La chute de Saïgon (30 avril 1975)
Le Vietnam reste, pour tous ceux qui, au cours des trente dernières années, ont été les acteurs ou les témoins de son drame, un sujet dont il est difficile de parler sans passion et encore plus, sans doute, lorsqu’il s’agit de la chute de Saigon et de la fin de la République du Sud-Vietnam. L’auteur a été l’un des rares observateurs de cette période à bénéficier de larges facilités de déplacement et de contact après le 30 avril.
Son livre est une apologie, parfois outrée, mais souvent habile, des vainqueurs. Une fois admis ce caractère d’ouvrage de propagande, il reste passionnant, d’abord pour un certain nombre de mises au point sur le passé : la fiction des troupes Viet Cong, celle de l’indépendance du GRP (Gouvernement révolutionnaire provisoire de la République du Sud Viêt Nam), le noyautage de la Troisième Force, la revendication, par les communistes, de l’assassinat de Nguyen Van Bong, qui fut sans doute le dernier espoir d’union d’un Sud anticommuniste. Ensuite et surtout pour la description de la prise en main de la population « libérée », de sa rééducation (« hoc tap ») : on pense à un troupeau de moutons apeurés, mené par ses chiens de bergers, can bo et bo doi, qui savent mordre sans abîmer le bétail.
L’auteur ne cache pas son admiration pour les communistes vietnamiens, les « saints », comme il les appelle ; il nous dit leur absence totale d’estime pour leurs compatriotes du Sud, non seulement les « fantoches » de l’Ancien régime, enfuis ou restés sur place, mais aussi ceux de la Troisième Force avec le général Minh (ceux qui se sont « trompés et dont les vies ont été autant de vies gaspillées », p. 155). En fait c’est tout le peuple, pour lequel à aucun moment l’auteur n’a un mot de pitié ou de compassion, qui se trouve implicitement condamné.
Ce témoignage est en définitive accablant pour ceux qu’il prétend exalter. ♦