Armée de terre - Le Service militaire adapté (SMA) : l'exemple de La Réunion
Dans l’exécution de leurs missions outre-mer, les militaires français et notamment ceux des troupes de Marine ont toujours participé, avec leurs moyens propres, au développement des territoires dans lesquels ils étaient implantés. L’une de leurs figures les plus marquantes, le maréchal Gallieni, s’est non seulement illustrée comme soldat, mais aussi – peut-être même surtout – comme bâtisseur et administrateur, notamment à Madagascar.
Aussi est-ce tout naturellement que les troupes servant aujourd’hui en océan Indien, à La Réunion et à Mayotte perpétuent en quelque sorte son œuvre dans cette partie du monde, mais dans le cadre d’une organisation tout à fait spécifique : le Service militaire adapté (SMA). Dépendant à la fois du ministère des Départements et territoires d’outre-mer (DOM-TOM) et de celui de la Défense, le SMA, dont la première unité a vu le jour en 1961, compte aujourd’hui quelque 4 000 officiers, sous-officiers et militaires du rang. Plus de la moitié d’entre eux proviennent des troupes de Marine.
Chantiers écoles
Ils se répartissent sur l’ensemble des DOM-TOM pour donner aux jeunes gens, parmi les plus défavorisés de ces régions, une formation professionnelle dans le cadre de leur service national, adaptée aux contextes locaux afin de faciliter leur insertion dans le monde du travail et de limiter, par là même, un chômage toujours important dans ces régions.
Cette formation est dispensée non seulement en ateliers au sein des unités, mais aussi sur des chantiers écoles. Ceux-ci permettent d’atteindre un double but : fournir un champ d’application à cette formation et réaliser des travaux utiles à l’économie des départements. Ces chantiers sont effectués à la demande des préfets en prenant soin de ne pas concurrencer les entreprises civiles, et sont financés par l’État ou les collectivités locales. Le SMA a ainsi réalisé, depuis sa création, des dizaines de chantiers : pistes, terrains d’aviation, déblaiement, ponts, logements sociaux, déforestage… De nombreux tronçons de routes pénétrant aujourd’hui La Réunion ont été tracés par le 4e RSMA au prix de véritables prouesses techniques dues à l’escarpement des régions qu’elles traversent.
Créé en 1965, le centre militaire de perfectionnement de La Réunion a pris la dénomination de 4e bataillon du SMA de La Réunion en 1969. Ce n’est que le 1er juillet 1976 qu’il est devenu régiment avec ses 600 personnels. Implanté dès le début à Saint-Pierre et à Saint-Denis, et également à Mayotte depuis février 1989, le 4e RSMA a élargi au fil des années l’éventail de ses formations, celle initiale des conducteurs d’engins de travaux publics correspondant à un besoin du moment puisqu’il s’agissait alors de désenclaver de vastes régions de l’île. Elle est complétée aujourd’hui par une préformation professionnelle dans les techniques du bâtiment et de l’agriculture.
Les différentes formations sont sanctionnées en fin de service en fonction des niveaux généraux des appelés. Ceux d’un niveau très faible sont conduits jusqu’à l’aptitude aux tests de l’AFPA (Association nationale pour la formation professionnelle des adultes). D’autres peuvent obtenir des unités de valeur du brevet professionnel agricole. Certains, d’un niveau général supérieur à 7, reçoivent un complément de formation dans le domaine de l’informatique, de la gestion artisanale ou encore de la dactylographie.
Nouvelles filières
Aujourd’hui, le 4e RSMA est parvenu à une homogénéité de ses structures puisque chaque compagnie de travaux école assure une mission bien spécifique : bâtiment, agriculture ou conducteurs d’engins. Cette homogénéité n’est cependant pas une fin en soi car il convient, même si l’organisation doit en souffrir, de suivre au plus près l’évolution des besoins de l’île en matière d’emploi. Cela implique la mise sur pied de nouvelles filières dans chacun des trois domaines de formation et par voie de conséquence l’adaptation continue des matériels et des installations, de l’encadrement et des procédures pédagogiques. L’unité « technique du bâtiment » a ainsi récemment lancé les filières « aluminium » et « boisage », tandis qu’elle révisait à la baisse les effectifs de la filière « maçonnerie » pour répondre à l’évolution des besoins du secteur.
Les grandes orientations retenues pour le développement de La Réunion sont évidemment prises en compte. L’étude actuelle d’un stage « électricité solaire » est, à ce titre, significative du souci de s’adapter aux réalités. Pour ce qui est de l’agriculture, l’effort s’oriente vers la formation avicole, mais rien n’exclut, à court terme, l’aquaculture par exemple. Là encore, le premier objectif est de répondre aux besoins locaux et aux grandes orientations. L’Opération intégrée de développement (OID) prévoit en 10 ans la mise en valeur de quelque 10 000 hectares dans l’ouest de l’île et s’annonce riche d’espoir. Il faut noter également que le RSMAR a le monopole de la formation des conducteurs d’engins sur l’île : une charge lourde de responsabilités qui implique de prévoir les évolutions technologiques et même, si possible, de les précéder.
Compte tenu de la nécessaire déconcentration liée à l’éloignement géographique, la compagnie de Mayotte est, elle, polyvalente. On y enseigne l’agriculture et les techniques du second œuvre du bâtiment, après les deux mois de formation élémentaire toutes armes à l’instar de ce qui se fait dans toutes les autres unités.
Formation militaire
Ce serait en effet une erreur de ne voir dans les régiments du SMA que de simples lycées professionnels où professeurs et élèves seraient en uniforme. La formation militaire n’est pas oubliée, car ces unités devraient fournir, le cas échéant, les combattants dont les départements d’outre-mer pourraient avoir besoin dans le cadre de l’exécution des plans de défense ou de protection.
Ce mélange au dosage alchimique entre formations militaire et professionnelle fait toute l’originalité de ces étonnantes unités et aussi leur succès, qualités que certains pays africains considèrent aujourd’hui avec beaucoup d’intérêt.
Les unités du SMA dans le monde
1er RSMA : Martinique
2e RSMA : Guadeloupe
3e RSMA et Groupement du SMA de Saint-Jean-du-Maroni : Guyane
4e RSMA : La Réunion (dont une compagnie à Mayotte)
Une compagnie : Nouvelle-Calédonie
Une compagnie : Polynésie ♦