Derrière cette démonstration de l’articulation indispensable entre dissuasion nucléaire stratégique et forces conventionnelles, il y a non seulement la valorisation impérative de l’emploi de ces dernières mais aussi l’inquiétude de voir leur sous-équipement ruiner la cohérence du système de défense de la France.
L’efficacité de la dissuasion suppose la cohérence d’ensemble
The Efficiency of Dissuasion, Supposing a Group Coherence
Behind this display of the indispensable articulation between strategic nuclear dissuasion and conventional forces, there is not only the imperative valorization of the employment of the former, but also the worry of seeing their under-equipment ruin the coherence of France's defense system.
La sécurité globale de la France et des Français repose sur la préservation de la cohérence d’ensemble de son système de défense *. L’intervention en cours au Mali met en particulier en évidence la nécessité pour la France de disposer de forces conventionnelles lui permettant de conduire de manière autonome une intervention armée – et interarmées ! – à l’extérieur du territoire national. Elle est encore capable de le faire et de maintenir ainsi d’ailleurs son état de grande nation. Dans cette crise, nos armées n’apparaissent plus comme une « force d’appoint » cantonnée à de modestes fonctions tactiques, mais comme un outil régalien de défense, de puissance et de posture redonnant, enfin, une stature stratégique à la France. Elle est encore capable de le faire, mais pour combien de temps ? La préservation à tout prix de notre arsenal nucléaire risque de porter un coup fatal à nos capacités conventionnelles, ce qui serait d’autant plus stupide que, sans ces capacités, nos forces nucléaires, au fond, deviennent inutiles. La Commission du Livre blanc conduit ses travaux en partant du postulat de la « sanctuarisation » de la dissuasion nucléaire. C’est-à-dire qu’elle va redéfinir à la baisse la défense de la France en excluant d’entrée de la réflexion l’une de ses composantes majeures, et donc au mépris de la cohérence stratégique de l’ensemble. Cette réflexion volontairement tronquée va immanquablement entraîner un affaiblissement de l’outil qu’elle entend protéger.
N’en doutons pas, sanctuariser le nucléaire, c’est condamner la dissuasion.
En effet, la volonté de conserver en l’état actuel notre arsenal nucléaire revient à le condamner lui-même : à budget global de la défense diminué, et sachant que le nucléaire en représente aujourd’hui un quart si l’on tient compte du cortège d’équipements nécessaires à sa mise en œuvre, il devient impossible de préserver les forces conventionnelles indispensables à sa crédibilité (pour plusieurs raisons que nous développerons, et notamment parce que l’on se trouve, sinon, acculé à la logique du tout ou rien). Mieux vaudrait donc le redimensionner, car, contrairement à ce qui est affirmé, des économies sont possibles et permettent de conserver les capacités d’action conventionnelle nécessaires à la logique globale de dissuasion.
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