Les libertés publiques en France et dans le monde
C’est une sorte de manuel introductif à la matière des droits de l’homme qu’a écrit Jean-Paul Costa. Du manuel, il a le caractère pédagogique : le souci de présenter et d’expliquer une matière foisonnante. Cependant le nombre limité de pages, le soin de ne pas encombrer les présentations de trop de données approfondies font que son ouvrage apparaît plus comme une introduction qu’une véritable référence. Cela dit, la manière dont l’auteur a traité ce sujet aussi éminemment actuel mérite d’être relevée. Car, sans pour le moins du monde renier l’approche juridique, Jean-Paul Costa, maître des requêtes au Conseil d’État, a aussi tenu à en présenter les divers aspects politiques, sociaux, moraux, sociologiques, voire économiques. Il n’a pas hésité par endroits à s’engager avec retenue et mesure, dans une matière aussi délicate, où d’habitude la prudence diplomatique côtoie l’invective ou le procès d’intention ou le plaidoyer pro domo.
L’ouvrage est composé de deux parties ; la première traite, après une introduction consacrée à la définition de l’historique, des libertés publiques dans la France contemporaine. Évoquer un tel sujet en quelque 125 pages peut sembler relever du défi ou de la gageure. Pourtant, le lecteur trouvera maintes indications utiles ou intéressantes quoique succinctes. C’est ainsi que sur un sujet d’actualité, les compétences du Conseil constitutionnel, l’auteur conclut (p. 46) : « Il s’est fait, depuis dix ans, une place importante sans précédent en France, peut-être exorbitante d’ailleurs, mais qu’on n’a en tout cas pas fini d’analyser et de comprendre ». On pourra retenir également ses développements consacrés à la liberté d’aller et de venir pour les étrangers (p. 73), ou les passages sur les nationalisations (p. 82-83). On verra avec plaisir que près de quinze pages sont réservées à des domaines moins classiques, s’agissant de la nouvelle génération des droits liés aux progrès technologiques (informatique, transparence de l’administration, éthique médicale).
La deuxième partie traite des libertés publiques dans le monde. Ici, la part des développements proprement juridiques se réduit d’autant au profit de considérations d’ordre général sur les grands fléaux qui touchent presque toute la planète (sous-développement, guerres, discriminations). On pourra trouver piquante la manière dont Jean-Paul Costa, soucieux toujours de présenter un bilan aussi objectif que possible et équilibré, décrit le cas des pays de l’Est, où l’actif occupe la même place que le passif. Se demander pourquoi la population a payé un si lourd tribut pendant la guerre pour défendre le régime, ou écrire nettement que « la majorité des citoyens de l’URSS semble attachée aux objectifs du régime » (p. 201), apparaissent bien sommaires. De même, dans l’énumération, pourtant courtoisement présentée des pays du Tiers-Monde qui portent atteinte aux droits de l’homme, l’observateur impartial constatera l’absence de Cuba, du Vietnam, de l’Afghanistan, du Nicaragua ou du Yémen démocratique, à moins que leur cas ne relève que du qualificatif : « pays socialiste »… Cela dit, Jean-Paul Costa a raison de conclure sur un regret, à savoir qu’en France, la défense des droits de l’homme demeure une affaire de spécialistes, et que le public ne lui accorde qu’une place secondaire. Les préoccupations légitimes actuelles en matière de lutte antiterroriste n’éclairciront point le tableau.