L'auteur, qui est aussi un expert engagé, fait une lecture du récent Livre vert de la défense qui veut réconcilier les écologistes avec la défense et sensibiliser les militaires au développement durable. Il distingue les inflexions politiques que ce document révèle, les convergences avec la réflexion militaire sur la prévention qu'il contient et le développement potentiel européen qu'il propose.
Les Verts en quête de stratégie militaire
The Greens Seeking Military Strategy
The author, a specialist, gives his interpretation of the recent Green Book of Defense that wants to reconcile ecologists with defense and raise military awareness on sustainable development. He distinguishes the political inflections that this document reveals, the similarities with military thought on the prevention, and proposed potential European development.
Les auteurs du Livre vert de la défense (1) se donnent pour mission de réconcilier les écologistes avec la défense, de mieux sensibiliser les militaires pour assumer les nouvelles missions sécuritaires et d’évaluer ce facteur « multiplicateur de menaces » (2) qu’est le dérèglement climatique. Ils cherchent à ne pas se tromper d’ennemi, à mieux scénariser les Conflits verts (3) et à dessiner par là même « une future demande d’Europe » (4).
Des convergences obligées
La parution de ce Livre vert est tout un symbole. En l’espace de vingt ans, le développement durable a pris du galon. Le concept s’est imposé lentement mais sûrement, depuis la mise en place boulevard Saint-Germain d’un mini Fonds d’intervention pour l’environnement (FIE) en 1994. Le développement durable est mentionné dans le Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale de 2008, au moins une fois. À la sous-commission défense et sécurité du Parlement européen (5), il n’existe toujours pas de groupe de travail sur le sujet, mais par contre, de l’autre côté de l’Atlantique, des responsables militaires ont plaidé pour une « sécurité plus soutenable » (6). Ce virage, cette transition s’accompagne d’une reconnaissance par la nébuleuse écologiste que les armées ne sont pas imperméables au développement durable. Le Livre vert préfigure une maturation de la pensée et celle-ci peut se traduire demain au niveau des institutions. Peut-on imaginer une extension des attributions du ministère du Développement durable pour coiffer des missions aujourd’hui aux mains de leurs collègues de la Défense ? Un redécoupage du partage du fardeau qui permettrait, comme le souhaitait le ministre Alain Carignon, que les deux ministères pèsent d’un poids équivalent ? Les auteurs préconisent, parmi les vingt recommandations qui figurent en fin d’ouvrage, « la mise en place d’un organisme d’échange et de concertation entre militaires et écologistes au niveau national ». Si pareil organisme n’a pas encore pignon sur rue, le terrain est bien balisé depuis l’ouverture en janvier 2003 d’une chaire d’enseignement sur le développement durable à l’École Polytechnique, depuis aussi que des officiers sont initiés au développement durable aux autres coins du monde, dont la Suisse (7) et le Chili.
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