Billet – Au pain perdu de la rue Cassette
À Paris, au croisement des rues de Rennes et Cassette, se trouve un café qui propose un pain perdu qu’il faut aller goûter tant qu’il en est encore temps. La recette se nomme outre-Atlantique French Bread, qu’une chaîne de fast-food revend dans ses échoppes parisiennes, sauf qu’il y est cher et mauvais. Il va pourtant falloir s’y faire si nous fusionnons les deux rives de l’océan dans un marché unique qui nous imposera la loi, pas seulement culinaire, des entreprises américaines. Encore faudrait-il, il est vrai, que celles-ci aient toujours quelque chose en rayon, ce qui est loin d’être le cas : pas de TGV, pas d’A-380, pas de BPC Vladivostock ni de 155 Caesar, un Internet le triple du prix français, une agriculture sous-productive, pas d’équivalent du MIN de Rungis, un seul lanceur pour une capsule spatiale passée en un demi-siècle de trois à quatre places, tandis qu’une franchise de restauration rapide met un peu partout la clef sous la porte et que plusieurs parcs d’attractions vont en faire autant. Quant au F-35, il est au fer à repasser ce que le French Bread est au pain perdu, une copie plus coûteuse et qui vole moins bien. Mais le Pentagone préférera mettre les porte-avions de l’US Navy au chômage technique que de les faire opérer sur Rafale.
En attendant, Bruxelles pousse les feux pour signer ce traité dont on nous cèle des attendus qui imposeront l’exception du suzerain. Le personnage de Kirikou se verra toujours interdire les écrans new-yorkais parce qu’il refuse de couvrir sa nudité, tandis qu’Hollywood continuera d’imposer ses scènes de décapitations – une centaine depuis dix ans. Rien n’a changé depuis la ségrégation imposée en 1943 à Leclerc lorsqu’il dut se séparer des bataillons africains vainqueurs de Koufra, faute de quoi sa division n’aurait pas été livrée en chars. « Il y a des auteurs qui viennent nous dire hardiment qu’un homme qui est déclaré esclave en Amérique puis est transporté en Europe doit y être regardé comme esclave, raillait le chevalier Louis de Jaucourt dans son article « Traite des nègres » de l’Encyclopédie. C’est décider des droits de l’humanité par les lois civiles d’une gouttière ».
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