Les Drones aériens
Les Drones aériens
Les Drones aériens est un ouvrage-outil qui fait un point de situation approfondi sur la question des Unmanned Aircraft (UA), c’est-à-dire des « aéronefs inhabités télépilotés capables d’emporter différentes charges utiles pour effectuer des tâches spécifiques ». Le monde des drones est vaste et complexe ; même restreint aux drones aériens, l’ouvrage doit concentrer et restituer une masse d’information très importante. Sa présentation en chapitres thématiques, ses nombreuses illustrations, ses encarts récapitulatifs, sa classification des drones et son glossaire en facilitent fort heureusement et bien habilement l’accès.
Lionel Chauprade est instructeur et pilote de ligne, mais également officier de réserve dans l’Armée de terre ; il a travaillé au sein de la Section technique de l’Armée de terre (STAT) et du Commandement de l’aviation légère de l’Armée de terre (Comalat). Dans son avant-propos, l’auteur avoue : « Le lecteur trouvera peut-être ces lignes très orientées sur la chose militaire, mais le fait est que l’histoire des aéronefs télépilotés jusqu’à ce jour reste placée sous le signe de Mars ». Les deux derniers chapitres ouvrent néanmoins sur les applications civiles des drones et sur les programmes futurs.
Le panorama du drone aérien militaire proposé dans cet ouvrage commence par le difficile exercice des définitions et des classifications dans ce domaine relativement récent et en constante évolution. Du nano et micro-drones, en passant par les petits drones, les drones tactiques, les drones opératifs MALE et HALE (Medium/High Altitude Long Endurance), l’UA se répertorie aussi, par exemple, selon sa charge utile, drone armé (drones armés multimission, drones de combat) ou pas, selon son type de voilure, fixe ou tournante.
Le panorama se poursuit par quelques réponses à des questions essentielles : pourquoi les drones sont-ils apparus ? Comment s’intègrent-ils dans l’environnement opérationnel ? Quelles conséquences leur emploi entraîne-t-il ? Les raisons d’exister des drones tiennent à la recherche de la baisse des coûts financiers et humains, ainsi qu’à leurs atouts opérationnels spécifiques. Ce sont des systèmes qui s’intègrent au sein d’un réseau de systèmes. Lionel Chauprade en profite pour faire un catalogue très utile des différents concepts liés à la guerre en réseau (Network Centric Warfare) : ISR (Intelligence, Surveillance and Reconnaissance), ISTAR (IS - Target Acquisition - R), C4ISR (Command and Control, Communications, Computing, IRS), boucle OODA (Observe, Orient, Decide and Act), NEB (Numérisation de l’espace de bataille), etc. Mais il ne s’arrête pas au domaine de l’information et du renseignement ; le drone intervient aussi dans l’aérocombat, domaine qui soulève une délicate question éthique. L’auteur évoque très succinctement ce dernier point et renvoie les lecteurs au débat suscité par Grégoire Chamayou avec son livre Théorie du drone, dont nous avions fait la recension dans la Revue Défense Nationale de novembre 2013.
Après une petite histoire des drones aériens, Lionel Chauprade présente une géographie détaillée de ces machines : d’abord les États-Unis, « puissance incontestée dans le domaine », ensuite l’Europe avec le drone MALE comme exemple d’« errance politico-industriel » ou avec les nEUROn et Taranis, possibles futurs drones de combat franco-britanniques, puis la France, l’Allemagne et l’Italie avec leurs programmes spécifiques mais aussi Israël avec son « savoir-faire né de l’expérience », et enfin les BRICS et émergents tels que la Chine, la Russie, l’Iran, le Brésil, l’Inde et le Pakistan.
L’univers du drone est souvent pour le grand public un « quasi-monde de science-fiction » : mélange de technologies numériques et d’intelligence artificielle, d’architectures et formules aérodynamiques futuristes, de capacités inquiétantes d’éliminations ciblées… Lionel Chauprade souhaite grâce à cet ouvrage « couper court à certaines idées reçues » et insiste notamment sur deux points : d’abord la « main de l’homme est toujours là » et les drones ne se détachent pas des questions liées aux facteurs humains ; ensuite les drones sont nés des besoins sur les théâtres de guerre (Seconde Guerre mondiale, Vietnam, conflits israélo-arabes, ex-Yougoslavie, etc.) et l’arrivée des drones de combat à la suite des drones de renseignement tient de fait à l’évolution des théâtres d’opérations. Ainsi le « regard sur certains projets de drones actuels permet de décrypter les centres d’intérêt géostratégiques des grands commandements à l’origine de leur lancement ». ♦