Le mot « standardisation » est employé de plus en plus fréquemment dans les débats relatifs aux problèmes d’armement et, comme cela advient souvent, un examen attentif révèle que ce néologisme n’a pas la même signification pour tous ceux qui l’utilisent. Dans l’acception française du vocable, il s’agit de l’ensemble des règles et des procédés qui permettent la production d’éléments unifiés et interchangeables. Le concept est donc objectif, exempt de tout jugement de valeur. Le glossaire de l’OTAN (AAP-6 (L) 1975) donne, par contre, une définition tout à fait subjective et orientée. Selon ce document, en effet, la standardisation est « le procédé par lequel les nations membres réalisent la coopération la plus étroite possible des ressources fournies par la recherche, les études et la production, et conviennent d’adopter, sur la base la plus large possible, l’utilisation de :
a) procédures logistiques et administratives communes (ou compatibles) sur le plan opérationnel ;
b) procédures et critères techniques communs (ou compatibles) ;
c) matériels, armes, éléments constitutifs, et ravitaillement commun, compatibles ou interchangeables ;
d) une doctrine tactique commune (ou comparable) assortie d’une compatibilité structurelle correspondante ».
Ce simple énoncé montre l’ampleur des malentendus que peut entraîner l’emploi du même mot. Il a donc paru nécessaire à notre Revue de demander au, Délégué ministériel pour l’Armement, d’exposer son point de vue sur ce problème.
Pendant les années qui ont suivi la fin de la Seconde Guerre Mondiale, les armes, voire les systèmes d’armes, en service dans les pays de l’Alliance de l’Atlantique Nord étaient largement « standardisés », puisque les États-Unis en assuraient la fourniture quasi exclusive dans le cadre de nombreux accords d’assistance (parmi lesquels les accords « off shore » méritent une mention toute particulière).
Cette situation ne s’est pas prolongée, pour des raisons qui mériteraient une longue étude, car on peut y discerner des mobiles politiques, économiques, sociaux, monétaires, combinés avec l’évolution des concepts militaires propres à chaque pays. La Grande-Bretagne n’avait certes jamais cessé de produire elle-même ses principaux armements conventionnels, ce qui lui vaut le privilège historique d’être le seul membre de l’Alliance de l’Atlantique Nord qui n’ait jamais été « standardisé ». Dès le début des années 50, la France, sortant avec une remarquable vigueur de la longue nuit de l’occupation et des soucis de la reconstruction, commençait à mettre en ligne des engins originaux parmi lesquels le char AMX 13 dont le rayonnement mondial a commencé en 1953 et persiste encore plus de vingt années après. Peu à peu, les principaux pays industriels suivaient des cheminements analogues, tant et si bien qu’en 1974 le général Goodpaster pouvait exprimer son souci, en tant que chef opérationnel du système intégré de l’OTAN, en constatant l’existence de :
— 23 familles différentes d’avions de combat,
— 7 familles différentes de chars,
— 8 familles différentes d’engins blindés de transport de personnel,
— 22 familles différentes d’armes antichars.
Les aspects technico-militaires
Les aspects politico-militaires