La crise du Golfe et le nouvel ordre international
Professeur émérite à l’Université de Paris I depuis 1989, Marcel Merle est un spécialiste des relations internationales, auteur de nombreux ouvrages et chroniqueur au journal La Croix-L’événement. Dans ce livre assez court, il analyse le concept d’ordre international, la notion d’ordre. On se heurte à la distinction établie par Hobbes entre l’état de nature et l’état de société. L’exemple européen est cependant un exemple de recherche d’autres solutions que la domination d’un empire ou l’équilibre des forces. La Société des Nations (SDN) a échoué ainsi que les pouvoirs de police de l’ONU. Le système bipolaire entre États-Unis et URSS a disparu avec l’implosion du système communiste.
Le professeur Merle étudie le concours exceptionnel de circonstances qui a amené l’invention du « nouvel ordre international ». La crise du Golfe a servi de révélateur de la politique soviétique et confirmé la fin de la guerre froide. Un accord entre l’Est et l’Ouest s’est établi sur le problème irakien et l’on a créé un lien entre sa solution et l’avenir des relations internationales. Les Nations unies ont joué un rôle majeur grâce au Conseil de sécurité, mais cette ONU est-elle acteur ou instrument ? Entre États, la justice reste subordonnée à des ententes préalables. Les résolutions de l’ONU sont plus des actions de sécurité collective que des actes du droit international. Les hostilités sont autorisées par le Conseil, mais « ce n’est pas une guerre des Nations unies ». Les États-Unis restent maîtres du jeu. Quand se soulève la question kurde, des forces ayant agi au nom des Nations unies ne peuvent pas être relevées par des contingents placés sous leur autorité. Il vaudrait mieux parler de légitimité que de légalité.
Il apparaît à Marcel Merle que les membres de la coalition ne se sont guère souciés d’établir un ordre international ; chacun a mené sa politique. Les uns évitent de s’engager, d’autres ont leur propre vision de l’avenir des relations internationales. Il n’y a qu’un « consensus limité ». Le professeur Merle émet des doutes sur la possibilité de voir la guerre du Golfe conduire à un nouvel ordre international rénové et viable.
On peut rapprocher son opinion de celles que l’on trouve dans le numéro 3/91 de la revue Politique Étrangère qui s’intitule : « Le nouveau désordre international ». Marcel Merle distingue cependant des certitudes et aussi des questions controversées. La gestion de la crise a montré une communauté internationale faisant bloc – l’agresseur a été sévèrement puni –, mais elle n’est pas un exemple typique pour l’avenir. Les circonstances ont joué un rôle déterminant. L’ordre international de demain risque fort de n’être qu’une « pax americana ». Une aspiration légitime à une meilleure représentation de l’équilibre des forces devrait faire modifier la composition du Conseil de sécurité. Il ne peut s’agir d’un simple aménagement : l’ordre mondial reste à construire. ♦