsion du ministère des Transports des États-Unis et dans le cadre du « Programme d’estimation de l’effet climatique », les programmes de recherches du Centre de recherches atmosphériques (Université de Boulder, Los Angeles), du Département de météorologie (Université de Californie, Los Angeles), du Laboratoire géophysique de la dynamique des fluides (Université de Princeton) et du Laboratoire Lawrence Livermore (Université de Californie, Livermore) sont très voisins, en raison de la similitude de leurs modèles.
Des améliorations substantielles sont continuellement apportées aux composantes physiques de ces modèles : des extensions vers la haute atmosphère sont en cours d’étude moyennant un traitement du rayonnement plus élaboré ; l’incorporation de l’équation de continuité de l’ozone est aussi à l’étude. Un grand effort de recherche est également entrepris par ces laboratoires pour tenir compte des effets des océans sur le climat et la circulation atmosphérique.
L’une des contraintes qui freine le développement de ces modèles est la vitesse relativement lente des ordinateurs en regard des masses de calculs de ces programmes. On aura une idée de la complexité de ces calculs si l’on sait qu’il faut faire intervenir la latitude, la longitude, l’altitude, la pression, l’humidité, la température, les composants de la quantité des mouvements, la densité et le taux de réchauffement, l’évaporation, le transfert d’énergie causé par le rayonnement solaire et terrestre, la convection, la turbulence à petite échelle, etc. On doit tenir compte également des régions océaniques, des continents, des zones neigeuses ou glacières et de l’effet dynamique des montagnes. En outre, l’étude des effets des injections des vols stratosphériques sur le climat exige l’incorporation des composants chimiques avec leurs variations et leur interaction.
Les expériences conduites jusqu’à présent ont tout de même permis d’apprécier certains aspects du problème et de réduire le champ des spéculations.
Selon le Centre de recherches atmosphériques, l’effet sur le climat de la production de la vapeur d’eau et du gaz carbonique par les transports supersoniques semble devoir être négligeable. Par contre, l’étude des réactions chimiques entre la vapeur d’eau produite par les avions et la couche d’ozone exigera encore un grand effort de réflexion et de recherches. Le problème de l’oxyde d’azote trouvera probablement une réponse dans moins d’un an. L’influence des particules sur les radiations est généralement sous-estimée ; il n’est pas exclu que dans les prochains mois ce problème prenne le pas sur celui de la vapeur d’eau et de l’oxyde d’azote.
Ces travaux, qui sont parmi les plus avancés au monde dans ce domaine, montrent en tout cas la complexité de telles études et par conséquent la fragilité des premières estimations et la réserve avec laquelle il y a lieu d’accueillir certaines affirmations tendant à bannir les transports supersoniques.
L’allongement du Lockheed C-141
Le C-141 Starlifter, appareil de transport lourd de l’US Air Force, en service dans le Military Airlift Command (MAC), qui en possède 276 exemplaires, est l’objet d’études par la firme Lockheed, visant à améliorer les capacités d’emport par allongement du fuselage.
L’opération est de taille puisqu’un premier élément cylindrique de fuselage de 4 mètres de long serait ajouté en avant de l’aile, un second de 3 m immédiatement derrière. L’appareil aurait ainsi une longueur qui passerait de 44 m à 51 m.
Cet allongement, intéressant exclusivement la soute, permettra à l’avion de recevoir treize palettes de chargement standard au lieu de dix.
Lockheed envisage de remplacer les carénages de raccordement aile-fuselage par d’autres carénages modifiés améliorant la traînée de 8 % et d’adjoindre un système de ravitaillement en vol pour autoriser le transport de la charge payante maximale de 32 t sur des distances plus longues que les 3 500 milles nautiques actuels.
Une fois modifié, cet appareil aurait une capacité de transport accrue d’environ un tiers. Lockheed n’a pas encore divulgué le prix de ces modifications. ♦