Aéronautique - La formation des pilotes de chasse
Soucieuse de garantir l’exécution de ses missions dans les meilleures conditions d’efficacité et de sécurité, l’Armée de l’air a toujours porté une grande attention à la formation de ses personnels. Plus particulièrement, la formation des pilotes de chasse revêt une importance capitale à une époque où les avions et les armements devenus très complexes, et en nombre limité, doivent opérer dans un environnement toujours plus hostile.
Le propos de cet article est de présenter cette formation des pilotes de chasse dans ses étapes essentielles : la sélection, la formation militaire de l’officier, la formation initiale, l’École de chasse, la transformation opérationnelle, et enfin la progression en unité de combat.
La sélection
Les futurs pilotes de chasse sont issus de deux voies distinctes : la première, celle du concours de l’École de l’air, à Salon-de-Provence, est destinée aux officiers appelés à occuper des postes de responsabilité et de commandement ; la deuxième, celle des Élèves officiers du personnel navigant (EOPN), est destinée aux jeunes gens titulaires du baccalauréat qui désirent faire une carrière de pilote de chasse.
L’investissement que représente la formation impose que les échecs en cours de progression soient aussi réduits que possible, mais la recherche de l’efficacité maximum du combattant aérien reste primordiale. Aussi les critères de sélection sont particulièrement sévères : qualités morales et intellectuelles sans faille, état de santé excellent, régulièrement contrôlé par des centres d’expertises médicales du personnel navigant. S’il y a beaucoup de candidats, il n’y a que peu d’élus. Ainsi, annuellement par la voie EOPN, sur environ 1 500 candidats au départ, seulement 60 obtiendront le brevet de chasse.
La formation militaire de l’officier
Depuis 1979, l’Armée de l’air a décidé que tous les pilotes seraient officiers. Tous les pilotes de chasse, quel que soit leur mode de recrutement, sont avant tout des officiers et instruits dans ce sens. L’instruction militaire est dispensée régulièrement tout le long de la progression. On y apprend les règlements militaires, la discipline, mais aussi les principes de commandement en développant le goût des initiatives et le sens des responsabilités. Régulièrement, les jeunes officiers pilotes sont confrontés à des situations où leur dynamisme et leur motivation sont mis à l’épreuve. Guidés et conseillés par les plus anciens, ils font leurs « premières armes » comme exécutants, puis comme meneurs d’hommes responsables.
Une solide formation militaire ne peut être totale sans une condition physique à toute épreuve. La pratique régulière de sports individuels ou collectifs, parfois à très haut niveau, permet au jeune pilote de chasse, non seulement un grand épanouissement physique et une bonne disponibilité, mais aussi une plus grande résistance aux contraintes physiologiques rencontrées en vol.
La formation initiale
La formation initiale des pilotes de chasse commence, pour ceux qui ont réussi les tests de sélection, par un stage de pronostic en vol sur avion léger Mousquetaire ou Cap 10. À l’issue de ce stage, l’instruction aérienne de base s’effectue au sein des Groupements écoles de Salon-de-Provence ou de Cognac, sur avions biplaces Epsilon et Fouga Magister. Le premier, entré en service en 1984, est un appareil à hélice d’entraînement de début, économique et performant (jusqu’à 380 kilomètres-heure en croisière), le second est un biréacteur léger pouvant dépasser 700 kilomètres-heure mais plus ancien puisqu’en service opérationnel depuis 1956. Les élèves pilotes apprennent le pilotage de base, la voltige aérienne, le vol aux instruments, la navigation et le vol en formation serrée. Bien que la majorité des missions soit contrôlée par un moniteur, les jeunes officiers effectuent quelques vols en solo : ils y acquièrent confiance et maturité.
Parallèlement, une instruction professionnelle théorique portant essentiellement sur l’aérodynamique, la mécanique du vol, la propulsion, l’électronique, la navigation aérienne et la météorologie, est dispensée aux futurs pilotes. Ces cours sont adaptés aux niveaux de recrutement initial des candidats. La langue anglaise est aussi étudiée de façon intense, notamment avec l’aide de laboratoires de langues. Tous les pilotes doivent obligatoirement réussir le certificat militaire de langue parlée.
À la fin de cette phase de formation initiale, les élèves pilotes qui ont réussi aux différents contrôles de fin de phase totalisent environ 150 heures de vol et vont se spécialiser à l’École de chasse.
L’École de chasse
L’École de chasse de Tours est équipée d’avions biplaces-biréacteurs Alpha Jet. Cet avion moderne aux performances tout à fait remarquables (850 kilomètres-heure, plafond 15 000 mètres), se rapproche des futurs avions de combat en service en unités opérationnelles, tout en restant moins complexe et plus économique.
L’instruction aérienne plus poussée permet de perfectionner les jeunes pilotes dans les domaines du pilotage, de la navigation et du vol aux instruments, et de les initier à la manœuvre relative au vol entre plusieurs appareils. Le simulateur de l’avion Alpha Jet, de conception avancée, est systématiquement utilisé pour l’apprentissage du pilotage et de la navigation dans les nuages, ainsi que pour l’étude des pannes susceptibles d’intervenir en vol. Les élèves pilotes sont conseillés et guidés par des moniteurs sur les cas particuliers de pannes en cours de vol et sur l’application des procédures prévues.
La réussite aux examens en vol, dans chacun des domaines aériens étudiés, est sanctionnée par l’obtention du brevet de pilote de chasse. Pour accéder à ce dernier, il aura fallu moins de deux ans, les nouveaux chasseurs brevetés totalisant alors 260 heures de vol. Lors de la remise du brevet, au cours d’une cérémonie militaire officielle, chaque nouveau pilote de chasse est parrainé par un ancien, afin de marquer solennellement l’entrée des jeunes dans la grande famille de la chasse. Mais la formation du pilote de chasse ne s’arrête pas là, d’autres étapes restent encore à franchir.
La transformation opérationnelle
À l’issue de l’obtention du brevet, un stage de transformation opérationnelle à la 8e escadre de chasse de Cazaux permet une initiation aux vols de combat et au tir aérien. L’avion utilisé est encore l’Alpha Jet, mais les domaines d’utilisation changent : manœuvres serrées à plusieurs avions, approche d’interception et de combat aérien, vols très basse altitude, tir aérien air-sol et air-air… En fin de stage, les jeunes pilotes totalisant 320 heures de vol sont prêts à mettre enfin le pied en unité opérationnelle, et voler sur avion de combat : Mirage III, Jaguar, Mirage F1 ou Mirage 2000.
La progression en unité de combat
Il faudra encore trois bonnes années pour franchir les étapes successives de la formation et obtenir l’ultime brevet, celui de chef de patrouille. Au sein des unités de chasse, la progression professionnelle est basée sur une instruction théorique et tactique, mais surtout sur une activité régulière d’entraînement aérien sur avion monoplace ou biplace. Par ailleurs l’utilisation systématique des simulateurs permet d’améliorer la qualité de l’instruction et de rentabiliser les heures de vol. Le pilote de chasse, parvenu au brevet de chef de patrouille, totalise environ 1 000 heures de vol. Il est alors apte à toutes les missions opérationnelles de son unité, dans les conditions les plus sévères.
Conclusion
En abordant la carrière opérationnelle, les pilotes de chasse possèdent une expérience aérienne variée et de qualité, leur permettant de progresser rapidement en escadron puis d’accéder à des postes de responsabilité et de commandement opérationnels.
De nombreux contrats sont signés entre l’Armée de l’air et d’autres armées, Marine nationale et Armées de l’air étrangères, pour la formation de leurs propres pilotes. Ces contrats témoignent de l’efficacité de l’instruction dispensée et de la confiance accordée à l’Armée de l’air. Celle-ci participe plus que jamais à la crédibilité de nos forces armées.
Grâce à ses efforts constants pour adapter la formation des pilotes à ses besoins et à l’évolution technologique de notre époque, l’Armée de l’air est en mesure d’assurer pleinement les missions qui lui sont confiées. Par la qualité des appareils en service, mais aussi et surtout par celle des hommes qui les mettent en œuvre, elle a la capacité d’intervenir rapidement, efficacement et à n’importe quel moment, au-delà des frontières s’il en est besoin. Elle a su le prouver à maintes reprises.