Radioscopie de l’Angleterre
Le titre de l’édition française de cet ouvrage (bien que différent du titre original : New Anatomy of Britain) est très bien choisi, parce qu’il suggère non seulement un examen en état de fonctionnement de l’organisme du patient, mais également un diagnostic – but de cet examen. Le livre d’Anthony Sampson contient l’un et l’autre, et c’est ce qui le rend si vivant : une leçon d’anatomie, bien que plus précise et plus scientifique, aurait sans doute nécessité quelqu’un de plus averti qu’un journaliste, et aurait risqué d’être ennuyeuse.
Le propos de l’auteur est, d’après ses propres termes, « de convier ses lecteurs à une visite organisée des allées du pouvoir, interrompue ici et là par des digressions et intermèdes, le tout pour essayer de répondre à cette question : qui dirige l’Angleterre ? » Bien qu’il lui ait fallu près de 500 pages pour répondre, il n’y a aucun doute qu’il a réalisé son programme, et même au-delà.
Nous connaissons bien en France ce genre littéraire et nous le goûtons assez, parce qu’il comporte obligatoirement une critique de l’ordre établi et du pouvoir, quelques « révélations » opportunes, des portraits – en général sans complaisance – des « princes qui nous gouvernent » et des technocrates qui nous administrent. S’agissant d’un pays qui n’est pas le nôtre, ces mêmes critiques, révélations ou portraits ont certainement moins de sel, parce que les protagonistes, la scène et la pièce qui s’y joue nous sont mal ou peu connus, et parce que l’humour anglais tel que le pratique avec dextérité Anthony Sampson, ne nous est pas toujours familier.
Mais qu’importe ! Car, dans ce cas particulier, l’auteur est allé au-devant de l’objection en faisant ressortir très clairement, d’une façon presque didactique, et chaque fois qu’il le fallait, les particularités et l’originalité des institutions anglaises. À vrai dire, nous nous sentons d’autant moins dépaysés, que le fond des problèmes politiques, économiques et sociaux est aujourd’hui de plus en plus le même dans la plupart des pays faisant partie de l’Europe. Nous constatons même, à mesure que nous avançons dans la lecture de Radioscopie de l’Angleterre, que le major Thompson finit par ressembler étonnamment à son homologue français. ♦