Revue des revues
• Dans la Revue de l’Otan de décembre 1984, le général Rogers, Commandant suprême des forces alliées de l’Otan (SACEUR), fait une importante mise au point sur la doctrine qui porte son nom, et qui a été approuvée par le Comité des plans de défense de l’Otan le 9 novembre 1984. Il replace cette doctrine dans le cadre du concept des opérations du commandement allié en Europe, pour le cas où la dissuasion assurée par la riposte graduée échouerait. Les priorités fixées en 1980 visaient à renforcer les forces classiques de l’avant, à les moderniser et à développer les réserves mobilisables.
Le nouveau sous-concept a pour but « l’attaque au moyen d’armes classiques “des forces d’exploitation et de remplacement” » (FOFA : Follow-on Forces Attack), c’est-à-dire des « forces ennemies qui sont déployées immédiatement derrière les forces au contact jusqu’aux arrières de l’ennemi, aussi loin que le permettront les systèmes d’acquisition d’objectifs et les systèmes d’armes alliés ». Il s’agit donc d’interdire la progression aussi bien des divisions de deuxième échelon tactique, des armées de renfort et des fronts de 2e échelon, que des « Groupes de manœuvre opérationnels » (GMO), qui ont été expérimentés lors de l’exercice Zapad 81, et qui, lors d’une attaque-éclair, tenteraient des percées dans la profondeur.
Le sous-concept ainsi précisé, le général Rogers s’emploie à réfuter les critiques qui ont été adressées à ce plan, et à opposer les réalités aux mythes. Il précise que d’accord avec les experts tels que le Britannique Donnelly, il prend en compte toutes les capacités des forces soviétiques. La FOFA ne modifie pas la priorité accordée à la bataille classique de l’avant, elle la complète et la renforce. La FOFA n’est pas une stratégie nouvelle, elle reste compatible avec la riposte graduée. La FOFA a été conçue indépendamment de la doctrine des États-Unis en Europe « AirLand Battle » et du règlement FM 100.5 (le manuel de doctrine en opération de l’US Army) ; elle en diffère notamment par le non-emploi des armes nucléaires et chimiques, par le refus d’attaques préventives et d’une action au-delà du rideau de fer. Il ne s’agit donc pas d’une stratégie offensive. Son succès n’est pas lié à la mise au point d’armes de science-fiction ; il existe dès maintenant un certain nombre de moyens américains, allemands ou britanniques : MGM-52 Lance, MLRS (Lance-roquette multiple), mines largables, sous-munitions, etc. Enfin, la FOFA ne remplacera pas l’option nucléaire, mais en renforçant la dissuasion « classique », elle contribuera à élever le seuil nucléaire. En conclusion, le général Rogers espère que son programme permettra une coopération fructueuse des industries d’armement des nations alliées.
Il reste 83 % de l'article à lire