61e Régiment d’Artillerie - Les drones et l’imagerie de l’Armée de terre
61e Régiment d’Artillerie - Les drones et l’imagerie de l’Armée de terre
Qui sait que Chaumont-Sémoutiers, en Haute-Marne, est la ville d’accueil du 61e Régiment d’Artillerie, le régiment de drones de l’Armée de terre française ? C’est désormais chose faite avec ce livre, témoignage d’un siècle d’histoire militaire.
Rédigé par une journaliste du secteur défense et sécurité, ce livre a le mérite d’aborder pour la première fois l’histoire d’une unité des plus originales, à l’identité bien affirmée. Mettant en œuvre les technologies les plus modernes, le 61e RA était à l’origine un régiment d’artillerie de campagne. Créé à Verdun le 1er mars 1910, il dispose alors de 44 pièces de 75 mm. Il se distingue durant les combats de 1914. Après avoir gagné le surnom de Diables noirs, ses artilleurs reçoivent en mars 1921 la fourragère rouge de la Légion d’honneur. Puis, il y a 1940, et pour beaucoup la résistance et la France libre. Le régiment part pour l’Algérie en 1955. Plus près de nous, il participe aux Opex post-guerre froide : les Balkans, le Tchad et récemment l’Afghanistan.
L’histoire moderne du 61e RA accompagne l’entrée en service des équipements aériens d’observation dans les armées françaises. Il devient régiment de drones à partir de 1999 sur les systèmes tactiques Crécerelle et CL 89, un drone rapide CL 89 destiné à la recherche de cibles pour l’artillerie nucléaire en Centre-Europe. Pouvant patrouiller plusieurs heures au-dessus d’une zone d’intérêt, le drone lent est spécifié à partir des leçons de la guerre du Golfe. C’est ce type de système qui se développe maintenant dans les forces.
Une nouvelle génération prend le relais, le CL 289 puis, à partir de 2004, le Système de drone tactique de surveillance et de guidage (SDTI) Sperwer. Le 61e développe ainsi son savoir-faire sur l’ensemble de la gamme des drones tactiques, y compris les drones légers pour le contact. Le Sperwer est ainsi perçu par le régiment comme une révolution opérationnelle pour sa capacité à appuyer des opérations en temps réel, l’acquisition d’objectifs pour l’artillerie ou l’aviation.
Dans cette perspective, l’Armée de terre est en pointe dans ce nouvel art opérationnel, celui des robots aériens, en lien directe avec le développement d’une industrie des drones tactique de surveillance en France. Depuis 1999, le 61e est le régiment de renseignement image de l’Armée de terre avec dans ses rangs des spécialistes de l’imagerie satellitaire. Entre 2008 et 2012, il est projeté en Afghanistan avec ses Sperwer pour appuyer les forces françaises et l’Otan. Sa mission fait suite à l’embuscade d’Uzbin d’où une forte médiatisation de son engagement. Dans ce théâtre, le régiment réalise plus de 800 missions de reconnaissance et de surveillance.
On découvre au fil des pages la diversité des métiers nécessaires pour une chaîne cohérente et high-tech dédiée à la mise en œuvre d’un système de drones. Les artilleurs doivent alors s’adapter aux normes aéronautiques et à la technicité des opérations de maintenance. Dans ce registre, le propos met l’accent sur les hommes et femmes du 61e RA, passionnés par leur métier. Rattaché à la Brigade de renseignement, dont l’état-major est à Haguenau, le 61e reste unique dans sa spécialité au sein de l’Armée de terre.
Un autre message apparaît : le rôle déterminant que les drones auront à jouer à l’avenir. Conscient de cet enjeu, le 61e RA souligne sa part active aux réflexions en cours. À la fin du livre, le lecteur pourra découvrir les différents candidats susceptibles de prendre la relève de ses SDTI Sperwer : le Patroller français et le Watchkeeper israélo-britannique. L’objectif de ce programme, inscrit dans l’actuel LPM, est clairement de garantir le maintien d’un dispositif de drones dans l’Armée de terre.
Ce livre restitue parfaitement le savoir-faire acquis en deux décennies d’Opex. Superbement illustré, avec une maquette efficace, ce beau livre est à recommander pour compléter des publications, bien trop rares en France, sur les drones et les technologies de renseignement.