Aéronautique - Un avion de transport léger (ATL) pou l'Armée de l'air
La fin de service en 1986 des Nordatlas – N2501 – sans qu’ils soient remplacés par un autre appareil, ainsi que le début du retrait du service en 1995 des premiers C-160 Transall de la 1re génération, altéreront de manière sensible la capacité de transport des armées.
La chronique de ce mois est consacrée à un éventuel Avion de transport léger – ATL – dont l’Armée de l’air pourrait être conduite à se doter. Successeur du Nordatlas et intermédiaire avant un nouvel avion de transport, il apporterait, outre une capacité de transport aérien accrue, la souplesse d’emploi nécessaire à la crédibilité du transport aérien militaire et de l’Armée de l’air dès le temps de paix et a fortiori pour le temps de crise et le temps de guerre.
Définition du besoin
À partir de 1986, la flotte de transport aérien tactique sera seulement composée de 71 Transall dont 22 de la nouvelle génération, aptes au ravitaillement en vol. Ainsi, la capacité de transport représentée par la centaine de Nordatlas des années 1970 ne sera pas renouvelée, obligeant les armées à revoir en baisse leurs besoins de transport par air nécessaires à leur manœuvre et à leur soutien logistique.
Par ailleurs, en matière de soutien logistique, il faut remarquer que le Transall est parfois surdimensionné par rapport aux besoins pour un certain nombre de missions sur le théâtre européen. Ainsi en est-il par exemple de la logistique « légère » des escadrons de combat déployés et de la mission de sauvetage (Samar : Sauvetage aéromaritime et Sater : Sauvetage aéroterrestre). De même, pour nos forces stationnées outre-mer, une capacité de transport de niveau intermédiaire s’avère mieux adaptée que le C-160 aux besoins locaux.
D’un autre côté, le soutien logistique « lourd » des forces, primordial dès le temps de paix, l’est encore plus en temps de crise et en temps de guerre. Pour ne prendre que l’exemple de l’Armée de l’air, les déploiements de ses escadrons de combat nécessitent un flot logistique de personnels, de rechanges et de munitions ne pouvant souffrir aucune solution de continuité.
On peut donc craindre qu’à l’horizon 1995 la capacité de transport aérien ne soit plus adaptée aux impératifs de la mobilité et aux besoins des forces, et ce d’autant qu’une partie des Transall pourrait être hypothéquée par le ravitaillement en vol des avions de combat.
Ces quelques réflexions mettent en évidence les problèmes en matière de capacité de transport par air à l’horizon de la prochaine décennie. S’agissant de la capacité « 2e niveau » et afin, d’une part de combler le vide laissé par le N2501 et d’autre part d’économiser le potentiel des C-160, une solution pourrait consister en l’acquisition d’un ATL dont les caractéristiques essentielles seraient le faible coût à l’achat et à l’entretien, la robustesse sans superfluité, la rusticité et les performances.
Cet avion de taille plus modeste que le Transall permettrait donc d’économiser le potentiel C-160 en spécialisant ce dernier dans les aérotransports et les aérolargages importants.
La limite de vie en 1995 des premiers Transall de l’ancienne génération étant directement liée au potentiel avion, toute économie sur les heures de vol se traduit par une augmentation de la durée de vie des C-160. Ainsi avec la mise en service de l’ATL, on pourrait concevoir une économie substantielle qui autoriserait une limite de vie des appareils reportée vers les premières années du XXIe siècle, où l’on serait en mesure d’espérer la concrétisation d’un programme ATF (Avion de transport futur).
L’ATL pourrait également être mis en dotation dans les Etom (Escadron de transport outre-mer) pour lesquels sa capacité et sa simplicité technologique semblent plus conformes à la mission et aux possibilités d’un escadron outre-mer. À noter que cette éventualité, en permettant le retour des C-160 stationnés outre-mer, aurait le mérite d’accroître les dotations des escadres de métropole.
Enfin, avantage supplémentaire pour le temps de crise et le temps de guerre, l’ATL pourrait être spécialisé dans l’aéroportage des rechanges et des munitions au profit des escadrons de combat de l’Armée de l’air. Ainsi au même titre que l’EDSA (European Distribution System Aircraft) – pour l’USAFE (US Air Force in Europe) (1) – il permettrait une augmentation sensible de la disponibilité des avions de combat, de la souplesse d’emploi et des capacités d’intervention du transport aérien militaire.
Les bénéfices induits par la mise en service d’un avion de transport léger ayant été évoqués, nous allons maintenant esquisser ce que pourrait être cet avion.
Caractéristiques souhaitées
L’avion de transport léger doit être d’un « coût modéré » à l’achat et à l’entretien, tout en étant bien adapté à la mission de soutien logistique des forces armées effectuée par le TAM (Transport aérien militaire) mais aussi à la mission de guerre de ce grand commandement.
« Coût modéré » se traduit donc par avion « rustique » mais robuste, à la technologie éprouvée ne nécessitant pas de recherches et de développements particuliers. La formule bi-turbopropulseur ayant fait ses preuves, sera a priori préférée à un bi-turboréacteur, souvent trop sophistiqué, mais aussi à un bimoteur pour des raisons de difficulté d’avitaillement en essence et de performances insuffisantes.
L’adaptation à la mission de soutien logistique et à la mission à caractère tactique conduit : à une soute spacieuse équipée d’un système d’arrimage et de translation des charges et dont le plancher a une résistance éprouvée ; une porte et une rampe de chargement axiales à l’arrière de l’appareil ; la compatibilité au largage d’hommes et de matériel ; l’aptitude aux terrains d’assaut (aile haute, train d’atterrissage équipé de pneumatiques basse pression, autonomie de remise en route).
La charge offerte maximum devrait avoisiner 5 tonnes, avec possibilité de transporter 2 à 3 t sur 2 000 kilomètres.
Parmi les nouveaux commuters – avions de transport régional – actuellement « sur étagère », qui pourraient convenir, citons :
• L’ATR 42 – Avion de transport régional construit en coopération par l’Aérospatiale et Aeritalia – qui correspondrait à la description ci-dessus s’il était muni d’une porte et d’une rampe de chargement arrière, ce qui n’est malheureusement pas le cas pour le moment.
• Le SAAB Fairchild 340, le De Haviland Canada Dash 8 et l’Embraer EMB-120 Brasilia qui eux non plus n’autorisent pas le chargement axial arrière ; de plus, le dernier cité est à aile basse.
• Le Short 360, dont le rayon est cependant un peu faible et qui n’est pas pressurisé.
• L’Aeritalia G.222 correspondrait bien aux qualités souhaitées, mais il est trop « gros » (charge offerte 9 tonnes).
• Le Casa Nurtanio CN-235 – avion fabriqué en coopération par l’Espagne et l’Indonésie – qui semble a priori, et sous réserve d’évaluation ultérieure, satisfaire à toutes les exigences précédemment évoquées.
Pour terminer, et bien qu’aucune décision de commandement n’ait encore été prise, il paraît vraisemblable qu’une vingtaine d’ATL devrait suffire pour équiper un escadron en métropole et les Etom.
Conclusion
La voie tracée par l’USAF se dotant d’un EDSA, l’impérieuse nécessité de gérer le potentiel des Transall de façon à les « économiser » jusqu’à l’arrivée d’un ATF à l’horizon 2000, ainsi que la prise en compte de la mobilité des forces et de leurs besoins en soutien logistique, ne peuvent être honorés avec la faible capacité de transport tactique du TAM, basée sur les seuls C-160.
Il paraît donc évident que l’Armée de l’air, dans la limite de la rigueur budgétaire actuelle, doive se doter d’un ATL peu « coûteux », rustique, fiable et efficace. L’arrivée d’un tel avion accroîtrait à coup sûr la souplesse d’emploi de l’Armée de l’air tout en provoquant une meilleure adaptation des moyens à la mission, ce qui est à terme générateur d’économies.
(1) L’EDS appartient à l’AFLC (Air Force Logistics Command) : Commandement logistique de l’Air Force. Cet organisme vient d’être doté de 18 appareils de transport de fret Shorts Sherpa, mis en œuvre par le MAC : Military Aircraft Command, qui serviront à acheminer des moteurs et des rechanges entre bases américaines d’Europe.