(suite de la chronique de juin 1983).
Aéronautique - Du Dassault MD 311-312-315 Flamant à l'Embraer EMB-121 Xingu - (II) Le Xingu
La satisfaction d’un besoin
La capacité à la mission école des MD 312 Flamant, même modernisés, se dégradait de jour en jour :
– les performances et l’équipement du Flamant le rendaient de moins en moins adapté au trafic aérien actuel, en particulier dans les zones terminales importantes ;
– de plus, il était devenu peu représentatif de la flotte du Commandement du transport aérien militaire, Cotam (C-160 Transall, Douglas DC-8, Dassault Mystère 20),
– enfin, bien que vieillissant très bien, le Flamant offrait des coûts d’exploitation de plus en plus élevés (maintenance, carburant).
Envisagé dès 1970, son remplacement fut maintes fois retardé pour des raisons financières. La modernisation d’une partie de la flotte représenta un premier palliatif qui repoussait la réforme des avions les plus récents à la fin 1983. Mais dès 1977, l’Armée de l’air, déjà soumise au poids financier des programmes en cours (Jaguar, Mirage F1, Alphajet) ou futurs (Mirage 2000, Transall NG), se mettait en quête d’un avion déjà commercialisé capable de satisfaire correctement ses besoins spécifiques. Elle s’associa très vite à la Marine dont le remplacement des antiques Dakota entraînait l’apparition d’un besoin identique.
En 1979, l’Armée de l’air, la Marine et les services officiels procédèrent à l’évaluation détaillée de 5 avions.
Les critères de sélection comportaient non seulement l’aptitude à la mission école, mais encore la « capacité liaison », le Cotam étant venu se joindre aux 2 partenaires initiaux. Le choix du ministre de la Défense se portait donc en 1980 sur l’avion brésilien Embraer EMB 121 Xingu dont le premier vol remontait à 1976.
Le contrat d’achat a été signé en janvier 1981 : il porte sur la fourniture de 41 machines (25 pour l’Armée de l’air, 16 pour la Marine).
Description technique
Le Xingu (photo ci-après) est un biturbopropulseur métallique à aile basse étudié pour remplir les missions d’entraînement et de liaison. Son fuselage circulaire pressurisé lui permet de loger au maximum deux pilotes et neuf passagers qu’il transporte à 400 km/h sur 1 500 km environ. 28 % de ses composants sont d’origine française, dont les équipements radio-électriques très modernes et complets. Bien que jaugeant 700 kg de moins que le MD 312, l’EMB 121 offre une charge utile double soit environ 1 tonne.
Déjà utilisé par l’armée de l’air brésilienne et l’école de pilotage de la Sabena (compagnie aérienne nationale belge), le Xingu est entré en service en France en 1982 dans l’Aéronavale, puis en 1983 dans l’Armée de l’air. Ses caractéristiques principales sont résumées ci-après. Elles illustrent bien les progrès effectués en 30 années par les constructeurs aéronautiques.
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Xingu |
Envergure |
14,45 m |
Longueur |
12,25 m |
Hauteur |
4,74 m |
Poids à vide équipé |
3 500 kg |
Poids total en charge |
5 670 kg |
Propulsion |
2 x 680 CV (turbines) |
Vitesse maximum en palier |
450 km/h (environ) |
Vitesse de croisière |
400 km/h (environ) |
Distance maximale franchissable |
supérieure à 2 000 km |
Le rôle du Xingu dans l’Armée de l’air
L’EMB 121 permettra à l’Armée de l’air de remplir une mission principale et une mission secondaire :
• la mission secondaire sera une mission de liaison. 2 unités du Cotam, les escadrilles de liaison 43 de Bordeaux et 44 d’Aix-en-Provence, mettront en œuvre chacune 2 machines qui opéreront au profit de leur région aérienne.
• la mission principale sera, bien évidemment, la mission école. 16 Xingu équiperont à la fin de cette année l’École d’Avord qui, dès cet été, formera une première promotion de pilotes. De la mise en service de cet avion, l‘Armée de l’air attend 2 avantages : une meilleure qualité de pilotes et une économie sensible sur le coût global de la formation.
Le premier point est évident : bien équipé et performant, l’EMB 121 prépare beaucoup mieux les jeunes pilotes aux avions modernes dont la mise en œuvre est bien plus fondée que naguère sur l’application de procédures strictes puisées dans des manuels d’exploitation complets et précis. Ainsi, le jeune breveté abordera sa transformation sur Transall ou Nord N262 en étant déjà rompu à l’utilisation des courbes ou abaques, au calcul des vitesses d’exploitation, à la tenue d’un suivi de situation carburant.
Le deuxième point, bien que lié dans une certaine mesure au premier, ne devrait se concrétiser qu’ultérieurement. En effet, le Xingu ayant des caractéristiques et des performances homothétiques de celles du C-160 Transall ou du Nord N262, il semble séduisant, au prime abord, de transférer sur l’avion brésilien une partie du potentiel d’instruction, jusqu’alors et par la force des choses, dispensée sur les avions français beaucoup plus lourds donc au coût d’exploitation bien supérieur. À partir de cette idée, le Commandement des écoles et le Cotam ont conjointement entamé une réflexion qui pourrait aboutir à une refonte des programmes de formation.
* * *
Avec l’extinction des Flamant est tournée une page de l’histoire de l’Armée de l’air. Présent sous les cieux d’Europe, d’Afrique et même d’Asie, ce robuste bimoteur a, en dépit de limitations liées à une technologie aujourd’hui dépassée, accompli durant un tiers de siècle les missions qui lui étaient confiées.
Néanmoins, il était plus que temps de lui donner un successeur. L’Armée de l’air, malgré les contraintes budgétaires auxquelles elle était soumise par ailleurs, a donc consenti un effort supplémentaire d’investissement dont les bénéfices seront sensibles dans l’avenir.
Le Xingu arrive au point pour donner une nouvelle impulsion à l’aviation de transport militaire, force dont il n’est plus nécessaire de souligner le rôle essentiel dans le cadre de notre défense. ♦