Politique et diplomatie - Les deux Grands et la Méditerranée
La prolongation de la guerre civile au Liban, l’impossibilité de concilier les positions des parties en cause dans le conflit sur Chypre et la persistance du contentieux gréco-turc en mer Égée, la difficulté d’aller au-delà des premiers pas accomplis par Henry Kissinger sur la voie de la paix au Proche-Orient, autant d’éléments qui soulignent la place que la Méditerranée continue de tenir dans la politique internationale et l’importance décisive qu’elle continue d’avoir dans l’orientation, vers le meilleur ou vers le pire, des rapports entre les deux Grands.
Les choses étant ce qu’elles sont en Méditerranée, l’une des questions essentielles qu’on est en droit de se poser est la suivante : doit-on souhaiter — et peut-on espérer — que les deux Grands, États-Unis et Union Soviétique, renoncent à être présents en permanence en Méditerranée — laissant aux riverains la responsabilité d’assurer en temps normal leur propre sécurité — ou du moins y réduisent leur présence ? Traditionnellement, depuis 1958, la France était animée du « souci d’éviter l’excès des influences extérieures dans une mer qui, hier européenne, est désormais en outre une mer africaine, américaine et russe (1) ». La France s’est à diverses reprises prononcée plus ou moins nettement sur le principe du retrait — ou d’une réduction — des forces soviétiques et américaines de la Méditerranée ; par exemple, lorsque cette proposition fut avancée par l’Espagne en novembre 1968. L’idée fut reprise par le Président de la République lorsqu’au cours de son voyage en Tunisie, il décrivit les grandes lignes de notre politique méditerranéenne (2).
Il est intéressant de noter que l’Union Soviétique a suggéré à plusieurs reprises, sans succès depuis 1971 des accords internationaux destinés à « transformer la Méditerranée en une mer de paix et de coopération amicale (3) ». Une variante de cette proposition était à nouveau exprimée le 12 juin de la même année par M. Brejnev, qui indiquait que « l’Union Soviétique était prête à résoudre le problème de la présence navale américaine et soviétique en Méditerranée sur un “pied d’égalité” ». L’Union Soviétique, ajoutait-il, « était disposée à discuter une réduction mutuelle des flottes se trouvant en permanence à de grandes distances de leurs bases » (4). L’Union Soviétique a également proposé en mai 1963 l’interdiction de la Méditerranée aux sous-marins armés d’engins nucléaires (5). Les États-Unis ont rejeté cette proposition le 24 juin 1963 (6). En juillet 1974, Leonid Brejnev, dans son discours au Parlement polonais proposait de retirer de la Méditerranée les navires équipés d’armes nucléaires et cette proposition était reprise dans un discours prononcé à Berlin-Est en octobre de la même année.
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