L’élection de M. Elias Sarkis à la présidence de la République, bien que clarifiant une situation encore très confuse, n’apporte qu’une solution précaire à la guerre civile au Liban. Après plus d’un an de combats meurtriers, la poussée des forces islamo-progressistes, qui récusent cette solution, a conduit le camp chrétien conservateur à renforcer les positions qu’il occupe dans le pays. Refusant longtemps l’idée d’une partition, la communauté maronite en vient, en désespoir de cause, à ne plus rejeter cette solution. L'auteur, spécialiste des questions arabes, suit l’évolution des pays du Proche-Orient. Après avoir situé la place des chrétiens dans l’histoire libanaise, il expose quelles seraient les chances d’un « État chrétien » au sein d’un monde musulman hostile.
Au Liban, les chances d'une partition ?
Plus d’un an après le début des affrontements armés au Liban, les antagonismes entre les deux camps islamo-progressiste et chrétien sont devenus tels que la « partition » tenue longtemps volontairement à l’écart dans les perspectives politiques, s’est maintenant imposée comme une des solutions possibles à la crise. Redoutée par tous les Libanais et refusée par l’immense majorité, l’idée d’un partage du pays s’est installée dans les esprits au fur et à mesure que les combats devenaient plus sanglants (1) et que l’État libanais, et avec lui son armée, s’avéraient incapables de faire respecter leur autorité. Aujourd’hui la partition se trouve en voie d’être réalisée sur le terrain, les chrétiens comme les musulmans recherchant refuge au sein de leurs communautés respectives.
Après avoir dominé la vie politique et économique du Liban pendant près d’un demi-siècle, les maronites qui restent aujourd’hui la plus importante communauté chrétienne voient leur rôle contesté dans le système politique confessionnel mis en place lors de l’indépendance du pays en 1944. Les mouvements de gauche, conduits par le chef druze Kamal Joumblatt, qui représentent les courants nassérien, baasiste, nationaliste syrien et marxiste-léniniste, remettent en effet en question la primauté des chrétiens, plus particulièrement des maronites, reconnue par le Pacte National en s’appuyant sur les revendications réformistes des musulmans devenus majoritaires. Le repli de la Résistance palestinienne sur le Liban après son élimination de Jordanie en septembre 1970 qui introduit dans le pays une nouvelle communauté de 400.000 personnes ne fait que renforcer ce courant.
Consciente qu’elle ne pourra plus désormais diriger cette association de minorités que constituait le Liban et persuadée, à juste titre, qu’elle a contribué jusqu’à maintenant à la sauvegarde d’une entité libanaise, la communauté maronite engage le combat pour maintenir ce qui lui paraît indispensable à sa survie au sein d’un milieu dont les orientations progressistes l’inquiètent. L’intervention des organisations palestiniennes aux côtés des forces islamo-progressistes, en janvier 1976, puis l’intervention directe de la Syrie en mars qui permet un court répit dont bénéficie le camp chrétien, prouvent la précarité de sa situation sur le plan militaire. Se sentant de plus en plus acculés, les maronites s’organisent pour résister au sein d’un réduit qui préfigure un « Petit Liban », tel qu’il serait en cas de partition.
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