Qu’il s’agisse des systèmes politiques, des trajectoires diplomatiques ou encore des postures adoptées lors des crises récentes liées au « Printemps arabe », la convergence des États du Maghreb marque le pas au point de faire douter de la persistance d’un idéal maghrébin. Une réflexion analytique, vue d’Alger.
Le Maghreb à l’épreuve des mutations régionales
The Maghreb Tested Against Regional Mutations
No matter the political systems, the diplomatic trajectories, or even the adopted postures during the recent crises linked to the “Arab Spring,” the convergence of the Maghrebian states marks the pace of which one should doubt the persistence of a Maghrebian ideal. This is an analytical reflection, seen from Algeria.
Les évolutions politiques liées au « Printemps arabe » ont ouvert, pour la réflexion stratégique, des champs d’analyse d’une extrême diversité et il n’est pas sûr que l’ensemble régional Maghreb/Moyen-Orient soit à l’abri de nouveaux bouleversements. De fait, au-delà des questionnements lancinants sur l’articulation entre les États, les pouvoirs et les sociétés dans cette région du monde, le sens des mutations qui s’y opèrent et les perspectives de leur évolution, il importe de s’interroger sur les réaménagements géopolitiques qui pourraient en résulter, d’identifier les défis de sécurité susceptibles de s’amplifier et partant, de jauger la pertinence et l’efficacité des mécanismes de régulation adoptés. Au demeurant, les effets cumulés de la « protesta » qui, au Maghreb, a ébranlé les fondements des régimes politiques de certains États-membres et contraint d’autres à intégrer l’urgence de réformes substantielles, la montée du salafisme dans la région et le développement des facteurs d’insécurité à sa périphérie posent en des termes renouvelés la problématique de la relance de l’intégration maghrébine et, plus prosaïquement, incitent à se demander si l’idéal unitaire porté par des générations de Maghrébins peut résister au tumulte des bouleversements en cours ?
Corrélativement, il y a lieu de tester la « solidité » des engagements scellés à Marrakech le 17 février 1989, de voir jusqu’à quel point les institutions maghrébines peuvent survivre à leurs fondateurs et sont aptes, au-delà du renouvellement des élites dirigeantes, à favoriser, sinon une démarche commune face à l’adversité, du moins un certain niveau de cohérence dans l’expression et la promotion des postures individuelles.
L’hypothèse centrale qui structure les développements qui vont suivre est que par-delà les fluctuations politiques conjoncturelles, le nationalisme alimenté par les élites dirigeantes successives, au Maghreb, est trop prégnant pour qu’un rapprochement décisif puisse se concrétiser à moyen terme. Dans le contexte actuel, il convient d’observer que l’équation maghrébine risque fort de se confiner dans un jeu de relations bilatérales croisées, voire de postures diplomatiques discordantes et d’initiatives de juxtaposition de cercles de regroupement exclusifs, toutes inscrites dans une dynamique régionale de construction-déconstruction des rapports de forces, impulsée jusqu’ici essentiellement par les deux principaux acteurs de la scène maghrébine.
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