Défense en France - L'informatique de commandement aux armées : le projet Sysic - Perspectives d'avenir de l'informatique dans l'Armée de terre - Le décret relatif aux positions statutaires des militaires de carrière
L’Informatique de commandement aux armées : le projet Sysic
Les attributions du Chef d’état-major des armées (Céma) en temps de crise ou de conflit ont été codifiées par le décret n° 71-992 en date du 10 décembre 1971. Ce texte précise qu’en de telles circonstances, le Céma peut être nommé Chef d’état-major général des armées et que dès lors il assure le commandement de l’ensemble des opérations militaires et devient le Conseiller militaire du Gouvernement. À ce haut niveau de responsabilités, deux difficultés sont à surmonter : le traitement d’un flux considérable d’informations et la brièveté des délais souhaités pour acquérir une vision synthétique de la situation et pour prendre les décisions qu’elle implique.
Les études entreprises par l’État-major des armées (EMA) ont montré que l’informatique était susceptible d’apporter une solution heureuse à ces problèmes. C’est ainsi que fut prise, le 31 janvier 1973, la décision de réaliser le Sysic, Système d’information et de commandement qui doit être installé dans le nouveau centre opérationnel des Armées, au profit du général Céma et de son état-major opérationnel.
Le Sysic vise à améliorer l’efficacité de cet état-major opérationnel en libérant les hommes de nombreuses tâches de routine qui dans un système classique occupent 60 % de leur temps, pour leur permettre de se consacrer pleinement aux tâches majeures (évaluation des situations, préparation des décisions, élaboration des ordres…). L’objectif poursuivi est simple : « fournir aux responsables l’information dont ils ont besoin, quand ils en ont besoin et sous une forme directement utilisable par eux ».
Partant de la constatation qu’une crise se conduit essentiellement à partir des informations liées à la conjoncture, l’EMA a fait choix des priorités suivantes :
– priorité 1 : traitement automatique de tous les messages reçus quelles qu’en soient la nature et la forme ;
– priorité 2 : utilisation d’une base de données spécifique de l’état-major opérationnel ;
– priorité 3 : présentation visuelle automatique aux hautes autorités des informations de leur niveau et de la situation générale ou de tel de ses aspects particuliers.
Le système sera réalisé en plusieurs tranches. L’objectif initial est la mise en service, en principe en 1975, des éléments exigés par les deux premières applications classées prioritaires. À cette époque, le système permettra déjà :
– d’assurer une exploitation rationnelle des messages (gestion des files d’attente, distribution sélective…) et de maintenir une information cohérente et homogène à tous les niveaux de l’état-major opérationnel (redistribution, abonnement, consultation des fichiers…) ;
– de tenir à la disposition de tous une base de données intéressant le domaine du renseignement.
Dans un deuxième temps, il conviendra d’étendre cette base de données, dont la réalisation conditionnera en grande partie les développements ultérieurs du Sysic.
Sur le plan technique, Sysic constitue un système évolué qui met en œuvre des moyens informatiques importants, supportés par un ordinateur Iris 50 : imprimantes à 180 caractères/seconde, console de visualisation qui grâce aux progrès technologiques récents permettent un dialogue homme-machine simplifié.
Cette simplicité est un facteur majeur de réussite de l’opération. En effet, la mise à la disposition du commandement de ces instruments perfectionnés s’accompagnera d’un nécessaire changement dans les habitudes et les méthodes de travail des officiers au sein de l’état-major. De nouveaux réflexes devront être acquis. Ceci explique l’importance accordée à l’aspect ergonomique du système et au test, par un grand nombre de futurs utilisateurs, d’une maquette automatisée.
Toutes les armées modernes cherchent à adapter les moyens aux exigences nouvelles du commandement opérationnel et l’informatique de commandement a pris maintenant son essor. Partout les études se multiplient, mais les armées françaises y tiennent bonne place.
Ce n’est cependant qu’une étape : Sysic prendra sa vraie dimension dans quelques années, lorsqu’il sera devenu l’échelon le plus élevé d’un système global intéressant plusieurs niveaux des chaînes hiérarchiques.
Chef de Bataillon Henri Salaun
Perspectives d’avenir de l’informatique dans l’Armée de terre
Un article précédent (cf. chroniques de Défense en France d’avril et de mai 1974) s’était proposé un rapide survol des réalisations de l’Armée de terre dans ce domaine tout nouveau qu’est l’Informatique.
Le développement de la micro-électronique met à notre disposition un outil de traitement de l’information particulièrement performant. Il est certain que l’on a déjà obtenu grâce à lui une bien meilleure circulation des informations et une simplification d’un grand nombre de tâches répétitives ou fastidieuses, en bref on constate une amélioration très sensible du « service rendu ».
Cependant on note aussi quelques insatisfactions d’autant plus que certains espoirs avaient laissé entrevoir que ces « machines » nouvelles que sont les ordinateurs viendraient régler tous nos problèmes avec gain de personnel et d’argent : ce n’est pas du tout le cas, mais il semble que la cause principale ne vienne pas de la « machine » mais de nous-mêmes qui avons du mal à suivre l’évolution si rapide de sa technologie et surtout à nous débarrasser d’une certaine rémanence du passé dans nos habitudes de travail et dans la répartition établie des responsabilités.
Or c’est une véritable révolution qu’apporte l’informatique si l’on veut respecter ses trois principes :
– saisie unique de l’information là où elle nait (à la source) et au bénéfice de tous ;
– celui qui a besoin de cette information doit aller la chercher là où elle se trouve (dans son fichier) et non plus aller harceler la source ;
– les applications doivent prendre en compte les besoins d’un maximum d’échelons hiérarchiques.
Nous sommes encore loin de la mise en œuvre intégrale de ces principes et l’état actuel de notre informatique présente encore des imperfections, en particulier :
– une distinction trop tranchée est faite entre les niveaux hiérarchiques : administration centrale, régions, corps de troupe, et entre forces de manœuvre et formations territoriales ; il en résulte qu’une donnée commune à plusieurs chaînes est souvent saisie, stockée et traitée à plusieurs niveaux ;
– les besoins en automatisation ne sont pas toujours correctement appréciés, leurs interactions n’ont pas toujours été suffisamment précisées (et c’est normal puisque la situation actuelle découle de besoins ponctuels des services gestionnaires) d’où des difficultés de mise à jour simultanée de certains fichiers, ce qui risque d’entraîner des incohérences dans les résultats ;
– les ordinateurs en place au niveau national et au niveau régional ne sont pas compatibles, Siemens d’un côté, Burroughs de l’autre, sans qu’il ait été possible jusqu’à présent de les connecter (il manque un organe interface et des moyens de transmission adaptés).
Pour pallier tous ces inconvénients, l’Armée de terre s’est fixé un objectif ambitieux : celui de mettre sur pied un « système automatisé de commandement et de gestion » cohérent et le plus intégré possible. Une telle réalisation demandera de nombreuses années pour voir le jour et elle ne pourra être approchée que par étapes prudentes et réfléchies. Mais déjà les grandes lignes de cette évolution ont été adoptées par le Chef d’état-major ; actuellement des études sont menées pour quantifier ce projet et le présenter sous la forme d’un « schéma directeur » comprenant trois volets : les applications, les matériels et leur exploitation, les personnels.
Les applications
En fait, tous les organismes de l’Armée de terre sont appelés à participer au traitement automatisé soit en fournissant des informations qui, figées, deviennent des données, soit enfin en bénéficiant des « produits » imprimés ou visualisés.
Il paraît évident que l’ordinateur ne constitue qu’un élément (certes fondamental) des chaînes de traitement et que la réussite de son utilisation est inséparable de la bonne conception des opérations qui prennent place avant lui ainsi que de la bonne utilisation des produits qu’il a élaborés. D’où l’importance de la conception des « applications » qu’il faut définir d’une façon parfaitement cohérente.
À cet effet on se propose de créer un système global d’information, chargé de préparer les décisions et de permettre le suivi et le contrôle de l’exécution.
Jusqu’à présent on n’avait guère pris en compte que les travaux de gestion du temps de paix – il est vrai avec pour fond de tableau la préparation aux situations du temps de crise ou de guerre – mais dans le système futur, ce passage temps de paix-temps de guerre doit être prévu de telle façon que les procédures permettent de glisser directement de l’un à l’autre sans solution de continuité. À cette contrainte opérationnelle vient s’ajouter aussi la notion nouvelle de sécurité : ce système doit pouvoir fonctionner en tout temps, être imbrouillable et inviolable.
Il faut, bien sûr, tenir compte de ce qui existe déjà, mais pour édifier ce système cohérent qui est notre objectif, il a semblé plus logique de ne pas se baser sur des structures qui risquent d’évoluer, mais plutôt de s’intéresser aux fonctions immuables que doit assumer chaque niveau de commandement à son échelon de responsabilité.
En fait on a défini cinq fonctions fondamentales : emploi (1), logistique, finances, infrastructure et personnels, supportés par une fonction centrale : organisation. Cet ensemble forme ainsi six sous-systèmes qui se répartissent sur plusieurs niveaux hiérarchiques et échangent des informations.
On voit apparaître ici le caractère très déconcentré d’un tel système aussi bien pour la collecte des informations que pour leur traitement, chaque organisme restant responsable de ses études à son propre niveau. En revanche, une centralisation très poussée de la direction et de l’exploitation est nécessaire pour éviter le développement anarchique des applications (système cohérent) et nécessaire aussi pour que chacun parle le même langage : codification, gestion des bases des données, procédure des traitements.
Sur ces bases, on a essayé de projeter les besoins à attendre dans les années post-80 (besoins que l’on veut quantifiés, et là s’est alors posé un problème bien difficile) et en regroupant les desiderata des divers échelons de commandement et des services on est arrivé à établir des « cibles » sur lesquelles sont représentés les détails des sous-systèmes, le volume des fichiers et les traitements qu’ils exigeront : les interactions y sont étudiées d’une manière exhaustive. À partir de ces cibles des étapes de réalisation peuvent être définies. Il n’est pas évident d’ailleurs que cette mise en place de procédures nouvelles n’exige pas au préalable des modifications de structure pouvant aller jusqu’à un réajustement des responsabilités.
Il est à souligner que dans ce nouveau système, le nombre de traitements décisionnels sera important et que les bases de données seront nécessairement à mettre en place. On touche là à deux techniques très récentes de l’informatique ; elles demanderont beaucoup de précaution dans leur application.
Les matériels et l’exploitation
Ce sont les résultats chiffrés des études sur les « cibles » qui vont permettre de définir les matériels et les procédures d’exploitation à adopter pour les mettre en œuvre.
L’évolution des moyens de traitement proprement dit s’oriente plutôt vers le perfectionnement du logiciel et de l’organisation que sur l’amélioration du matériel. Les méthodes d’organisation des fichiers sur disques permettent le développement des interrogations et surtout des traitements à distance (utilisation des bases de données).
Parallèlement, la mise à disposition par les PTT de lignes de télécommunication à grande vitesse de transmission et surtout la mise prochaine en service du Réseau intégré des transmissions de l’Armée de terre (Ritter) offrent de plus en plus de possibilités d’interconnexion entre unités centrales et terminaux lourds ou légers.
Dans ces conditions, on peut envisager de réaliser un véritable réseau complet et cohérent pour la collecte, la transmission et le traitement de données de toute nature. D’ailleurs de tels réseaux existent déjà à l’étranger, par exemple le réseau ARPA [NDLR 2024 : Arpanet] aux États-Unis.
C’est dans cette voie novatrice que se lance l’Armée de terre, en se fixant pour les années 1980 une structure d’ordinateurs en réseau, ce qui va impliquer :
– une extension des points de saisie d’information par terminaux légers aux « sources »,
– une structuration des informations en « bases de données »,
– une augmentation du télétraitement.
Une première étape a été fixée à 1976, date à laquelle seront transférées de la Caserne Mortier au Fort du Mont-Valérien les installations du Centre de traitement de l’information René Carmille devenues trop exiguës. Les nouveaux ordinateurs à mettre en place alors devront préfigurer un des nœuds du réseau qui par la suite devra être connecté au Centre de traitement de Satory puis aux Centres régionaux, eux-mêmes reliés aux terminaux installés chez les utilisateurs.
Pour mettre en œuvre ces moyens électroniques, il était logique de faire appel à l’arme des Transmissions. Ainsi on retrouve le souci de rendre opérationnel ce système dont le nœud vital va se trouver en sécurité dans une enceinte fortifiée et dont l’exploitation est confiée à une arme.
Les personnels
Ces projets ambitieux posent trois types de problèmes :
– financiers : il ne semble pas que ce soit une contrainte insurmontable, d’autant plus que le coût des matériels électroniques a plutôt tendance à baisser ;
– d’infrastructure : avec répercussion financière pour l’installation des matériels : les emprises existent, le coût des constructions est relativement faible par rapport au prix des matériels déjà installés ;
– de personnels : c’est le vrai, le grand problème !
Il nous faudra comme dans le passé des spécialistes de l’exploitation, de l’analyse et de la programmation, peut-être plus expérimentés sur ces percées du logiciel que sont les bases des données et les techniques de télétraitement. Pour ces personnels, les structures de formation existent, toutes les écoles d’ingénieurs se sont équipées de sections bien adaptées à ce genre de besoins. Les Armées ont aussi leurs stages de formation d’analystes et programmeurs à plusieurs niveaux. Seule la ressource numérique risque ici de constituer une gêne.
Mais on a vu que l’informatique exerce son influence à tous les niveaux de la hiérarchie et surtout aux plus hauts échelons. Elle participe à toutes les formes de commandement : planification, programmation, gestion, conduite. Elle embrasse tous les domaines : opérations, personnels, matériels, finances, infrastructure. La spécialité est donc maintenant à considérer comme une spécialité d’état-major : c’est dans ce cadre des états-majors qu’il va falloir mettre en place des personnels connaissant parfaitement les rouages de leurs services et qui, initiés aux disciplines de l’informatique, devront être capables de poser leurs problèmes en termes d’automatisation, puis d’exploiter les produits de cette automatisation.
Une vaste action d’explication, de démystification – toute technique nouvelle a son « jargon » qui risque d’effrayer – de mise en place de structures d’information est faite en ce moment ; mais elle ne pourra porter ses fruits qu’à terme. À signaler cependant, dans l’immédiat, l’orientation très nette prise par l’École supérieure de Guerre qui a inclus dans ses programmes un cycle d’études informatiques.
Restera le vaste problème de l’ouverture des droits quantitatifs et qualitatifs des personnels chargés de l’informatique dans tous les organismes. Devant la pénurie en personnels que nous connaissons, la solution sera difficile à trouver ; des reconversions seront sans doute à réaliser mais en conservant une filière de carrière attrayante.
Chacun est bien conscient que la bonne réussite de ces projets dépendra de l’efficacité des hommes qui en sont chargés : l’effort nécessaire sera fait.
En conclusion, on peut dire que, dans l’Armée de terre, l’informatique connaît et va connaître une profonde mutation.
Un système nouveau et cohérent va être mis en place par étapes pour fournir aux responsables à tous les niveaux les éléments de leur décision en les soulageant des tâches de routine – et ceci répond à l’une des préoccupations majeures du ministre des Armées (Cf. la chronique de mai 1974 consacrée à l’intervention du ministre des Armées devant la Commission de défense nationale) – leur permettant ainsi de se consacrer pleinement aux activités nobles de la réflexion où la machine ne peut en aucun cas les remplacer. C’est à ces responsables qu’il appartient de veiller, notamment lors des études d’automatisation, à ce qu’il en soit ainsi.
Une enquête effectuée aux États-Unis, il y a quelques années, montrait de façon formelle que la principale cause des succès en automatisation était la compréhension ou l’actif patronage de la direction générale ; qu’au premier rang des causes d’échec, au contraire, il fallait placer le désintérêt de la direction régionale vis-à-vis de l’automatisation et au second l’absence de réorganisation préalable. Forte de son expérience, l’Armée de terre souscrit pleinement à ces conclusions. C’est dans cet esprit qu’elle fait participer les échelons responsables au développement de ses projets. Largement engagée dans l’informatisation de ses activités, elle est décidée à en exploiter toutes les possibilités. En conséquence, elle chemine sur deux voies parallèles en résolvant sans piétiner les problèmes immédiats tout en préparant à moyen terme une novation profonde.
Colonel J. Maunier
Le décret relatif aux positions statutaires des militaires de carrière
Publié le 28 avril 1974 au Journal officiel, le décret relatif aux positions statutaires des militaires de carrière apparaît, en raison de ses répercussions sur la vie personnelle et professionnelle de ces militaires, comme l’un des textes d’application les plus importants du statut général. Ce décret, dont le projet a fait l’objet d’un examen très attentif par le Conseil supérieur de la fonction militaire (CSFM) puis par le Conseil d’État, précise en effet les conditions dans lesquelles a lieu le placement dans les diverses positions et situations prévues par la loi du 13 juillet 1972 portant statut général des militaires.
Sa publication rend en outre possible l’élaboration de nombreux autres textes d’application du statut général avec lesquels il interfère et dont il constitue l’une des références fondamentales.
Le décret relatif aux positions statutaires tend par ailleurs, en rassemblant dans un texte unique et en simplifiant les règles antérieures multiples et complexes, à faciliter la gestion des personnels militaires.
La première des caractéristiques de ce texte est en effet qu’il s’applique à tous les militaires, à quelque armée ou formation rattachée qu’ils appartiennent. La recherche de l’uniformisation dépasse même le cadre strictement militaire puisque le nouveau régime des positions, tout en conservant les règles spécifiques aux militaires, s’inspire de celui des fonctionnaires dont il reprend certaines dispositions, notamment en matière de congés de maladie, domaine dans lequel la parité est rigoureusement appliquée.
Le décret du 22 avril 1974 traduit également un effort de simplification par rapport à la réglementation antérieure. Cet effort se manifeste notamment par la réduction, en application des dispositions de l’article 52 de la loi du 13 juillet 1972, du nombre des positions, ramené de sept à cinq, et par l’adoption d’une répartition plus rationnelle ainsi que d’une terminologie qui correspondent assez étroitement à celles du statut général des fonctionnaires de 1959. C’est ainsi que, pour tous les militaires de carrière, les positions sont désormais les suivantes :
– l’activité,
– le service détaché,
– la non activité,
– hors cadre,
– la retraite.
Pour chacune de ces positions, définies par la loi, le décret opère un regroupement des multiples situations dans lesquelles les militaires pouvaient se trouver et permet une simplification des procédures. À titre d’exemple, la position de non activité recouvre désormais toutes les situations dans lesquelles les militaires sont, pendant une longue période excédant six mois au moins, appelés, pour des motifs divers, à n’effectuer aucun service, à savoir : le congé de longue durée pour maladie, le congé pour raisons de santé d’une durée supérieure à six mois, les congés exceptionnels dans l’intérêt du service ou pour convenances personnelles d’une durée supérieure à six mois, la disponibilité, le congé du personnel navigant et le retrait d’emploi. De même, bon nombre de situations spécifiques à certaines armées ont été supprimées.
Toutefois, compte tenu de l’ampleur de la réforme, le reclassement des militaires dans les nouvelles positions ne peut se faire que dans le respect des droits acquis par les intéressés. C’est pourquoi le décret prévoit que la réglementation nouvelle ne s’applique, dès sa publication, qu’aux militaires se trouvant dans la position nouvelle d’activité, rien n’étant bien entendu changé en ce qui concerne la position de retraite. Par contre les autres militaires disposent d’un délai de trois mois, après notification de leur nouvelle situation, pour demander, s’ils le souhaitent, leur maintien dans leurs positions et situations actuelles, un tel maintien ne pouvant, en tout état de cause, se poursuivre au-delà du terme fixé par la décision individuelle prise en vertu des règles statutaires antérieures.
C’est donc un ensemble de dispositions beaucoup plus claires et plus modernes que contient le décret relatif aux positions des militaires de carrière. Il reste cependant qu’en cette matière rien ne peut être très simple car seule une parfaite exhaustivité permet de garantir les droits des militaires. Il ne faut donc pas moins de 46 longs articles, regroupés en six chapitres pour établir le régime nouveau.
Le premier chapitre du décret est consacré à l’activité, définie comme étant la position des militaires qui occupent un emploi de leur grade, que ce soit dans les armées ou dans le cadre d’une participation organique militaire à des organismes ne relevant pas du ministère des Armées. Il reprend des dispositions bien connues des intéressés, en ce qui concerne notamment les congés exceptionnels dans l’intérêt du service et pour convenances personnelles d’une durée de moins de six mois, le congé de fin de service et le congé de fin de campagne. Ce chapitre comporte cependant des innovations par rapport à la réglementation précédente en ce qui concerne notamment les congés de maladie pour lesquels est adoptée la formule de la fonction publique : ces congés recouvrent désormais, le droit à la solde continuant à être maintenu pendant six mois, les multiples situations antérieures : exemption des services, hospitalisations, permissions de convalescence…
Le deuxième chapitre traite de la position en service détaché correspondant à l’ancienne situation hors cadre. Outre les militaires nommés membres du Gouvernement ou appelés à exercer des fonctions électives, sont détachés des officiers et sous-officiers de carrière qui sont placés, dans certaines conditions, auprès d’une administration, d’un établissement public, d’un département, d’une commune, d’un État étranger ou même d’une entreprise privée. Parmi les dispositions nouvelles il convient de mentionner que le détachement d’office ne peut être prononcé qu’après l’avis d’une commission présidée par un officier général et comprenant deux militaires de carrière d’un grade égal ou supérieur à celui de l’intéressé. En outre, dans ce cas, la réintégration est prononcée même en surnombre.
Enfin, si le militaire détaché est soumis à l’ensemble des règles régissant la fonction qu’il exerce, les dispositions du statut général des militaires lui restent néanmoins applicables.
Le troisième chapitre, le plus long, est consacré aux diverses situations de la position de non activité. Il reprend nombre de règles figurant dans des textes antérieurs et concerne les congés de longue durée pour maladie, les congés pour raison de santé et congés de longue maladie d’une durée supérieure à six mois, les congés exceptionnels d’une durée supérieure à six mois, la disponibilité, le congé du personnel navigant et le retrait d’emploi.
Le quatrième chapitre reprend sous l’appellation de position hors cadres, les principes figurant dans des textes de 1958 et de 1962 qui avaient organisé la position spéciale hors cadres. Seuls les militaires détachés peuvent être, sur leur demande, mis hors cadres pour continuer à servir dans l’administration, l’entreprise ou l’organisme dans lequel ils exercent leurs fonctions. Dans cette position, ils ne sont plus soumis, sauf en ce qui concerne l’article 79 relatif à la cessation de l’état du militaire de carrière, aux dispositions du statut général des militaires.
Le cinquième chapitre est consacré à la retraite. Il convient de remarquer que, dans le cas de mise à la retraite pour aptitude physique insuffisante, le décret subordonne la mise en œuvre de la procédure, qui fait intervenir un conseil d’enquête, à un avis médical complémentaire exprimé dans les mêmes conditions que celles qui président au placement des militaires dans les divers congés liés à l’état de santé, ce qui donne, dans ce cas particulier, une garantie supplémentaire à l’intéressé.
Le dernier chapitre définit les conditions d’application du décret et abroge sept décrets importants publiés entre 1923 et 1964.
Ainsi le décret du 22 avril 1974, relatif aux positions statutaires des militaires de carrière, s’inscrit-il parfaitement dans l’œuvre de rénovation de l’édifice ancien entrepris par le statut général des militaires du 13 juillet 1972. ♦
(1) Les matériels spécifiques des « systèmes d’armes » ne font pas partie de cette fonction, ils restent autonomes.