Editorial
Éditorial
Plus que jamais, notre environnement ne cesse de se dégrader. L’espace géographique du Levant voit l’accélération et la décomposition de l’Irak et de la Syrie, malgré les frappes aériennes conduites par la coalition à laquelle la France participe avec détermination. L’élimination des populations minoritaires, dont les Chrétiens d’Orient, y est devenue « normale ». Le Sud de la péninsule arabique s’enfonce également dans la violence avec un Yémen déchiré par la guerre civile, tandis que les semaines à venir vont être décisives avec le sprint final des négociations autour du nucléaire iranien. Les cartes sont en train d’être redistribuées sans que l’on sache vraiment quelles sont les règles du jeu.
Malgré tout, au Sahel, il y a des signaux positifs avec plusieurs succès tactiques de nos forces tant contre des chefs terroristes que contre des trafiquants de tout ordre, montrant l’efficacité du dispositif français mais aussi sa nécessité, impliquant un effort de longue haleine pour notre défense. À ce sujet, la révision prévue pour cet été, et désormais engagée de la LPM 2014-2019, constitue un changement de cap majeur pour la France, depuis plusieurs décennies, avec une reprise sensible de nos investissements, tout en sachant qu’il faudra poursuivre les restructurations pour gagner des marges de manœuvre. Renforcer notre défense devient vital, alors même que le monde change et que les incertitudes stratégiques ne cessent de s’accroître, comme le démontre le dossier consacré aux perspectives en Asie.
La Revue publie ainsi les interventions du colloque de clôture de la chaire « Grands enjeux stratégiques contemporains » de l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Pour la deuxième année, ces publications permettent de proposer une lecture croisée sur le nouveau centre de gravité du monde avec une complexité croissante des relations entre des États aux ambitions contradictoires et aux capacités humaines, économiques et militaires en croissance exponentielle. La Chine, l’Inde, les Corées ou encore le Japon se disputent des espaces dans un contexte crisogène et de rivalités marquées par une histoire conflictuelle ne facilitant pas le dialogue pourtant nécessaire. À cela s’ajoute l’engagement réaffirmé des États-Unis, puissance tutélaire depuis des décennies et dont la garantie nucléaire semble remise en cause. La France, ne serait-ce que par sa présence dans la région, ne peut se désintéresser de ce qui s’y passe et y joue un rôle réel. La compréhension des enjeux asiatiques est donc plus que jamais indispensable, d’autant plus que tous les indicateurs économiques montrent que l’Asie est devenue le centre du monde. Avec une conséquence essentielle, y compris pour la défense française, de la dimension maritime puisque l’essentiel des trafics commerciaux se fait par la voie des océans. En garantir la sécurité et la liberté de navigation est une obligation majeure à laquelle la France se doit d’être présente avec les navires de la Marine nationale. L’Asie est aussi le continent le plus « nucléarisé ». Avec la crise ukrainienne, et les négociations complexes avec l’Iran, c’est le rappel que la question nucléaire reste centrale dans les relations internationales. Raison pour laquelle le prochain numéro d’été de la Revue sera exclusivement consacré à la dissuasion nucléaire.