Les missiles balistiques sont issus des V2 allemands et constituent aujourd'hui un vecteur essentiel dans le cadre de la menace NRBC-E. En progrès constants et aux performances sans cesse améliorées, ils sont un élément indispensable pour toute stratégie de puissance.
La prolifération des missiles balistiques : facteur d'aggravation des crises
Ballistic Missile Proliferation: A Factor in the Aggravation of Crises
Ballistic missiles started with German V2s and constitute today an essential vector in the threat of WMD's. With constant progress and steadily improving performances, they are an indispensable element in all strategies of power.
Le missile balistique est né du fracas de la Seconde Guerre mondiale. À travers les premières fusées V2 qui s’abattent par milliers sur l’Angleterre ou les ports du débarquement, il armait la vengeance de l’Allemagne écrasée sous les bombes alliées, sans que ces « armes miracles » encore immatures et très imprécises parviennent à infléchir le cours du conflit. Les Alliés victorieux, impressionnés par cet armement offensif de pointe, insaisissable au sol comme en vol, se disputent les scientifiques et les fusées du IIIe Reich ; les États-Unis ont d’emblée saisi le potentiel immense d’un vecteur guidé autonome, capable d’emporter très loin, très haut et à très grande vitesse la jeune arme nucléaire, sans craindre les défenses adverses. L’Union soviétique, qui saisit son lot de missiles, d’équipements et de scientifiques allemands leur emboîte le pas pour combler le « missile gap », devançant même l’Amérique en orbite en 1957 grâce à un missile balistique R7 modifié (la Semiorka de Korolev qui satellise Sputnik, puis Gagarine en 1961). La France, parent pauvre du dépeçage des inventions allemandes, se lance dans ses propres programmes, qui alimentent bientôt les ambitions nucléaires du général de Gaulle. La guerre froide voit donc le missile balistique, vecteur d’ogives nucléaires ou modifié en lanceur spatial, confisqué au profit des puissances victorieuses de l’Allemagne. Lancées dans la course aux armements de destruction massive, elles mettent en place une dissuasion par l’équilibre de la terreur, qui conduit à la fois au non-emploi de l’arme atomique et au raffinement constant de ses vecteurs. En corollaire de cette prolifération verticale se développe une prolifération horizontale, où les Grands diffusent vers leurs alliés des missiles balistiques tactiques, armés d’ogives conventionnelles, plus propices à leur usage dans des conflits régionaux. Bientôt, les nations émergeant de la décolonisation convoitent ces attributs de la puissance, et le missile balistique devient entre leurs mains une super-artillerie, voire à long terme la prestigieuse clé d’accès à l’espace ou à la puissance nucléaire.
La prérogative des Grands
L’emploi du missile balistique montre donc un double visage : chez les Grands, rejoints par la Chine ou par des membres non déclarés du club nucléaire (Israël d’abord, puis l’Inde et le Pakistan), le raffinement successif d’armements de pointe à longue portée ; chez les proliférants du Tiers-Monde, l’acquisition coûteuse de vecteurs à l’étranger se double de modifications locales, voire d’ambitieux programmes de développement nationaux ou en coopération (le missile Condor 2 développé entre l’Argentine, l’Égypte et l’Irak jusqu’à sa défaite de 1991). Ces efforts donnent lieu en Occident à l’adoption de mesures de non-prolifération, telles que l’efficace régime de contrôle des technologies de missiles de 1987, qui régit le transfert de systèmes ou de composants de missiles de moins de 300 km et de 500 kg de charge utile.
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