Gendarmerie - Le recrutement et la formation des appelés dans la Gendarmerie
Dans le prolongement de la précédente chronique consacrée, à propos de la parution du rapport Balkany, au service national, il est apparu nécessaire d’apporter sur ce dossier dont l’importance n’est plus à souligner certaines précisions concernant, plus particulièrement, les modalités actuelles de recrutement et de formation des appelés dans la gendarmerie.
Pour accomplir ses obligations militaires dans ce corps, il existe un certain nombre de conditions, au rang desquelles figurent, outre le fait d’être volontaire et de faire acte de candidature (1) : être de nationalité française, avoir 18 ans au moins (de 18 à 29 ans au plus pour les gendarmes auxiliaires féminins), être de bonne moralité, avoir un niveau général et scolaire suffisant, ne pas être titulaire d’un brevet de préparation militaire supérieur, être apte physiquement et médicalement, avoir la taille minimale de 1,68 m (1,50 m pour les gendarmes auxiliaires féminins), avoir l’aptitude au port et à l’usage de l’arme. À ces conditions générales, il convient d’ajouter, pour ce qui est des candidats élèves officiers de réserve, la possession d’un diplôme de l’enseignement supérieur (niveau bac + 4), les candidats présélectionnés par la direction générale de la gendarmerie étant reçus pour un entretien par le commandant du groupement de gendarmerie départementale de leur domicile.
Après avoir connu, entre 1983 et 1990, une diminution constante du nombre de candidatures (de 20 743 à 14 397), d’autant plus préoccupante qu’elle s’effectuait simultanément avec une augmentation des effectifs budgétaires (de 8 791 à 10 233), la gendarmerie a engagé depuis une politique volontariste dans le recrutement des gendarmes auxiliaires. Jusqu’au début des années 90, cette institution ne comptait, en effet, que sur ses brigades territoriales pour promouvoir le service national dans ses formations, une affiche apposée dans les locaux de service, la détection et quelques conseils judicieux aux candidats potentiels étant considérés comme suffisants pour obtenir chaque année le contingent nécessaire de gendarmes auxiliaires. Sans remettre en cause le rôle prépondérant des brigades, la gendarmerie a cependant pris conscience des limites de ce système, qui se révélait relativement inefficace dans les villes et leurs banlieues, dans lesquelles, compte tenu de la répartition des compétences concernant la sécurité publique, les gendarmes n’entretiennent pas ou peu de relations avec la population. Ce phénomène est également à mettre en relation avec l’institution, en 1985, d’un service national dans la police (2), ce qui a introduit une situation de concurrence en ce domaine, puisque, jusqu’à cette période, les jeunes gens se destinant à la carrière de gendarme ou de policier n’avaient d’autre solution, pour découvrir et côtoyer, à l’occasion de leurs douze mois de service, les missions de police et de sécurité, que d’endosser l’uniforme des gendarmes auxiliaires.
Afin d’inverser cette tendance déflationniste, diverses actions ont été conduites, parmi lesquelles le lancement de campagnes de promotion dans la presse nationale et régionale, la diffusion d’affiches et de brochures, la mise en place d’un serveur Minitel (3614 code gendarme), l’ouverture d’une douzaine de centres d’information et de recrutement, le renforcement de la présence dans les centres de sélection (un sous-officier et deux gendarmes auxiliaires étant désormais affectés dans chacun des dix centres) et la mise en œuvre de mesures destinées à rendre plus attractif le service national (comme l’adoption d’une nouvelle procédure d’affectation, reposant sur le classement de fin de formation, les spécialités et les desiderata exprimés par les appelés, ce qui a permis d’affecter en moyenne 80 % de chaque contingent à moins de cent kilomètres du domicile ou du lieu d’affectation souhaité). Toutes ces mesures ont rapidement porté leurs fruits et, depuis 1991, le nombre de candidatures n’a cessé d’augmenter : de 18 004 (1991) à 27 274 (1994), cette variation quantitative s’accompagnant d’une augmentation du niveau général et scolaire, de sorte qu’environ quatre gendarmes auxiliaires sur cinq sont, à l’heure actuelle, titulaires du baccalauréat ou d’un diplôme supérieur.
Dans le même temps, et compte tenu de la réduction, en 1991, de la durée légale du service national à dix mois, la formation initiale des gendarmes auxiliaires a connu de profondes modifications. Dispensée dans les Ciga (centres d’instruction des gendarmes auxiliaires) d’Auxerre, Saint-Astier-Bergerac, Tulle et Montargis, cette formation est désormais d’un mois (contre trois antérieurement) (3), durant lequel les appelés reçoivent une instruction militaire de base et une formation spécialisée (4), auquel s’ajoute un mois supplémentaire pour les élèves brigadiers (gendarmes auxiliaires de seconde classe les mieux classés et volontaires, nommés à ce grade au terme des deux mois et qui peuvent accéder à ceux de brigadier-chef et de maréchal des logis, les autres gendarmes auxiliaires ne pouvant prétendre, quant à eux, qu’à la distinction de première classe). Cette formation initiale est ensuite complétée et prolongée, dans les unités d’affectation, par une formation complémentaire de douze jours répartis sur les neuf autres mois de service. Quant à la scolarité des élèves officiers de réserve, elle comprend quatre mois de formation dispensée à l’École des officiers de la gendarmerie (EOGN) de Melun, le cycle d’instruction se répartissant en deux phases successives de deux mois chacune : une phase probatoire, pendant laquelle l’élève officier reçoit une instruction militaire générale ainsi qu’une formation d’ensemble sur la gendarmerie ; une phase complémentaire, dont l’objet est la préparation de l’élève officier à ses fonctions en état-major, en centre opérationnel ou en centre d’instruction des gendarmes auxiliaires (5).
Il convient enfin d’indiquer que, jusqu’à récemment, les appelés ayant souscrit un volontariat service long (VSL) de deux à quatorze mois au-delà de la durée légale, ne disposaient pas de formations particulières, si ce n’est la participation aux séances d’instruction collective organisées dans leurs unités. Afin de remédier à cette situation, mais aussi de favoriser l’insertion professionnelle des gendar-mes auxiliaires, qui, pour une part importante d’entre eux, quittent définitivement l’uniforme plus ou moins de leur plein gré au terme du service national, diverses initiatives ont été engagées ces dernières années. Ainsi, la gendarmerie a-t-elle signé, le 1er mars 1996, une convention avec l’Union fédérale des industries et services de sécurité (Ufiss), précisant les conditions de mise en place d’un stage destiné à compléter la formation militaire et spécialisée des gendarmes auxiliaires, de manière à faciliter leur insertion professionnelle dans les métiers de la sécurité privée. Ce type de formation (d’une durée de 40 heures réparties en trois modules : législation-réglementation ; règles de sécurité ; sécurité-incendie), qui s’adresse aux volontaires ayant souscrit un VSL d’au moins six mois, sera sanctionné par un examen professionnel permettant d’obtenir un « certificat d’agent de sécurité » reconnu par l’Ufiss (organisme qui représente environ 80 % des entreprises de sécurité privée).
Au-delà des appelés effectivement recrutés au terme de leur service national en tant qu’officiers, sous-officiers et personnels militaires de la spécialité EAEM (emplois administratifs et d’état-major), l’insertion professionnelle des gendar-mes auxiliaires et aspirants rendus à la vie civile doit être élevée au rang de priorité. Cela suppose une mobilisation de l’ensemble des personnels d’active de la gendarmerie qui, quelles que soient leur affectation et leur position hiérarchique, doivent s’engager davantage, avec leur sens aigu des responsabilités, dans cette démarche, certes encore inhabituelle, mais que l’âpreté croissante du marché du travail appelle, non comme une contrepartie des services rendus, mais comme une contribution à une entreprise louable et équitable de solidarité et d’intégration. Compte tenu de leur position privilégiée au sein du tissu socio-économique local, les diverses structures territoriales et unités paraissent, en effet, en mesure de réaliser, en permanence, un double effort au bénéfice des appelés ayant servi volontairement et loyalement la gendarmerie, l’ordre public et la société française : un effort de recherche et de diffusion des informations concernant les formations complémentaires, les concours de la Fonction publique et les offres d’emploi dans le secteur privé ; un effort de formation et de relations publiques, de manière à favoriser le recrutement et l’embauche d’anciens gendarmes auxiliaires, notamment dans les services de police municipale et les entreprises de sécurité privée. ♦
(1) Les demandes d’admission (conditionnelles ou inconditionnelles) doivent être établies, entre trois à six mois avant la date d’incorporation souhaitée, à la brigade territoriale du lieu de domicile ou au centre d’information et de recrutement de la gendarmerie, ce délai étant, pour les gendarmes auxiliaires féminins, de quatre mois (la demande devant être alors déposée auprès du bureau du service national). Les incorporations ont lieu normalement tous les mois dans les centres d’instruction des gendarmes auxiliaires, quatre et cinq fois par an pour les élèves officiers de réserve et les gendarmes auxiliaires féminins.
(2) En 1995, 8 725 appelés ont effectué leur service national dans la police (soit 8 % des effectifs de gradés et gardiens de la paix), plus de la moitié des élèves gardiens de la paix masculins recrutés étant désormais issus des policiers auxiliaires.
(3) Pour les gendarmes auxiliaires féminins, un stage de formation d’une durée de deux mois est organisé à l’École de gendarmerie de Fontainebleau.
(4) Cette formation initiale (144 heures, dont 8 heures de contrôles et évaluations) comprend trois phases : militaire, professionnelle et préparation au futur emploi.
(5) Soit au total 532 heures de formation.