Le Moyen-Orient au XXe siècle
L’importance du Moyen-Orient dans l’économie et la politique mondiales n’a guère besoin d’être démontrée. La précarité des équilibres internes et régionaux souligne les incertitudes de l’avenir.
Cette région, qui comprend dix-huit pays, couvre une superficie de 7 millions de kilomètres carrés, inférieure aux États-Unis. Sa population totale, de 175 millions d’habitants, a été façonnée par l’Islam qui constitue la religion de 95 % d’entre eux. Elle a connu le poids de la dépendance et y a réagi par un nationalisme dont la vigueur demeure. Mais, au-delà de ces traits unificateurs, le Moyen-Orient demeure fortement bigarré. La richesse de quelques pays contraste avec le dénuement de populations entières. Le total des PNB (Produits nationaux bruts, 270 milliards en 1978) est un peu supérieur à celui de l’Italie et un peu inférieur à celui de la Grande-Bretagne. La diversité des régimes politiques (dix républiques, sept monarchies), la présence de fortes minorités religieuses (chiites d’Irak, de Turquie, du Yémen ou du Bahreïn, chrétiens du Liban, de Syrie, coptes d’Égypte), les divergences politiques ou les antagonismes locaux constituent un tableau fort diversifié.
La réaction au contact avec l’Occident a été le thème dominant de la politique du Moyen-Orient au XXe siècle. Elle a alimenté maintes vagues nationalistes dont la dernière en date est celle du renouveau islamique. À cet égard, la tentative d’occidentalisation d’un Mustapha Kemal et le refus de Khomeiny apparaissent profondément antithétiques. De même, l’alignement d’Anouar el Sadate sur Washington après celui de Nasser sur Moscou démontre la précarité de certaines lignes politiques.
Trois entités (Empire ottoman, Perse et Égypte) dominaient l’espace moyen-oriental à la veille de la Première Guerre mondiale. Elles restent aujourd’hui les États les plus fortement peuplés de la région, d’où l’exemplarité de leur situation.
Effondrement de l’Empire ottoman, montée du nationalisme arabe, origines du sionisme sont les traits qui ont façonné la carte du Moyen-Orient d’aujourd’hui. La découverte du pétrole en Perse au début de ce siècle constitue la quatrième caractéristique de cet ensemble. C’est dire que le poids de l’histoire demeure une constante.
Beaucoup de pays ont cherché la modernisation par des voies plus ou moins autoritaires, à l’instar de la Turquie de Kemal et de l’Iran des Pahlavi, les séquelles des deux guerres mondiales ont été importantes au plan de la répartition des territoires et de la naissance des nationalismes. La présence de minorités ethniques ou religieuses a créé des conflits persistants (Palestine, Chypre, Liban).
Puis Jean-Pierre Derriennic brosse un panorama fort complet des forces politiques, économiques, idéologiques ou religieuses présentes dans la région. Partage de la Palestine, rattachement de la Turquie et de l’Iran à l’influence occidentale, apogée et déclin du nassérisme, guerre israélo-arabe, Chypre et l’importance croissante des pays pétroliers lui apparaissent à juste titre comme les principaux événements de l’époque récente.
Ce survol en quelque trois cents pages de presque un siècle d’histoire est précieux. Il permet justement de dépasser le cadre chronologique habituel depuis 1945. Ouvrage clair et solide, doté de cartes bien utiles, il ne se hasarde pas à tirer certaines conclusions générales et moins encore à scruter l’avenir. Il a raison tant il est hasardeux de s’aventurer sur ce terrain-là. ♦