La guerre au XXe siècle
Vaste programme que de traiter des guerres dans notre siècle ; et celui-ci n’est pas terminé… Les deux auteurs affrontent le sujet en casoar et en gants blancs, prompts à dégainer contre des idées reçues qui leur paraissent dépassées, et accrochés, non sans panache, sur les positions qui leur sont chères.
Avec raison, ils se mettent d’emblée sous le patronage de Gaston Bouthoul, introducteur dans notre pays d’une nouvelle discipline sur la théorisation du phénomène guerrier, qu’il a baptisée polémologie ; discipline qui mérite qu’on la revigore même si les travaux de Raymond Aron et, en un sens, de Jean-Baptiste Duroselle en ont prolongé le souffle.
L’ouvrage est clair dans ses idées, sa forme et sa présentation typographique. Il fourmille de précisions, qui en font un livre de référence sur les aspects les plus tragiques de l’histoire de notre temps. Ces détails ne nuisent pas aux synthèses ni à des appréciations qui donnent une touche personnelle sans altérer l’objectivité des exposés. Dans l’ensemble cependant, il s’agit d’un recueil des faits, exhaustifs dans les limites imparties, assorti de commentaires, et non d’un abstrait essai de doctrine. Nous sommes donc, et tant mieux, sur du terrain solide.
Certains passages sont à méditer particulièrement. Par exemple, ce qui touche à « la force contrainte », et qui concerne les limitations volontaires à l’usage de la violence. Ce malthusianisme dans l’emploi des armes, dont il faut évidemment se féliciter, est, à l’évidence, devenu un élément majeur dans la stratégie militaire et politique. Par exemple aussi « la guerre au Sud », d’actualité croissante dans les réalités comme dans les réflexions. Les connaissances des auteurs, dont beaucoup acquises sur le terrain, permettent de donner aux développements un tour précis et concret. Peut-être y aurait-il lieu de pousser encore plus avant, sur cette base, l’examen de ces conflits sans structure, foisonnant de péripéties et de retournements, où l’intérêt du clan en prime souvent tout autre, où l’on cherche sans trêve à impliquer plus grand que soi ; conflits si différents de nos guerres européennes et sur lesquels, apparemment, les décideurs du Nord n’ont pas fini de trébucher. Par exemple enfin, pour s’en tenir à ces trois brefs coups de projecteur, les mérites comparés, à notre époque, des armes de terre, de ciel et de mer, la primauté allant, d’après Jean-Louis Dufour et Maurice Vaïsse, aux premières, assertion qui risque de leur valoir quelque contestation.
Le texte, forcément austère, est allégé et éclairé par des « documents » figurant en fin de chapitre, et qui sont des citations littéraires, des graphiques, des textes juridiques, des chronologies ou des glossaires traduisant des sigles. La bibliographie comprend près de trois cents titres ; c’est dire qu’elle est abondante. On regrettera – mais l’exercice le permettait-il ? – l’absence de carte. ♦