Afrique - Rhodésie-Namibie : problèmes liés - L'affaire de Gafsa (Tunisie) et ses implication régionales
Depuis le 2 août 1979, M. Yiljoen occupe les fonctions d’administrateur-général de la Namibie en remplacement du juge M.-T. Steyn qui les détenait depuis 1977. Cette année-là, Pretoria avait renoncé à considérer le Sud-Ouest africain comme partie intégrante de son territoire national et préparait la mise en place d’un règlement interne : il souhaitait ainsi prouver à l’opinion internationale que la SWAPO (South-West African People’s Organization) ne pouvait prétendre à représenter seule la population namibienne. La nomination du docteur Yiljoen semble être un nouveau pas en avant : elle paraît montrer que le gouvernement sud-africain a compris que l’accession à l’indépendance de la Namibie ne conduira à la paix que si la SWAPO est associée d’une manière ou d’une autre à la solution proposée.
Le nouvel administrateur-général participe en effet à un courant d’opinion souvent mal compris, ou du moins peu connu en Europe. Cet homme de 54 ans, né d’une famille boer du Cap, a vécu sa jeunesse à l’université de Pretoria où son père enseignait le grec. Après des études brillantes en Afrique du Sud, à Cambridge et à l’université de Leiden en Hollande, il est devenu professeur de langues classiques à l’université d’Afrique du Sud puis fut nommé, en 1967, recteur de la Randse Afrikaanse Universiteit, que l’on venait de créer à Johannesburg et qui compte aujourd’hui environ 2 500 étudiants. Deux activités parallèles caractérisent bien sa personnalité : il est à la fois le président du Comité de recherche sur l’éducation postscolaire des noirs urbanisés et le président du mystérieux « Broederbond », que la presse de langue britannique rend responsable d’un certain immobilisme de la politique sud-africaine.
À regarder de plus près, cette association culturelle afrikaner, créée pour permettre à la communauté boer de conserver son identité sous l’administration anglaise, paraît être devenue, en dehors des partis politiques et des différentes Églises, le lieu de rencontre des diverses interprétations de la doctrine du « développement séparé », allant de la plus restrictive à la plus évolutive, bref une sorte de creuset où les tenants d’une tradition élaborent la meilleure forme à donner à la société sud-africaine pour tenir compte des exigences du monde moderne et de la nécessité de conserver intactes les valeurs qui ont fait la grandeur et le succès de leur communauté. Étant présent dans tout le pays, le « Broederbond » permet aussi d’amener insensiblement les plus irréductibles à accepter les mutations nécessaires, remplissant ainsi, plus ou moins consciemment, un rôle analogue à celui qu’ont joué les fabiens dans l’évolution de la société anglaise du début du siècle vers un socialisme adapté à ses mœurs. Il a obtenu un certain succès en faisant admettre par une fraction de l’opinion l’éventuelle création de « nations » indienne et métisse. Il semble utiliser le même procédé de propagande indirecte pour faire reconnaître comme inévitable que les noirs urbanisés soient détachés de leurs bantoustans d’origine et bénéficient eux aussi d’une autonomie administrative.
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