Afrique - Maroc : les limites d'un État qui n'accepte pas ses frontières
Maroc : les limites d’un état qui n’accepte pas ses frontières
Deux États maghrébins n’acceptent pas les frontières définies par le Traité de Berlin de 1895 et les accords bilatéraux que les puissances coloniales ont signés entre elles par la suite. La Libye conteste sa frontière avec le Tchad et l’Algérie, mais c’est surtout le Maroc qui, au nom de traditions religieuses et historiques, n’admet pas d’être maintenu dans les limites fixées arbitrairement par un État européen et concernant des pays qui, en dehors des enclaves espagnoles, étaient placés sous la tutelle de cet État. Les revendications de Rabat touchant ses limites sont donc en contradiction avec un des principes fondamentaux de l’Organisation de l’unité africaine (OUA) : celui de l’intangibilité des frontières héritées de la colonisation.
Ces revendications ont été cependant de deux sortes. La récupération des enclaves espagnoles qui, comme Ifni, Tarfaya, le Rif, étaient restées sous l’influence religieuse directe de Rabat s’est faite progressivement et à peu près sans heurt, les villes peuplées en majorité d’Espagnols comme Melilla et Sebta (Ceuta) demeurant sous la dépendance de Madrid. En revanche, chaque libération d’un territoire limitrophe du Maroc a fait l’objet de revendications partielles ou totales de la part, soit du gouvernement marocain, soit de partis politiques qui, à l’instar de l’Istiqlal [indépendance], se montrent souvent plus soucieux des intérêts de la dynastie alaouite que le souverain lui-même. Le professeur Brahim Boutaleb, en montrant comment, à partir des Saadiens, le « Maghreb » hispano-africain du monde musulman était devenu le « Maroc », et en voulant expliquer un tel changement psychologique, emploie une formule très parlante : « Nos limites géopolitiques – écrit-il – imprécises par excès pendant le Moyen-Âge sont devenues imprécises par défaut depuis le XVIe siècle ».
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