Armée de terre - Le sport dans l'Armée de terre
Il est bien connu que résistance physique et goût de l’effort comptent au nombre des caractéristiques propres à la formation militaire. C’est la raison pour laquelle, de tout temps, les hommes de guerre se sont inlassablement soumis à un entraînement physique adapté aux conditions de combat du moment.
En 1962, au retour des campagnes d’Algérie, l’Armée de terre retrouve la possibilité de consacrer davantage de temps au sport et l’on voit se multiplier les tournois, compétitions et challenges de toutes sortes. Des efforts, parfois excessifs, sont consentis par certaines formations pour se doter d’« équipes fanions » constituées de jeunes athlètes mis en conditions afin de remporter des victoires et pratiquement déchargés, à cet effet, de tout service réellement militaire. Un tel régime privilégiant une minorité péchait par un réel excès d’élitisme.
Un sport de masse…
Depuis lors, la conception même de l’utilité de la pratique du sport dans l’Armée de terre a évolué. Aujourd’hui la doctrine sportive militaire privilégie l’entraînement de la masse sur celui des athlètes. C’est là une formule heureuse, car il ne servirait à rien de ne disposer que de quelques équipes de champions, destinées à briller dans des rencontres spectacles si les hommes de la section de combat, de l’escadron ou du régiment n’étaient pas en mesure de tenir le rythme exigé par la manœuvre et le combat faute d’une résistance physique suffisante.
L’Armée de terre cherche à développer les qualités physiques nécessaires au combattant par une pratique sportive régulière de tous les personnels, quels que soient leurs grades. Il est banal, de nos jours, de voir le colonel s’entraîner avec ses hommes et participer au milieu d’eux au cross de régiment ou à des demi-marathons. Cela n’était que fait rarissime il y a vingt ans.
Dans chaque régiment se trouve un officier des sports, véritable spécialiste, conseiller technique du chef de corps. Il a pour tâche essentielle de proposer le programme général d’entraînement physique et sportif ; il contrôle la gestion des équipements sportifs et favorise l’essor de clubs de sport (judo, cyclisme, football, rugby, parachutisme, etc.). Il suit l’entraînement et le travail des sous-officiers spécialistes en éducation physique et des moniteurs (jeunes du contingent titulaires du Capes – Certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement du 2nd degré – ou de la maîtrise d’éducation physique sportive). Ceux-ci, répartis dans les unités élémentaires (compagnies, batteries, escadrons) ont pour rôle de développer les connaissances des cadres de contact en matière d’éducation sportive, de diriger les séances de sport faisant appel à de la « technique ». d’organiser les compétitions, les rencontres et les contrôles physiques, enfin de gérer l’infrastructure et le matériel sportifs.
Bien entendu l’entraînement physique est adapté aux missions du corps et aux possibilités initiales des personnels. Il doit donc être mené progressivement. C’est pourquoi le médecin-chef est directement associé à l’élaboration du programme des activités sportives : il détermine la catégorisation des personnels selon leurs aptitudes grâce aux contrôles médico-physiologiques. L’examen des jeunes appelés se fait à l’incorporation, puis entre le 5e et le 7e mois de service. Les cadres d’active subissent des tests sportifs et un contrôle médical tous les deux ans, et annuel à partir de 40 ans.
Il est intéressant de signaler que depuis une quinzaine d’années les aptitudes en athlétisme des jeunes arrivant au service national ont subi une nette amélioration due à la pratique du sport dans les établissements scolaires ou dans les équipes municipales ; par contre leur résistance de fond s’est détériorée (manque d’entraînement à la marche, à la course de longue durée, etc.).
…qui n’exclut pas les compétitions
Au-delà de cette pratique de sport de masse, il demeure qu’une préparation sportive de compétition est maintenue dans le cadre de challenges et tournois interformations lorsque ces disciplines prennent bien en compte la réalité militaire (cross, course d’orientation, pentathlon, tir). Dans cette optique, le Commissariat aux sports militaires (CSM) vient de proposer aux trois armées et à la gendarmerie la création d’un championnat interarmées de tir selon une formule nouvelle, adaptée à tous les personnels : utilisation de l’arme de dotation, tirs de combat, classement individuel unique, et une épreuve combinée, de type triathlon avec par exemple natation, course à pied, tirs ou encore parcours d’obstacles, tirs, course à pied.
Enfin, il faut mentionner les journées « sport-armées-jeunesse » qui annuellement favorisent les échanges sportifs locaux et permettent à la jeunesse de nouer des liens privilégiés avec les armées. En ce qui concerne l’Armée de terre, 450 formations ont, en 1985, organisé de telles journées : celles-ci ont rassemblé quelque 120 000 participants civils.
…ni les élites
Cette chronique se doit de mentionner l’existence de l’École interarmées des sports (EIS). Créée en 1967, celle-ci est établie à Fontainebleau ; elle a une double vocation : former les spécialistes militaires (instructeurs en éducation physique et sportive) au sein d’un bataillon de moniteurs, et entraîner les athlètes de haut niveau au sein du bataillon de Joinville.
La désignation des 500 sportifs retenus pour effectuer leur service militaire au Bataillon de Joinville, ou à l’École militaire de haute montagne (Chamonix), ou encore au Centre sportif équestre est faite par le ministre de la Jeunesse et des Sports à partir des demandes formulées par les fédérations sportives. Cette institution est nécessaire ; il ne fallait pas que les jeunes sportifs de très haut niveau puissent risquer de manquer leur carrière en raison d’une interruption d’un an, entre 18 et 23 ans, moment crucial de l’entraînement, pour cause de Service national. En 1985, 34 disciplines sportives étaient représentées à l’EIS.
Peut-être nos lecteurs ignorent-ils qu’aux Jeux olympiques de Los Angeles (1982), sur les 252 Français sélectionnés, il y avait 33 militaires (2 cadres et 31 appelés), et que sur les 27 médailles obtenues par la France, 11 l’ont été par des sportifs militaires.
Sans même prendre en compte ces athlètes, utilisés par l’Armée pendant la durée de leur service, d’autres militaires, d’active ceux-là, en service dans les formations de l’Armée de terre, se distinguent également très régulièrement. Faudrait-il rappeler que le bateau Angers-Génie militaire, dont l’équipage était totalement fourni par l’Armée de terre et dont le skipper était un colonel en activité, s’est classé 2nd au Tour de France à la voile ? Faudrait-il mentionner la longue liste des militaires se distinguant dans les compétitions nationales et internationales de parachutisme, de tir, d’équitation, d’escrime, de ski, etc, et même dans le Rallye Paris-Dakar ?
Ainsi, faisant l’effort sur le sport de masse, composante nécessaire au maintien de sa capacité opérationnelle, l’Armée de terre a su se ménager les moyens de permettre aux sportifs qui le souhaitent de s’entraîner et d’acquérir un niveau très compétitif. ♦