Sous le feu
Sous le feu
Le colonel Goya est un homme d’expérience. Il a été lui-même sous le feu dont il parle, en Afrique et en Afghanistan. S’il s’exprime en sociologue, c’est qu’il dirige maintenant la recherche au Centre de doctrine de l’Armée de terre et dispose de nombreux témoignages, qu’il nous fait partager. Sa synthèse est brillante et émaillée de formules heureuses dont les sous-titres donnent un avant-goût : « La mort comme hypothèse de travail » et « Comment des hommes ordinaires peuvent faire des choses extraordinaires ».
Quelque héroïque qu’il soit, ce n’est guère la patrie qui motive le combattant et plutôt le point d’honneur… Les copains, quoi ! « Il n’y a pas, dit Goya, de héros sans spectateurs ». Sans parler de l’adrénaline dont on nous rebat les oreilles, il sait que « le combattant est sous l’emprise de la chimie ». « Beaucoup font peu, dit-il, et peu font beaucoup ». Les as, et pas seulement dans l’aviation, agissent efficacement au milieu de « figurants ». La discipline, au feu, va de soi tant le soldat aspire à être commandé, laissant au chef le pénible devoir de penser. Tuer anonymement, ce que permettent les armes modernes, est facile. Seuls, ou presque, les pilotes d’hélicoptères et les tireurs d’élite voient ce qu’ils font. Dans ce contexte, il est facile de « fabriquer des soldats ». Après quoi le danger est le meilleur instructeur. Une jeune femme enquête sur la sécurité et l’hygiène dans une unité de retour d’Afghanistan et demande à l’auteur de lui dresser la liste des emplois dangereux dans son unité. Stupeur de l’interviewé ! L’introduction et l’épilogue du livre circonscrivent le propos : on commence au pont de Verbanja, on termine en ouverture de route en Afghanistan. Sociologue, disions-nous. Il n’est pas sûr que l’homme de l’art soit un bon recruteur. ♦