L’argent secret
S’il est un sujet mal connu, presque tabou, c’est bien celui du financement des partis politiques. D’où le titre du court mais très intéressant ouvrage d’André Campana. Aux termes d’une patiente enquête de plus de trois ans, l’auteur presque un familier pour des millions de téléspectateurs, dresse le bilan des informations et des confidences qu’il a pu recueillir aux meilleures sources.
L’argent des partis politiques a trois origines principales : les « fonds secrets », les sommes versées par les entreprises et les cotisations et dons des militants. Seuls les partis de la majorité, quelle que soit la couleur de celle-ci, bénéficient des fonds secrets. Inscrits au budget du Premier ministre, ils sont répartis entre les différents ministères. Leur montant peut être connu avec exactitude. Les fonds versés par les entreprises sont beaucoup plus diversifiés. Pour l’essentiel, ils sont destinés à ceux qui défendent efficacement le « libéralisme » économique. Il est possible d’en connaître le montant exact. Quant au produit des cotisations, il est évidemment fonction à la fois du nombre de militants et de leur générosité. À cet égard, deux partis dominent : l’UDR (devenu RPR depuis la parution du livre) et surtout le Parti communiste.
André Campana, sans parvenir à dresser un tableau exhaustif (mais le pouvait-il ?), passe successivement en revue tous les partis politiques, y compris les gauchistes, faisant apparaître clairement, du seul point de vue financier, leurs forces et leurs faiblesses respectives. Certains chiffres donnent le vertige car les campagnes électorales – pour ne parler que de ces périodes chaudes – sont de véritables gouffres. Le coût pour se faire élire député est de 40 000 F. Mais il s’agit là d’un minimum « JJSS » aurait dépensé 1,50 MF pour prendre Nancy et 2 MF pour se faire battre à Bordeaux.
Peut-on mettre de l’ordre dans l’embrouillamini politico-financier ? L’auteur ne cache pas ses préférences pour le système allemand qui subventionne ouvertement et équitablement tous les partis. Il rapporte les opinions des trois Présidents de la Ve République à cet égard. L’existence en France d’un parti communiste puissant est présentée comme l’obstacle majeur à l’introduction dans notre pays d’un système de ce type. Est-ce l’unique raison ? ♦