La politique militaire de la France en Afrique
Ce petit ouvrage remplit parfaitement le contrat qu’annonce son titre modeste et précis. Pascal Chaigneau, chargé de cours à Paris 2, professeur à l’École des hautes études internationales, y brosse un tableau complet de la politique militaire menée par la France en Afrique : options politiques traduites en institutions, menaces, moyens (1).
Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, les décisions de nos gouvernants successifs s’inscrivent sur une même ligne : adapter notre stratégie à l’évolution des pays africains, passant d’une totale dépendance à la libre association. Dans cette complicité d’États désireux d’affirmer une impossible indépendance et d’un protecteur traditionnel soucieux de discrétion, le dispositif militaire s’allège et la présence française s’amenuise, compensée par l’adoption d’un concept d’intervention à partir de la métropole.
La pression soviétique – ou la simple disposition de l’URSS à combler les vides – est fort bien décrite. L’Éthiopie et l’Angola en sont les 2 zones fortes, bourrées de Cubains « contributeurs spécialisés ». Mais l’océan Indien, baptisé en 1971 à l’ONU, par antiphrase ou vœu pieux, « zone de paix », retient aussi l’attention des marins soviétiques : ils contrôlent étroitement Bab el Mandeb (Aden et Socotra) et le canal de Mozambique (à partir des bases malgaches et mozambicaines).
Les 3 modes de la politique militaire française outre-mer sont convenablement présentés : assistance militaire technique, bases et unités stationnées, forces d’intervention. Un accent particulier est mis sur ces dernières forces, leurs capacités et leurs faiblesses. On regrettera seulement quelques affirmations bien légères sur l’arme nucléaire tactique, qui n’a point là sa place. On relèvera aussi la référence, maintenant habituelle, à la Force d’action rapide (FAR). Celle-ci pourtant n’apporte que peu aux unités d’intervention qui lui préexistaient : elle les coiffe seulement d’un échelon hiérarchique intermédiaire.
La place presque incongrue que la France a su garder en Afrique est justement soulignée, « seule puissance occidentale apte et décidée à assumer ses engagements en Afrique contre toute forme de déstabilisation ». Mais on regrettera qu’une présentation trop axée sur l’égoïsme national néglige de plus nobles motivations. Le général de Gaulle était sinon plus modeste du moins plus vrai, parlant de « la générosité, de l’intérêt et du génie de la France ».
(1) Le même sujet a été traité, de façon plus large, plus prospective, mais moins détaillée, par François Charollais et Jean de Ribes : « Le défi de l’outre-mer », Cahier de la Fondation pour les études de défense nationale (FEDN) n° 26.