La réserve est aujourd’hui l’objet d’une attention toute particulière. Tout autant que sur sa perception, c’est aussi sur l’organisation de son instruction qu’il faut agir : deux axes sur lesquels les efforts sont en voie de définition.
Armée de terre - Pour une meilleure réserve
Dans l’esprit du plan de valorisation de la mobilisation, la 107e Brigade de zone conduit une expérimentation dont la première ébauche s’est traduite lors de sa convocation du 6 au 10 juin 1990. Son but était de répondre à un constat où il apparaissait que les cadres de contact issus de la réserve ne réunissaient pas toujours les compétences techniques nécessaires à leur emploi, cela étant dû à des limites structurelles quant à l’efficacité de leur instruction.
Instruction centralisée
Trop souvent, les postes tenus par les cadres du contingent pendant leur service national sont trop éloignés des exigences de la mobilisation : les unités préfèrent utiliser les compétences civiles de chacun au détriment du long terme. Ensuite, le fractionnement de l’instruction lors des convocations, dont la durée moyenne est de 36 heures, nuit à son efficacité tout comme l’absentéisme se traduisant par un manque de progressivité et d’homogénéité dans l’entretien des savoir-faire. Aussi, une réorganisation totale de l’instruction et de l’entraînement est menée actuellement au sein de la brigade, à titre expérimental.
La responsabilité de l’instruction est tout d’abord entièrement déléguée à son commandant, alors qu’elle est encore trop souvent répartie, dans les faits, entre la « chaîne réserve » et celle de « corps supports » dont les unités de réserve sont dérivées. La priorité est ensuite nettement définie au profit des cadres de contact, chefs de groupe, chefs de section et commandants d’unité élémentaire. Les efforts sont également concentrés dans le temps par l’organisation de périodes de plusieurs jours. Enfin, l’instruction est spécialisée par niveaux de commandement et par chaînes fonctionnelles reliant la brigade aux régiments (opérations, renseignement, soutien…).
Niveau et spécialité
Ces principes se sont traduits concrètement en 1990 par l’établissement, au niveau de la brigade, d’un plan d’action sur 5 ans et d’une directive annuelle pour l’instruction et l’entraînement. Celle-ci fixait une seule mission collective par type d’unité élémentaire, ainsi qu’un catalogue de savoir-faire individuels correspondant à chaque fonction et nécessaire à l’accomplissement de la mission collective ; elle définissait, en outre, les principes d’organisation de la période d’instruction groupée.
Celle-ci s’est déroulée au camp du Valdahon (Doubs, Bourgogne) du 6 au 10 juin et concernait les cadres de contact des 10e chasseurs, 23e et 149e RI, 157e et 167e compagnies du génie. 77 officiers sur 96 convoqués, 123 sous-officiers sur 215, étaient présents. Ils furent répartis en brigades d’instruction homogènes par niveau de commandement et par spécialité, chacune étant encadrée par des instructeurs d’active, secondés par des adjoints réservistes qualifiés, provenant des corps dérivants ou parrains. Cette méthode se substituait à l’instruction menée habituellement d’une façon autonome au sein de chaque unité.
Par ailleurs, chaque chef de corps assurait la responsabilité d’un groupement d’instruction par spécialité (blindés et SER, combat d’infanterie, appuis et génie). Les programmes d’instruction étaient organisés en séances regroupant, au sein de chaque brigade, un savoir-faire tactique et 3 ou 4 savoir-faire techniques.
La convocation s’est achevée par un exercice de contrôle destiné à évaluer le degré d’aptitude au commandement des cadres, au cours duquel chacun a réellement commandé pendant plusieurs heures une formation de son niveau et de sa spécialité, dans l’exécution d’une mission élémentaire simple.
Un bilan très positif a pu être établi en toute objectivité à l’issue de cette convocation, tant sur le plan de l’amélioration de la compétence de chacun que sur celui de la cohésion. Il faut noter également que son coût, en temps et en personnels d’active, a été globalement moins important que celui d’activités fractionnées tout au long de l’année.
Réserve et entreprises
Toutefois, une telle action ne peut s’inscrire que dans la continuité, ce qui implique une grande stabilité des cadres de réserve dans leur affectation ainsi que leur présence effective à chaque convocation. Il importe, pour cela, que le réserviste soit reconnu en tant que tel au sein de son entreprise, ce qui n’est pas suffisamment le cas aujourd’hui. Des propositions ont été faites en ce sens par le conseil d’étude des réserves, dont un comité s’est penché particulièrement sur cette question, afin de mieux informer les entreprises sur les exigences de la mobilisation et de les amener à mieux collaborer avec les structures de réserve des armées.
A été soulevée notamment l’opportunité de créer, au sein des sociétés les plus importantes, un poste de « correspondant réserve » qui jouerait un rôle d’interface. Chaque entreprise pourrait également être informée sur la situation militaire de ses collaborateurs et sur le type de formation reçue dans le cadre des convocations. Il est en effet notable que celle-ci est souvent directement utilisable dans les emplois civils, dans le domaine logistique par exemple, ou plus généralement dans celui du commandement : une façon de faire percevoir ces convocations comme autre chose qu’un simple manque à gagner pour les employeurs. L’idée de fournir à l’entreprise un remplaçant à certains personnels convoqués, dont l’absence serait considérée comme très préjudiciable, a été également avancée ; ce remplaçant pourrait être un cadre d’active sur le point de se reconvertir.
Médiatisation
Comme on le voit, les domaines d’exploration sont vastes. De toutes façons, les mesures retenues devraient être l’objet d’une vaste entreprise de communication afin de rendre aux réservistes toute la considération à laquelle ils ont droit. Dans ce but, il importe que les possibilités de médiatisation des convocations soient prises en compte dès leur conception. Faire manœuvrer les unités de réserve dans les villes, là d’ailleurs où elles pourraient être amenées à agir en cas de conflit, serait à ce titre judicieux. Force est de constater, en effet, que le réserviste demeure aujourd’hui un grand inconnu pour l’opinion. Son image ne peut demeurer plus longtemps à la remorque de ce que l’on attend effectivement de lui. ♦