Défense à travers la presse
• Dans le domaine stratégique, l’événement majeur de cet été, qui s’achève sous le signe de la révolte des travailleurs en Pologne, a été la « Directive présidentielle n° 59 » signée le 25 juillet par l’hôte actuel de la Maison-Blanche – un document qui entérine la stratégie anti-forces, depuis longtemps connue des états-majors mais que la presse a néanmoins présenté comme un virage dans les conceptions américaines en matière de défense.
Jean-François Mongibeaux, dans Le Quotidien de Paris du 16 août va même jusqu’à parler de document explosif et d’une nouvelle stratégie nucléaire à la carte, des appréciations qu’étaye cette analyse : « Les États-Unis viennent de franchir très officiellement un pas décisif qui menace de rendre bientôt la doctrine de la dissuasion parfaitement caduque. Dès les années 1962, le secrétaire à la Défense McNamara, partisan de la fameuse défense flexible, affirmait que la guerre nucléaire pouvait être engagée comme une guerre conventionnelle et gagnée. Une opinion sacrilège vis-à-vis de la doctrine officielle de destruction mutuelle assurée ou MAD. En 1974, James Schlesinger joue aussi les iconoclastes… Il a fallu attendre six ans pour que cette attitude, qui se fonde sur l’incessant développement des armements stratégiques soviétiques effectivement capables d’anéantir l’arsenal nucléaire terrestre américain par une attaque surprise, finisse par triompher à Washington. Six ans de tergiversations politiques et de débats doctrinaux, mais aussi et surtout six ans de progrès technologiques. »
• Ce dernier point est sans doute essentiel, et le général Buis y insiste dans l’article qu’il a publié le 16 août 1980 dans Le Nouvel Observateur. Pour le général Buis, la directive du président Carter semble réorienter la stratégie du plus grand des nucléaires et par là même la conception de la défense de l’Occident tout entier : « En gros, il s’agirait d’abandonner la menace anti-cités, donc la dissuasion, donc la non-guerre, pour la menace d’une guerre spécifique susceptible de détruire l’arme capitale de l’ennemi. Ce serait le passage de l’anti-cités à l’anti-forces. L’évolution est considérable… On doit donc se demander pourquoi, sur une question d’une importance si vitale, Jimmy Carter a effectué un brutal virage et s’est rendu aux raisons de Brzezinski et de Brown. C’est d’abord parce que leurs arguments étaient bons. »
Il reste 78 % de l'article à lire