Le lagon et l’atoll de Clipperton
Depuis quelques années, l’atoll de Clipperton, minuscule îlot désert au milieu du Pacifique, a été le sujet de nombreux récits, et même de véritables romans où, à des faits historiques très précis, souvent tragiques, se mêlent parfois des épisodes plus ou moins imaginaires… La « geste » de Clipperton reste, finalement, riche en couleur et très séduisante… Il suffit d’évoquer, pour en prendre conscience, les passionnants ouvrages de Mme La Barraque-Reyssac ou d’André Rossfelder pour qu’aussitôt revient en mémoire le drame des nombreux réfugiés de l’îlot et de sa petite garnison mexicaine, à l’orée du siècle…
Or, si cet atoll du Pacifique est bien un des hauts lieux des drames de la mer, il est aussi, sur un plan strictement scientifique, encore une énigme… Jusqu’à maintenant, seule la structure géologique de son rocher volcanique était bien connue… Mais son mystérieux lagon, entièrement fermé, la curieuse chimie de ses eaux, sa flore et sa faune tant microscopique que macroscopique, son hydrobiologie en général, et les conditions de vie faite à l’homme sur cette tête d’épingle, tout cela était à peu près inconnu… Or, tout se tient : et l’histoire événementielle de Clipperton, l’étude historique des modifications de sa couronne atollienne, sa géographie et sa climatologie, tout cela était nécessaire à une bonne compréhension de son état physico-chimique et biologique actuel. Sa bathymétrie et son hydrobiologie, jusqu’à maintenant ignorées, se sont révélées d’un intérêt exceptionnel. Véritable « bouillon de culture » gigantesque isolé au milieu de l’océan, ce lagon réunit une biocénose étonnante.
Ces données récentes ont été recueillies, mises en évidence, analysées, au cours d’un certain nombre de missions isolées, de 1966 à 1976, par des médecins des années (marine) et par une équipe de chercheurs, tant sur le terrain qu’en laboratoire.
L’ensemble des résultats de cette exploration systématique, biologique, géologique et chimique ne pouvait être que l’œuvre d’un travail en équipe. À l’issue des séjours de ces chercheurs, séjours un peu analogues à ceux de naufragés sur une île déserte, les données rassemblées ont été exploitées, afin d’approfondir non seulement les questions scientifiques fondamentales évoquées plus haut, mais aussi les problèmes d’hygiène, d’habitabilité, de survie, etc. ; qui peuvent se poser à d’éventuels habitants – volontaires ou non… – de l’atoll…
Au moment de la mise en œuvre d’une nouvelle législation de la mer, le devenir économique du lagon présente un grand intérêt : il ne faut pas oublier, en effet, que ce minuscule territoire français (12 km2) confère à notre pays un espace économique maritime de plus de 400 000 km2, environ l’étendue du Golfe de Gascogne !
C’est sous la direction de l’auteur, maître de recherches du service de santé et docteur des sciences naturelles, que ces observations, tant hydrologiques que chimiques, microbiologiques, etc. ont été réalisées. Il s’agit là d’une remarquable recension, d’une mise à jour très complète de nos connaissances du moment sur cet atoll, et d’un instrument de travail de premier ordre ; une bibliographie exhaustive et deux index, l’un des matières et des auteurs cités, l’autre des espèces animales et végétales étudiées, complètent ce bel ouvrage. ♦