Afrique - À propos du départ de plusieurs personnalités africaines - La Mauritanie signe la paix mais sauvegardera-t-elle son unité ?
L’année 1978 et le premier semestre de 1979 ont vu disparaître plusieurs personnalités de la scène politique africaine. Si le décès du président Boumédiène a diminué l’intensité du rayonnement de l’Algérie sur le continent sans pour autant que soit modifiée fondamentalement la politique étrangère de ce pays, les changements survenus dans les gouvernements d’autres États ont des conséquences plus visibles. En Mauritanie, la chute de M. Moktar Ould Dadda et celle de son successeur ont provoqué l’évolution du problème sahraoui (voir ci-dessous l’article de Bernard Guillerez). Au Tchad, l’éviction du président Malloum a permis de faire participer plusieurs fractions des rebelles au gouvernement : cette mutation est souvent considérée comme une avancée, peut-être provisoire, des « musulmans progressistes » vers le sud, bien que le colonel Kadhafi se montre peu satisfait des résultats obtenus par la Conférence de Kano. En revanche, la fuite du maréchal Idi Amin Dada marqua une régression de l’influence islamique en Ouganda : le premier succès remporté en Afrique par une opposition agissant de l’extérieur avec l’appui des forces armées d’un État voisin, constitue un précédent fâcheux. La mort du président Kenyatta a permis d’installer à Nairobi un chef d’État plus ouvert aux relations interafricaines et donnera sans doute au Kenya la possibilité de tenir le rôle qui lui revient sur la scène du continent. Par ailleurs, des régimes militaires disparaissent au Ghana et au Nigeria, deux États aux structures complexes, et l’on ne peut préjuger de la solidité des pouvoirs mis en place ni de la position que des gouvernements civils adopteront sur l’échiquier continental. En Guinée Équatoriale, après un affrontement sanglant, M. Francisco Macias Ngueman, un des trois présidents africains qui furent les moins acceptés par leurs pairs, a été renversé et arrêté début août 1979.
La Guinée Équatoriale n’aura jamais la possibilité d’exercer une influence quelconque sur l’orientation générale de l’Afrique, mais elle occupe une position importante, au fond du golfe de Guinée, entre l’Afrique occidentale et l’Afrique centrale. Composée d’une partie insulaire et d’une partie continentale sans liens ethniques entre elles, elle a été dotée, par l’administration espagnole, d’une constitution unitariste qui est responsable pour une large part de ses malheurs. La population la moins évoluée étant majoritaire, elle s’est imposée, d’abord sur le plan électoral puis par la force, aux insulaires plus riches, mieux instruits, sur lesquels les Espagnols avaient fondé leur colonisation. La classe dirigeante fut pratiquement éliminée, sinon exterminée, comme furent renvoyés dans leur pays les 40 000 travailleurs nigérians des plantations. Macias s’était entouré de coopérants nord-coréens et cubains sans toutefois leur laisser la moindre liberté d’initiative et de gestion. Il n’avait pas choisi le soutien du monde socialiste pour des raisons idéologiques mais dans le but de priver de leurs appuis extérieurs ses principaux rivaux qui, au sein de son ethnie d’origine, avaient reçu depuis longtemps l’aide soviétique ou chinoise et entretenaient des rapports avec les rebelles du Cameroun. En Guinée espagnole, la dictature ne visait ni à imposer un système économique, ni à susciter la naissance d’un sentiment national mais à perpétuer le pouvoir d’un homme et d’une famille.
Le lieutenant-colonel Tedoro Obiang Nguema, président du nouveau conseil militaire, était trop proche du régime déchu pour être accepté d’emblée par les mouvements d’exilés équato-guinéens. Avant même de chercher à rallier à sa cause les différentes factions de l’opinion, il lui faudra, sans doute avec l’aide de l’Espagne, tirer la Guinée du chaos dans lequel elle est plongée depuis de longs mois et renouer des relations confiantes avec les États voisins. Ce renouveau d’intérêt pour un pays qui fut convoité ne s’étendra pas au-delà du Gabon, du Cameroun et du Nigeria dont les diplomaties respectives s’efforceront peut-être d’attirer le nouveau gouvernement dans leur orbite particulière.
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