En révélant et analysant comment s'est constituée, développée et aguerrie l'Armée électronique syrienne, les auteurs illustrent l'ouverture d'un front nouveau dans la guerre de l'information. Au-delà des dimensions techniques des attaques et des parades, on découvre la valeur tactique et opérative des messages politico-militaires qui constituent le véritable enjeu des cyberagressions.
L' Armée électronique syrienne : entre cyberagression et guerre de l'information
The Syrian Digital army: Between Cyber-Aggression and Information Warfare
Through revelation and analysis of how the Syrian information army was formed, developed, and seasoned, the authors here illustrate the opening of a new front in the information war. Beyond the technical dimensions of attacks and parries, one discovers the tactical and operational value of political-military messages that make up the real challenges of cyber-aggression.
L’armée électronique syrienne, l’AES, connue également sous son acronyme anglais de SEA, est née en mai 2011 de la fusion de plusieurs groupes de hackers (spécialistes informatiques) soutenant le président syrien Bachar el Assad (1). En effet, la révolte de Derra a éclaté en mars 2011 et s’est étendue au reste du pays. Le siège de Derra commence fin avril quand de gigantesques manifestations agitent le pays en mai. Ainsi, l’AES est apparue en même temps que les tourments syriens.
L’armée électronique syrienne constitue un sujet d’étude particulièrement intéressant : il démontre l’existence d’une ligne d’opérations « cyber », systématiquement adoptée dans les conflits contemporains, il manifeste une action de longue durée que l’on peut observer dans le temps et il fait le lien entre des actions proprement cyber et des actions de subversion. Au fond, le cyberespace est utilisé par l’AES à des fins de guerre de l’information.
Après avoir exposé les objectifs et modes d’action de l’AES puis décrit ses cyberagressions (2), l’étude du piratage du compte Twitter de l’Associated Press montrera que cette activité en apparence secondaire a pu avoir des effets internationaux notables, en permettant notamment d’accréditer la résilience du régime d’Assad à un moment où elle n’était pas encore massivement perçue par l’opinion internationale. En ce sens, cette bataille fut gagnée par l’AES.
Il reste 92 % de l'article à lire