Armée de terre - La réorganisation de l'arme du matériel - Les « officiers conseils »
La réorganisation de l’arme du Matériel
Le 1er juillet 1985, la composante opérationnelle de l’arme du Matériel des trois Corps d’armée (CA) a été profondément réorganisée. Cette mutation s’est concrétisée par la création de huit régiments et de quatre bataillons du Matériel.
Pourquoi une réorganisation ?
Les structures nouvellement mises en place résultent de la transformation de l’Armée de terre fixée par la loi de programmation dont il a été fait mention dans une chronique précédente (octobre 1984). Il s’agissait, en fait, de faire face à une triple nécessité :
Nécessité opérationnelle, tout d’abord. En effet la réorganisation de l’Armée de terre reporte vers l’avant le centre de gravité du CA ; la division blindée est plus musclée et les régiments d’éléments organiques sont dotés de matériels très performants. Il s’imposait que les formations du Matériel et les soutiens suivent cette évolution en devenant mieux adaptés, plus puissants et plus souples.
Nécessité géographique, ensuite. La redistribution des régiments entre les grands commandements opérationnels a eu pour conséquence l’extension des zones de « stationnement paix » des divisions.
Nécessité économique, enfin. Comme toutes les composantes de l’Armée de terre, le Matériel a été concerné par les mesures de rigueur, en particulier en participant à la réduction des effectifs : il a dû se priver de l’équivalent d’une vingtaine de sections mobiles de réparation.
Comment ce changement a-t-il été réalisé ?
La réorganisation touchait les unités dans leurs équipements et leurs structures. Maintenir le niveau de productivité des formations du Matériel avec des effectifs plus réduits exigeait des investissements. Pour améliorer le fonctionnement des approvisionnements, les unités s’équipent progressivement de micro-ordinateurs à raison de 2 ou 3 par compagnie. Le soutien de l’électronique sera facilité grâce aux stations « Diadème » ; en outre des camions ateliers équipés de façon très rationnelle vont remplacer les camionnettes actuellement en service et devenues insuffisamment opérantes.
Les structures des formations du Matériel devaient, elles aussi, évoluer. Le soutien en temps de guerre exige en effet des unités qui soient flexibles, puissantes, capables de durer. Les pions de base sont désormais des compagnies : généralement spécialisées (mobilité, artillerie, électronique, aéromobilité, approvisionnement), celles-ci sont articulées en modules interchangeables disposant de stocks adaptés aux besoins. Leur nombre par grande unité est fonction du volume et des modes d’action privilégiés des forces à soutenir.
Comment se fait le soutien en temps de paix ?
Les structures du temps de paix découlent de celles du temps de guerre. Le stationnement des régiments en temps de paix constitue un « dispositif particulier » qui amalgame des régiments d’appartenances organiques souvent différentes. Le pion de base demeure la compagnie, mais celle-ci est composée des modules qui soutiendraient ces mêmes régiments en temps de guerre. Au passage paix-guerre, quand les grandes unités se constituent, cette compagnie restitue à d’autres les modules correspondants et perçoit ceux qui lui reviennent.
Au passage paix-guerre, les formations de soutien des divisions des forces disposent d’une structure d’accueil assurant l’administration et le soutien des compagnies du Matériel : ce sont les régiments de commandement et de soutien. Il fallait créer une structure de même niveau pour les dix compagnies assurant le soutien des éléments organiques et de la brigade logistique de chacun des CA. À cet effet, le corps d’armée comporte désormais deux régiments du Matériel. En temps de paix, ceux-ci assurent le commandement, la conduite du soutien et l’administration des compagnies stationnées dans leur zone de responsabilité et qui ne sont pas subordonnées à un régiment de commandement et de soutien.
Pour la Force d’action rapide (FAR), les divisions qui préexistaient à sa création disposent d’un soutien organique qui sera conservé mais aménagé. Les éléments organiques de la FAR disposent d’une compagnie affectée en temps de paix au 4e Régiment du Matériel. Quant à la 4e Division aéromobile, le format exact de son unité de soutien est en cours de mise au point en liaison avec le commandement de la FAR.
Les « officiers conseils »
Afin de faciliter la reconversion des militaires d’active et l’insertion professionnelle des appelés, l’Armée de terre s’est dotée d’une structure particulière dont les échelons d’exécution sont situés au sein des régions militaires. Dans chacune de celles-ci, elle comporte un officier conseil régional. Par division militaire territoriale nous trouvons un officier conseil divisionnaire et dans toutes les formations comptant plus de 400 militaires du rang est en place un officier conseil du corps. Lorsque la formation comporte moins de 400 militaires du rang, un officier assure ce rôle, en plus de sa fonction principale.
Les officiers conseils divisionnaire et du corps de troupe constituent les rouages essentiels de ce dispositif.
L’officier conseil divisionnaire (OCD) est le représentant unique des armées auprès des organismes civils concernés au sein de la région économique (qui correspond à la division militaire territoriale). Il anime et coordonne les actions des officiers conseils des corps de troupe ; il établit avec les autorités civiles compétentes un plan d’action précisant les modalités pratiques de la coopération entre le service public de l’emploi et les officiers conseils ; il prospecte le marché du travail et les offres en matière de formation professionnelle.
L’officier conseil du corps de troupe est le chef du Bureau de promotion sociale et de reclassement (BPSR) du corps de troupe ; il est l’un des adjoints directs du chef de corps. À ce titre, il est responsable des actions menées en vue de la reconversion et de l’insertion professionnelle qui comportent l’information, l’orientation des intéressés en les aidant à définir un projet professionnel et en les inscrivant auprès des organismes civils compétents pour accéder à une formation ou à un emploi à l’issue du service. L’officier conseil organise l’enseignement (cours de rattrapage scolaire et cours par correspondance). Il anime également les clubs et les ateliers socio-éducatifs (clubs agricole, d’informatique, de musique, etc.). À cet effet il suit individuellement tous les appelés et les engagés pendant toute la durée de leur service actif et travaille en liaison étroite avec les assistantes sociales et les organismes civils responsables de la formation et de l’emploi.
L’impact de l’action des officiers conseils est difficile à mesurer car leur action s’exerce en grande partie dans les domaines de l’orientation individuelle, de l’information, du conseil, de la reconversion. Néanmoins, chaque année, près de 2 500 séances d’information comportant la projection de films et la participation des représentants des services publics et de l’emploi sont organisées par l’armée de terre. Chacune de ces séances touche environ une centaine d’appelés.
Par ailleurs, un effort très net est consenti en faveur des plus défavorisés dans le domaine du savoir. L’enseignement général est destiné aux appelés et engagés concernés (et volontaires) afin de leur permettre, soit de se présenter à un examen scolaire ou professionnel, soit d’accéder aux tests psychotechniques de l’Association pour la formation professionnelle des adultes (AFPA), soit enfin d’acquérir le minimum d’instruction indispensable à toute promotion ultérieure. Ces cours sont dispensés sous forme de séances orales organisées dans les unités, en partie hors des heures normales du service et pendant des horaires de travail habituels dégagés à cet effet. Dans certains cas, après accord avec les représentants locaux de l’Éducation nationale, ils peuvent avoir lieu hors des établissements militaires. Enfin certains jeunes gens ont la possibilité de suivre des cours par correspondance financés par l’armée.
C’est ainsi que plus de 800 classes, regroupant 5 200 militaires, ont fonctionné durant l’année scolaire 1984-1985. Plus de deux mille de ces élèves ont atteint le niveau du certificat d’études primaires (600 ont obtenu ce diplôme) ; les autres, partant d’un niveau encore plus modeste, ont amélioré leurs connaissances et ont été rendus aptes à s’insérer normalement dans la vie sociale. Par ailleurs, 7 500 militaires du contingent ou engagés ont bénéficié d’autres cours sous une forme ou sous une autre (enseignement technique ou secondaire) et 8 600 ont été inscrits à des stages de formation professionnelle pour adultes à l’issue de leur service actif.
L’effort consenti au profit des jeunes gens qui ont manqué leur scolarité est loin d’être négligeable. Ainsi, l’Armée de terre a le souci de la réinsertion sociale et du reclassement de ses personnels. C’est pourquoi les officiers conseils, sur lesquels repose l’essentiel de cette tâche importante sont choisis avec soin parmi les officiers supérieurs et les capitaines anciens ayant une réelle expérience du commandement et le sens des relations humaines.