Aéronautique - Le groupement des fusiliers commandos de l'Air et les opération spéciales
Héritiers des premiers parachutistes des armées françaises ayant donné naissance aux troupes aéroportées de l’Armée de terre, le Groupement des fusiliers commandos de l’air (GFCA) rassemble sous son autorité : les fusiliers commandos de l’air chargés de la défense des bases et points sensibles de l’Armée de l’air, les fusiliers commandos ayant vocation d’intervention ou d’actions spécifiques avec utilisation optimale de la troisième dimension.
Il y a un peu moins d’un an était décidée par arrêté du 24 juin 1992 la création du Commandement des opérations spéciales (COS). Ce commandement interarmées, placé sous l’autorité directe du Chef d’état-major des armées (Céma), est chargé de planifier, de coordonner et de conduire des actions menées par des unités des forces armées spécialement organisées, entraînées et équipées. À ce titre, il aura à utiliser les compétences particulières du GFCA dans ses domaines d’excellence que cet article se propose de faire connaître.
Un concept nouveau : les opérations spéciales
Les actions dont le COS est chargé diffèrent des actions habituellement menées par les armées du fait des techniques employées et de l’environnement particulier dans lequel elles se situent. Elles peuvent être conduites en temps de paix, de crise ou de guerre de façon indépendante ou en coordination avec des opérations menées par d’autres forces.
La gamme des situations possibles est très variable : les missions peuvent aller de l’assistance ou du soutien d’éléments sur le terrain à la neutralisation de forces adverses. Diverses et imprévisibles, elles nécessitent l’emploi de moyens limités, mais entraînés de longue date à réagir avec rapidité et discrétion. Le but est en effet d’intervenir le plus tôt possible sans être paralysé par la mise en œuvre de moyens lourds qui nécessite toujours des délais importants. C’est le concept de « traitement avancé » de la crise qui conduit à utiliser des moyens relativement légers mais bien adaptés à chaque situation. Les éléments concernés doivent donc répondre à des critères d’excellence grâce à leur spécialisation et à l’utilisation de techniques avancées.
Pour l’accomplissement de sa mission, le COS ne dispose pas de forces qui lui soient affectées en propre. Il doit donc faire appel aux formations des armées présentant les caractéristiques et les aptitudes spécifiques adaptées. Parmi ces unités, certaines sont plus particulièrement dédiées à ce type d’opérations pour constituer le noyau dur des forces spéciales. Pour l’Armée de l’air, il s’agit au sein du GFCA des moyens spécialisés à vocation aéronautique qui sont, dans le domaine de la défense ou de l’attaque de bases aériennes ou d’installations aéronautiques, l’équivalent des unités de commandos marine pour les ports ou le domaine maritime.
Une nécessaire professionnalisation
La création de commandos issus de la restructuration du Groupement d’instruction et d’intervention des commandos de l’air (GIICA), héritiers des Commandos parachutistes de l’air 10 et 40 (CPA), répond à l’évolution récente des missions. Les enseignements des opérations extérieures et en particulier de la guerre du Golfe conduisent en effet à impliquer davantage les fusiliers commandos de l’air dans les missions liées à la troisième dimension, qui nécessitent la maîtrise d’une technicité particulière.
Seules des unités professionnelles sont susceptibles d’acquérir et surtout de conserver le niveau de technicité aéronautique requis. Le CPA 10, tout particulièrement dédié à ce type d’opérations, est donc composé en totalité d’engagés, les « militaires du rang techniciens » remplaçant désormais les Volontaires service long (VSL). Le CPA 40, unité parachutiste également, est lui aussi en cours de professionnalisation. À terme, 240 emplois d’appelés seront ainsi transformés en engagés pour permettre aux commandos de remplir les missions nouvelles très spécialisées qui leur sont confiées.
Des missions aéronautiques très spécialisées
D’ores et déjà, le Chef d’état-major de l’Armée de l’air (CÉMAA) a décidé de confier au GFCA quatre missions touchant directement le domaine aéronautique.
La SAR
Parmi ces missions, la SAR (Search and Rescue) revêt une importance essentielle pour l’activité de l’aviation de combat.
Totalement intégré à la manœuvre aérienne, ce type d’opérations impose un haut niveau d’entraînement et fait l’objet d’améliorations permanentes. Deux modes d’action différents peuvent être appliqués, chacun faisant intervenir des équipes de fusiliers commandos.
Le premier de ces modes d’action consiste à faire intervenir un hélicoptère SAR pour assurer la recherche et le sauvetage d’un pilote éjecté en zone hostile. Cet appareil, doté d’équipements très spécialisés, comprend dans son équipage des fusiliers commandos aptes à mettre en service l’armement d’autoprotection et à assurer éventuellement la sécurité du rescapé au cours de l’opération de récupération. Les Puma SAR du Commandement du transport aérien militaire (Cotam) ont été équipés pour répondre à ce besoin : les fusiliers commandos participent aux missions SAR de ces appareils. En Arabie saoudite, dans l’opération Southern Watch, cette mission est prise en compte par les Sikorsky HH-60G Pave Hawk du 66e Air Rescue Squadron de l’Armée de l’air américaine.
Le second mode d’action envisageable en opération SAR est le parachutage, auprès du pilote (ou de l’équipage) éjecté en zone hostile, de matériel de survie et d’une équipe de personnel spécialisé. Cette dernière, constituée en grande partie de fusiliers commandos parachutistes, possède le savoir-faire pour repérer, rejoindre, secourir, protéger ou exfiltrer un ou plusieurs membres d’un équipage abattu, dans ou en arrière des lignes ennemies, de jour comme de nuit. Pour ces opérations, totalement intégrées à la manœuvre aérienne, le CPA 10 dispose de chuteurs opérationnels utilisant des parachutes de type aile ou tandem pour pouvoir mettre à terre du personnel spécialisé mais non parachutiste (médecin par exemple). Il doit disposer également de matériel adapté : balises de repérage par satellite, moyens radios discrets utilisables également pour les autres missions spécialisées.
La reconnaissance de terrain
La deuxième mission confiée aux chuteurs opérationnels est la reconnaissance et le balisage de terrain. Il s’agit tout d’abord d’être capable de sélectionner un terrain d’atterrissage pour hélicoptère ou avion de transport, d’en tester la résistance, de le préparer, de le baliser et d’y faire poser un aéronef. En plus des moyens de communication spécialisés, l’équipe de reconnaissance (1 officier et 7 sous-officiers) dispose de télémètres, pénétromètres à chocs et moyens de terrassement sommaires.
Outre la reconnaissance de terrain proprement dite, il s’agit également d’être capable d’investir et de contrôler un aérodrome aménagé, abandonné ou tenu par l’ennemi pour le remettre en service sommairement ou le détruire. Les fusiliers commandos de l’air sont en effet les spécialistes tout désignés pour ce genre de mission, qui nécessite une connaissance détaillée des points névralgiques tels que générateur électrique, soute à carburant, tour de contrôle, moyens d’aide à la navigation…
Le marquage d’objectifs
La troisième mission dans laquelle sont mis à profit le savoir-faire et la discrétion des chuteurs opérationnels est la désignation d’objectifs pour les avions de combat. La technique employée, déjà développée dans les forces armées américaines et britanniques, est celle du marquage laser : un opérateur au sol, préalablement largué, reconnaît la cible et la marque ; l’appareil chargé de détruire l’objectif utilise le rayonnement réfléchi et peut ainsi délivrer son armement avec précision, qu’il soit classique ou à guidage laser.
La discrétion d’une opération de ce type doit être assurée par une préparation minutieuse permettant de se dispenser de tout dialogue radio inutile avec le pilote. Le codage du faisceau laser permet par ailleurs d’éviter son brouillage ou sa déception.
La livraison par air
La dernière mission spécialisée confiée aux fusiliers commandos de l’air est la livraison par air. Il s’agit d’être capable de délivrer par air tout type de colis pour les besoins spécifiques immédiats de l’Armée de l’air.
Pour répondre à ce besoin, il est nécessaire de former des équipes d’arrimeurs largueurs et des spécialistes de l’éjection des charges et du largage par gravité et à très faible hauteur. Une trentaine de fusiliers commandos sont concernés.
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En conclusion, la professionnalisation des fusiliers commandos de l’air, l’acquisition et la mise en pratique de nouveaux savoir-faire très spécialisés permettent à l’Armée de l’air de renforcer la cohérence de ses moyens. Disposant désormais d’équipes homogènes, rompues aux procédures air, elle peut mener des opérations en « coup complet », parfaitement intégrées à la manœuvre aérienne lorsque celle-ci est utilisée comme mode d’action unique ou prépondérant.
Dans le cas d’opérations interarmées mettant en œuvre toutes les composantes, le savoir-faire des fusiliers commandos de l’air prend place normalement et utilement à côté de celui des autres composantes des forces. ♦