Les religions de l’humanité
La religion constitue un facteur essentiel dans l’étude de toute civilisation. Le phénomène spirituel occupe une place importante dans l’humanité où il continue de marquer profondément la culture de tous les peuples. Les programmes scolaires et universitaires, exagérément chargés par ailleurs, ne laissent généralement qu’une place insignifiante à une réflexion sur un sujet où l’État veut conserver, à juste titre, une stricte neutralité. Ce qui est moins normal, voire même critiquable, c’est que celle-ci se traduise par de l’ignorance. Le résultat de ce constat est inquiétant : une forte majorité de Français (même cultivés) est incapable de bien comprendre les cultures des populations étrangères, donc de bien saisir les fondements des politiques de beaucoup de pays. Pour pallier cette grave lacune, Michel Malherbe a publié une vaste encyclopédie qui fait le point sur la centaine de religions de l’humanité.
Aujourd’hui, quatre grands groupes confessionnels se partagent la quasi-totalité des croyants : le christianisme (1,5 milliard d’hommes), l’islam (900 millions), l’hindouisme (700 millions) et le bouddhisme (300 millions). Ceux qui récusent l’appartenance à toute religion sont estimés à 1,5 milliard. Parmi les adeptes des autres courants spirituels, le groupe très disparate des animistes purs, c’est-à-dire sans autre croyance, compte un peu plus de 100 millions d’âmes (essentiellement en Afrique noire). Toutefois, le nombre d’hommes qui conservent des pratiques animistes malgré leur appartenance à d’autres religions reste considérable et dépasse vraisemblablement le chiffre de 300 millions.
Le christianisme est lui-même divisé en trois groupes importants : le catholicisme (850 millions, dont 125 millions au Brésil, 70 au Mexique, 55 aux États-Unis et 50 aux Philippines), le protestantisme (subdivisé en de nombreux courants représentés par les luthériens, les baptistes, les méthodistes, les calvinistes, etc.) et l’orthodoxie qui reste naturellement concentrée dans les pays de l’Est européen. De son côté, l’islam se répartit essentiellement entre le courant sunnite (90 %, dont 160 millions en Indonésie) et le courant chiite (Iran, Azerbaïdjan, Bahreïn). L’hindouisme est fortement majoritaire en Inde (650 millions) et au Népal (15 millions). En dehors de ces pays, il n’est pratiqué que par des populations expatriées d’origine indienne (Maurice), à l’exception de l’île de Bali où il constitue une étonnante et dynamique survivance du passé hindouiste de l’Indonésie. Pour sa part, le bouddhisme est pratiqué sous différentes formes dont les principales sont « le petit véhicule » (Thaïlande, Birmanie, Cambodge) et « le grand véhicule » (Chine, Viêt-nam, Corée).
Michel Malherbe nous présente ensuite une autre forme de classification qui s’appuie sur les religions révélées (judaïsme, christianisme, islam, mormons), les religions de transition (zoroastriens, sikhs), les religions polythéistes (hindouisme, vaudou, shintô) et les religions morales (bouddhisme, confucianisme, taoïsme). À cette passionnante étude, l’auteur ajoute une analyse complète des nouvelles religions japonaises, des syncrétismes (c’est-à-dire des courants dont la doctrine ou les pratiques sont un mélange d’éléments pris dans différentes croyances) et surtout des sectes (Moon, scientologie, Krishna, etc.). Le chapitre consacré aux relations de l’homme avec la religion est également plein d’enseignements intéressants sur le rôle social des livres sacrés, des cultes, des rites alimentaires, des rites funéraires (Toradjas en Indonésie et retournement des morts à Madagascar).
En conclusion, Michel Malherbe nous livre une annexe sur les religions pratiquées par chaque pays de la planète. Cette synthèse détaillée constitue un document pédagogique de grande valeur qui permet au lecteur d’affiner certaines données d’un monde géopolitique plus que jamais à la recherche d’un difficile équilibre entre le rationnel et le spirituel. La connaissance de ces paramètres paraît indispensable pour mieux aborder les grands problèmes du XXIe siècle qui, selon André Malraux, « sera religieux ou ne sera pas ». ♦