Duhamel du Monceau
Né en 1700, Henri-Louis Duhamel du Monceau a beaucoup fait pour le développement des sciences expérimentales, de la botanique et de la recherche agronomique. C’est cependant à un autre titre qu’il nous intéressera ici. Ce gentilhomme a, en grande partie, posé les bases de l’organisation de la marine que Louis XVI utilisera dans sa lutte contre l’Angleterre. Il a aussi soutenu l’élaboration d’une politique coloniale au Canada.
Duhamel du Monceau a entouré les flottes de guerre du roi de toute son attention en étudiant rationnellement les moyens d’en augmenter l’efficacité. Comme la formation des hommes était le seul moyen d’améliorer la qualité des équipages, il a créé l’École de marine, ancêtre de l’actuelle École navale. Ensuite, pour augmenter le nombre de navires, leur coût de fabrication devait être abaissé. Dans ce but, notre homme recommande de s’engager dans la voie de la normalisation et de se procurer les matières premières au moindre coût. La modernité de cette réflexion sur la fabrication en série s’est appliquée aussi bien aux navires qu’à l’artillerie ou à la voilure.
Convaincu de la justesse de ses choix, Duhamel du Monceau ne chercha cependant pas à les imposer aux tenants de l’ancienne école, plus empiriques et plus traditionalistes. Pour obtenir leur coopération, il s’efforça plutôt de convaincre et de démontrer en inscrivant son action dans la durée. En 1739, il fut nommé inspecteur général de la marine, poste qu’il conserva jusqu’à sa mort en 1782.
Quant à la politique française au Canada, elle l’intéressait d’abord afin de se procurer les espèces végétales propres à augmenter les rendements de l’agriculture française. Il a aussi rapidement vu la possibilité de tirer de la « Belle Province » les bois nécessaires à la fabrication des vaisseaux. Ce circuit aurait permis d’éviter les importations coûteuses de Scandinavie et d’épargner les forêts françaises. Dans cette préoccupation, il put s’appuyer sur un excellent réseau de soutiens et, notamment, sur La Galissonnière.
Au XVIIIe siècle, Duhamel du Monceau avait acquis une notoriété certaine. Il a longtemps tenu tête à Diderot et d’Alembert et pouvait faire agir à son profit jusqu’à trois ministres. L’histoire n’a pourtant pas retenu son nom.
Bruno de Dinechin peut donc être remercié de nous avoir offert ce rappel biographique. Il confirme par cet exemple que les rois ont toujours pu s’appuyer sur une petite noblesse fidèle et dure au travail pour conduire leurs politiques et poser les bases de la puissance de la nation.
Le plaisir de la lecture de cet ouvrage est avivé par la qualité du français. Cela est devenu si rare qu’il convient de le noter. ♦