La guerre et le droit
L’emploi qu’un groupe humain fait de la violence à l’appui de la cause qu’il soutient prenait, dans le cas d’États s’affrontant par les armes, la forme – relativement facile à cerner il y a un siècle – de la « guerre étrangère » par opposition à la « guerre civile ». À la même époque, il apparaissait qu’à ce type particulier mais bien défini des relations entre États pouvait s’appliquer des normes de droit coutumier et, aussi largement que possible, de droit écrit, et qu’il convenait de le faire dans un souci humanitaire.
Antérieurement, une telle application, souvent plus morale que juridique, avait été souvent tentée, par les clercs de l’Église médiévale ou les fondateurs du droit international à la Renaissance par exemple, sans oublier d’ailleurs quelques grands capitaines agissant dans la pratique même de leur métier. Avec l’évolution de la guerre au XXe siècle, la guerre a cessé d’être le choc d’éléments terrestres et maritimes clairement habilités par leurs gouvernements respectifs dûment reconnus à utiliser leurs armes les uns contre les autres en excluant les tiers. La zone soumise à l’action des armes a tendance à s’étendre sans limitations : leurs objectifs cessent d’être les armes adverses (et ceux qui les manient) pour englober ceux qui les produisent et les moyens de fabrication ; elles s’en prennent à tout ce qui, matériellement et moralement, permet à l’adversaire de soutenir la lutte. Les concepts de guerre économique, de guerre psychologique, de guerre totale apparaissent, ou plutôt resurgissent, avec une dimension accrue.
Que deviennent à notre époque de guerre nucléaire et de guerre révolutionnaire, les normes qu’on pourrait et devrait imposer en matière d’état de paix ou de guerre, d’ouverture et de cessation des hostilités, de belligérance, neutralité, insurrection ou « libération », de respect des personnes et des biens « civils », de combattants, franc-tireurs, guérilleros, civils et rebelles, d’objectifs économiques et « démographiques ». d’occupation, prise de gages, représailles et dissuasion, de répression des crimes de guerre ? Sur toutes ces questions, ce livre invite à une réflexion approfondie et fournit une documentation très complète. On notera peut-être quelques répétitions, mais l’ensemble a une valeur d’actualité avec, peut-être, un rappel insuffisant des données anciennes propres à éclairer le présent. Il est significatif que les auteurs, trois membres de l’Université de Montpellier I. aient articulé leur œuvre autour de deux questions majeures très explicites en elles-mêmes : le droit de la guerre est-il dépassé ? Le droit humanitaire est-il illusoire ? ♦