Armée de terre - Instruction : accompagner les évolutions
La décennie 1990 sera marquée par l’émergence de systèmes d’armes de haute technologie mis en œuvre par des hommes qui devront être capables d’en utiliser toutes les possibilités. Ce constat impose à l’Armée de terre de disposer d’un système de formation rénové dans sa conception et modernisé dans ses moyens.
Pour s’adapter à l’évolution très rapide des structures et des techniques, l’Armée de terre porte aujourd’hui un effort tout particulier sur l’instruction des cadres. Leur formation collective, notamment, sera renforcée dans le domaine opérationnel. Elle sera dispensée dans les centres tactiques implantés en écoles d’application où la simulation prendra une importance grandissante par le biais des jeux de guerre, déjà largement utilisés dans le contexte de l’enseignement militaire supérieur. Elle aura aussi pour objectif de leur faire découvrir de nouveaux horizons, afin de diversifier leurs capacités et de renforcer leur cohésion. Cet effort sur la formation des cadres doit constituer l’objectif essentiel de la période de remise en condition prévue dans la Disponibilité opérationnelle différenciée (1).
Rationaliser l’instruction
Quant à l’instruction des appelés, la DOD permettra de dispenser un enseignement mieux structuré, grâce à une permanence des effectifs obtenue par l’homogénéité des contingents dans chaque unité élémentaire et par la protection de l’instruction, permise par la présence d’éléments spécialisés dans la protection des installations régimentaires.
L’optimisation de ce système sera obtenue par la création ou le renforcement de centres spécialisés disposant de cadres experts et de moyens pédagogiques faisant largement appel à l’enseignement assisté par ordinateur et à la simulation. Les exemples les plus marquants en seront les nouveaux centres d’instruction école de conduite ou le futur centre d’entraînement au combat interarmes. Les cycles d’instruction seront explicités dans un document unique, édité par chaque arme, précisant les connaissances à acquérir par niveau et les modalités d’évaluation. La planification des activités dans les centres spécialisés et la volonté d’évaluer systématiquement le niveau réellement atteint entraîneront une gestion du temps affinée et rigoureuse visant à réaliser des programmes aussi cohérents que possible.
Instruction modernisée
L’instruction sera non seulement modernisée dans son organisation mais aussi dans et par ses moyens. Les systèmes de simulation en cours de développement sont cohérents avec les systèmes d’armes modernes. Leur complexité nécessite la mise en place de plusieurs simulateurs spécifiques permettant la formation et l’entraînement dans une fonction déterminée du « système d’arme », l’ensemble constituant à lui seul un véritable « système de combat » servi par un « système d’hommes ». Ce sera notamment le cas du char Leclerc ou de l’hélicoptère HAP-HAC [NDLR 2023 : Tigre]. Cette approche des armes futures en termes de « systèmes » est étendue aux ensembles déjà existants, comme celui des armes légères d’infanterie.
Il faut d’ailleurs noter que les progrès technologiques appliqués aux futurs armements le seront également aux simulateurs adaptés en utilisant de plus en plus la génération synthétique d’image, l’intelligence artificielle, le mouvement 3 axes, ou encore le laser. Le Simulateur d’entraînement d’équipage (SEE) va être ainsi le premier simulateur de synthèse pour char existant au monde. Ces différents moyens vont permettre une instruction plus attractive, plus rationnelle, plus réaliste, et donc plus rentable en termes de coûts grâce aux investissements considérables engagés et prévus.
Instruction plus rentable
La formation des équipages ou des groupes de combat en salle dans des conditions nouvelles permettra de corriger plus rapidement les erreurs. La représentation de tous les acteurs, de tous les types de tir, de toutes les composantes du combat (logistique ou tactique) et la nécessité de réagir en temps réel reproduiront même certaines situations de stress spécifiques à tout type d’engagement.
La simulation permettra d’optimiser ainsi les sorties sur le terrain, au cours desquelles seront également utilisés des simulateurs transportables, leur donnant plus de réalisme. La simulation n’est pas, en effet, une fin en soi ; elle ne se substitue pas aux formes traditionnelles d’instruction en vraie grandeur, mais vise à préparer d’une manière optimale l’utilisation réelle des systèmes d’armes.
Ainsi valorisées, les sorties « terrain », qui s’effectueront avec des personnels maîtrisant déjà leur système d’arme, pourront être adaptées aux coûts croissants des munitions et de l’entretien programmé des matériels, ainsi qu’aux exigences nouvelles en surface de terrain de manœuvre et de champ de tir. Cette meilleure utilisation des moyens devrait engendrer des économies, permettant d’amortir en 5 ans en moyenne les investissements en simulateurs consentis aujourd’hui par l’Armée de terre.
Il faut enfin souligner le véritable engouement des personnels pour ce nouveau type d’instruction. Le nombre de projets d’amélioration de systèmes déjà existants ou de propositions de systèmes nouveaux reçus par la mission « Innovation » est à ce titre très révélateur. Fin 1991, six de ces innovations participatives concernant la simulation avaient toutes les chances d’être appliquées dans l’ensemble de l’Armée de terre, lors des années à venir.
Note préliminaire : Ce texte paraîtra dans un dossier de la revue Armées d’aujourd’hui, en mars.
(1) Chronique « Armée de terre » de janvier 1992.