En Asie centrale, pour atteindre ses objectifs qui ne se réduisent pas au seul approvisionnement énergétique, la Chine se montre opportuniste, bienveillante et prodigue, distribuant sans compter, mais pas sans arrière-pensées, sa manne financière. Cette politique permet à Pékin d’asseoir d’autant plus aisément sa suprématie que ses rivaux, Russie et États-Unis en tête, ne semblent pas en mesure de contrecarrer ses projets.
En Asie centrale, discrètement et méthodiquement, la Chine tisse sa toile
In Central Asia, Discreetly and Methodically, China Weaves its Web
In Central Asia, in order to reach its objectives, which are not reduced to solely the procurement of energy, China is proving itself to be opportunistic, benevolent, and prodigious in spending without care (but not without ulterior motives) its financial windfall. This policy allows Beijing to sit so easily in superiority that its rivals, Russia and the United States, do not seem to have measures in place to counter its projects.
Dans les républiques d’Asie centrale, la stratégie chinoise poursuit trois objectifs.
Le premier d’entre eux est l’approvisionnement en matières premières
En témoigne ce spectacle saisissant, sur les hautes routes du Pamir, de l’incessante noria de camions kirghizes, bringuebalants et à bout de souffle. Version moderne du « salaire de la peur », ils convoient vers le col d’Irkeshtam, à la frontière sino-kirghize, des tonnes de ferraille à recycler qui seront dévorées par le glouton énergétique qu’est devenue la Chine, premier consommateur mondial d’énergie depuis 2009 (1). Conscients de cette tendance lourde, les dirigeants chinois, avisés et pragmatiques, ont cherché à diversifier leurs sources d’approvisionnement en matières premières stratégiques. Dans ce cadre, l’aubaine que représentait l’Asie centrale post-soviétique ne leur a pas échappé : de vastes territoires, la plupart du temps très faiblement habités, riches en matières premières, sont là, à portée de main, de l’autre côté de la frontière, chez les voisins
kazakh, kirghize, tadjik voire un peu plus loin en Ouzbékistan ou au Turkménistan. Une corne d’abondance de richesses naturelles qui n’a cessé d’attiser la convoitise de l’Empire céleste.
C’est pourquoi, dès le début des années 1990, les Chinois ont pris pied dans la région, selon un agenda classique : ouverture des relations diplomatiques, visites de courtoisie puis signature d’accords d’amitié et de partenariat (début des années 2000) et, stade ultime, l’établissement de partenariat stratégique (Kazakhstan et Ouzbékistan). Si la démarche apparaît processionnelle, elle n’en demeure pas moins fructueuse : en décembre 2009, le président Hu Jintao a symboliquement actionné, avec ses homologues centrasiatiques, la vanne du gazoduc entre Chine et Asie centrale. Long de 1 850 km, ce tube acheminera en Chine, à partir de 2015, 40 milliards de m3 de gaz turkmène, via l’Ouzbékistan et le Kazakhstan. Une belle réussite au nez et à la barbe des Russes et des Américains !
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