Lettre au Président à propos de l’immigration
Sur un ton sévère, voire féroce, avec cette désinvolture du journaliste chez qui la bosse du respect est aplanie, Thierry Desjardins présente au président un constat accablant. Un scoop ? Certainement pas pour le Français moyen, qui entend le même discours quotidiennement chez sa concierge ou son coiffeur ; mais les choses sont souvent caricaturées dans le menu peuple. Ici, les références sont solides, le raisonnement est rigoureux, le sens de la formule indéniable et le style alerte, se laissant parfois emporter dans des envolées quelque peu redondantes.
Le sujet est exposé sous divers aspects. Le dénombrement, si malaisé soit-il, permet d’avancer un total de l’ordre de 7 millions d’étrangers et de naturalisés de fraîche date sur notre sol, de quoi expliquer l’augmentation régulière de la population d’un pays où les berceaux sont vides. Alors, dans vingt ans, « 50 millions de petits vieux plus ou moins gaulois ou 100 millions de métissés » ? L’examen de la répartition renvoie à la fameuse notion de seuil de tolérance, apparemment dépassé dans ces « délicieux villages sans histoire » devenus banlieues chaudes. Le tour de France ne fait pas étape qu’auprès des grandes villes : voici Beaucaire, « arabe comme autrefois Mostaganem était française », et où les immigrés d’autrefois « qui pendant des années s’étaient habillés à l’européenne ont repris leurs costumes du pays ». Desjardins réfute le classique argument Curie-Picasso-Montand : « le Belge même flamand ne pose pas les mêmes problèmes que le Zaïrois illettré et polygame installé avec ses trois femmes et ses dix-huit enfants »… « La vraie question est l’islam », désormais deuxième religion de France (non loin de deux millions de pratiquants, 4 mosquées en 1966, 2 000 en 1996) et aussi, comme chacun sait, ordre social impératif qui ne saurait se couler aisément dans le moule occidental.
Nous assisterions donc, selon l’auteur, dans un premier temps à un abandon progressif de notre souveraineté et même de notre identité, auquel s’ajoutent les mille abus si souvent dénoncés dans les conversations de rue et de palier, du « maghrébin touchant le RMI dans trois départements différents » à la femme « accouchant tous les cinq mois », sans compter la part prise dans la délinquance et le trafic de drogue. À terme, une « gigantesque bombe à retardement » serait en cours de construction par une « cinquième colonne islamiste… prenant en main la population » par le canal d’une quantité d’associations largement subventionnées par les municipalités dans l’espoir d’avoir la paix au risque de leur abandonner le pouvoir de fait, tandis que la police « observe de loin à la jumelle ». On y enseigne les règles du football, avant d’« organiser des pèlerinages à La Mecque sous la conduite d’accompagnateurs barbus anciens d’Afghanistan ». Or, non seulement nos gouvernements successifs ont tergiversé dans la recherche de la parade à ces menaces majeures, mais des mesures aberrantes, dans l’esprit des « délires de 1981 », semblent avoir tout fait pour les aggraver : « scandale du droit d’asile… erreur impardonnable du regroupement familial », ou encore, parmi d’autres, recrutement d’instituteurs-imams venus à nos frais « enseigner la haine de l’Occident », sous prétexte de ne pas couper les enfants d’immigrés de leurs racines. Pire, au nom de la « France plurielle » et d’un prétendu apport enrichissant « de travailleurs analphabètes au pays de Voltaire et de Bergson », le « show-biz de la charité… les gauchistes qui se refont une santé et les évêques une vertu » (ces derniers ravis en outre de voir enfin leurs églises s’emplir, fût-ce de curieuse façon) transforment « les tags, le rap et le raï en passionnants phénomènes culturels » et font de l’immigration un sujet tabou. Si bien que le moindre écart de langage, entre deux lazzis lancés à la face du pape, peut conduire tout un chacun au « procès en sorcellerie » et que le moindre dépoussiérage de textes juridiques fait crier sans crainte du ridicule au retour à l’étoile jaune, tandis que la « pitoyable affaire du voile » mobilise tout l’appareil de l’État autour d’une « gaminerie provocatrice ».
Horresco referens, notre polémiste constate que son discours colle dangereusement à celui de Le Pen. Comme il existe des comportements inadmissibles, pratiquer la pédophilie en Belgique ou approuver Jean-Marie en France, il faut vite se démarquer des « vieilles culottes de peau nostalgiques… des jeunes au crâne rasé… des sbires à la mine patibulaire… », le tout contribuant au total de « 33 % de salauds » (selon un ancien dirigeant de club de football, ancien ministre) qui trouvent que trop, c’est trop.
À défaut donc de courir s’inscrire à un « front » aussi mal fréquenté et aussi peu fréquentable, Desjardins retient la solution, non de l’insertion qui laisse au sens propre subsister des corps étrangers dans notre communauté, mais de l’assimilation pure et simple, car « ce n’est pas au pays d’accueil de changer ses lois et ses modes de vie ». Une fausse intégration fondée sur le « droit à la différence » conduit à la catastrophe. Cependant, comment faire oublier ce caractère totalitaire de la charia sur lequel l’auteur insiste par ailleurs ? Comment régler le cas de ces gens qui « n’ont plus d’autre chez eux », tout en nous « détestant souverainement » ? Peut-être grâce aux « beurettes » qui « préfèrent au couscous le hamburger de Mac Do » ? Desjardins-Cassandre adopte, pour sonner le tocsin, la forme pressante, déjà utilisée par lui, d’une lettre qui ne laissera indifférents ni les partisans ni les adversaires des thèses développées ; toutes les lettres n’ont pas cette chance. Le temps est compté, le septennat ne se terminera pas « sans que le problème ne soit réglé… ou fasse vaciller son titulaire sur le trône présidentiel ». ♦