À Tokyo, en septembre dernier, les Européens ont défendu une position commune face à leurs interlocuteurs américains, et à Nairobi, les ministres des finances des vingt se sont fixé comme échéance de la réforme du système monétaire international la date du 31 juillet 1974. Il est à craindre qu'en dépit de ces accords bien des ambiguïtés et des équivoques ne subsistent quant aux positions tenues et aux objectifs poursuivis de part et d'autre de l'Atlantique.
Après une analyse de la situation monétaire internationale et de ses tendances prévisibles, l'auteur s'attache à élucider ces incertitudes. L'une des plus importantes est celle de la place et du rôle respectifs des Droits de tirage spéciaux et de l'or. Cette question implique de la part des Européens une particulière vigilance s'ils ne veulent pas voir le système des DTS devenir rapidement en fait un étalon-dollar institutionnalisé perpétuant les privilèges actuels dont jouit la devise américaine.
Universitaire, agrégé des facultés de Droit et Sciences économiques et diplômé de l'Institut d'études politiques de Paris, l'auteur a été, de 1967 à fin 1972, vice-président de la Commission unique des communautés européennes et responsable, au sein de la Communauté, des affaires économiques et financières. Il est aujourd'hui professeur à l'Université de Paris I.
Dans le déroulement des négociations commerciales et monétaires internationales engagées depuis 1972, la réunion du Conseil Ministériel du GATT à Tokyo, celle de l’Assemblée du Fonds Monétaire International à Nairobi, en septembre 1973, étaient attendues avec un grand intérêt. Certes, personne ne pouvait espérer des décisions spectaculaires, ni même importantes. Ces rencontres allaient-elles cependant ouvrir des perspectives favorables à la restauration d’un ordre économique et monétaire international nécessaire au développement des échanges internationaux ? Donneraient-elles à la Communauté Économique Européenne l’occasion d’y présenter et d’y soutenir une position commune à tous ses membres ?
À première vue, ces interrogations paraissent avoir reçu des réponses positives. Le Conseil Ministériel du GATT s’est conclu par l’adoption unanime d’un texte de déclaration, où sont énoncés les principes devant guider les négociations commerciales multilatérales. La Communauté avait formulé, dès la fin de juin, sa « conception d’ensemble » à l’égard de ces négociations. À l’occasion de l’Assemblée du Fonds Monétaire International, les ministres des pays membres du Comité des Vingt chargé de préparer la réforme du système monétaire international, ont poursuivi de façon positive leurs échanges de vues ; ils se sont fixé la date limite du 31 juillet 1974 pour parvenir à un accord politique sur cette réforme et ils se déclarent convaincus de pouvoir respecter cette échéance.
Si l’on peut se féliciter du climat de coopération dans lequel se sont tenues ces deux réunions internationales et des décisions de procédure qui y sont intervenues, on ne peut pas cependant considérer que les problèmes de fond, qui concernent l’avenir des relations commerciales et monétaires internationales, soient en voie d’être résolus. On doit encore s’attendre à de longues et difficiles discussions. Comme il serait vain, en l’état actuel des choses, d’en préjuger l’issue, il est plus important et plus utile, d’une part d’analyser les tendances actuelles et prévisibles de la situation monétaire internationale, dont dépend en fin de compte l’évolution des négociations en cours, et d’autre part, de chercher, à la lumière des discussions de Tokyo et de Nairobi, à déterminer la direction que prennent ces négociations et à mesurer l’importance des obstacles qu’il reste à surmonter.