C’est sans doute une nouvelle révolution militaire que prépare l’emploi massif et diversifié de robots militaires, en précurseurs, attaquants ou valets d’armes. Cette dynamique qui gagne tous les terrains du combat aéroterrestre comme aéromaritime sera plus difficile à développer dans le combat à terre. C’est à un nouveau paradigme qu’il faut se préparer, qui pourrait devenir le principe organisateur de la bataille future.
Robotisation et révolution dans les affaires militaires
Robotization and Revolution in Military Affairs
Indubitably, there is a new military revolution regarding the massive employment and diversification of military robots, as precursors, attackers, or carriers of weapons. This dynamic, which rules all terrains of aero-terrestrial or aero-marine combat, will be the most difficult to develop in terms of ground combat. This is a new paradigm that one must prepare for, and could become the principle organizer of all future battles.
Afghanistan, Irak, Libye, mais aussi le Moyen-Orient avec la guerre spasmodique entre Tsahal et le Hezbollah et le Hamas, jouent le rôle de laboratoires militaires où s’observent certains des traits des guerres futures. Or la robotisation, si l’on entend par là la généralisation de l’emploi de robots dans l’espace de bataille, est l’un de ces traits marquants. Ainsi la robotique terrestre opérationnelle a quasiment l’Irak comme berceau. Ailé, chenillé ou roulant, le robot semble déjà devenu pour l’armée américaine – celle qui depuis plusieurs décennies représente l’aile marchante de la modernisation militaire dans le monde – un compagnon habituel. Bien inséré dans les processus tactiques, il est présent à tous les degrés de l’échelle technologique, du rustique/robuste/consommable au bijou technologique type Global Hawk, héritier des U2 et autres SR 71. Dans les chiffres se lit l’ampleur de la mutation. Selon un récent rapport du Congrès cité par la revue Wired, l’US Air Force détiendrait actuellement 7 500 drones. 40 % des aéronefs de l’armée américaine seraient des drones, leur nombre a été multiplié par 40 entre 2002 et 2010. L’objectif d’une robotisation au tiers des moyens aériens du pays fixé (en 2005 à un horizon 2015) par le Congrès semble donc avoir été atteint en avance de phase.
La robotisation de l’espace de bataille nous promet-elle une nouvelle « révolution dans les affaires militaires » ? L’universitaire américain Peter Singer semble le croire avec son ouvrage Wired for War (1). Proposons notre propre réponse sans tomber dans le mécanisme de la conception américaine, qui tend à faire des phénomènes militaires, qui sont des phénomènes sociaux, un simple appendice des mutations techniques. Si la robotisation devait être porteuse d’une révolution dans les affaires, c’est qu’elle entraînerait des mutations significatives dans les trois domaines suivants : les rapports entre puissance offensive et défensive, et la nature des équilibres stratégiques ; le rapport de l’homme au combat, les doctrines tactiques et l’art opérationnel ; le rapport entre la population et les systèmes de défense.
Freins et accélérateurs
Avant d’aborder cette problématique, on répondra à une légitime interrogation préalable : le robot ne fait-il pas qu’une apparition éphémère, quoique spectaculaire, sur la scène de la guerre ? Son récent essor n’est-il pas lié au contexte particulier de deux conflits de contre-insurrection atypiques, l’Irak et l’Afghanistan ? Ne va-t-on pas voir rapidement se dégonfler une « bulle robotique » ? L’examen des tendances lourdes de la robotisation fournit des éléments de réponse.
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